Principaux messages
- Nous ne savons pas si les interventions psychologiques et éducatives (qui visent à modifier les pensées, les comportements et les émotions) par le biais de la télé-rééducation (l'obtention de thérapies conçues pour aider les personnes à récupérer et à retrouver leurs mouvements (également connues sous le nom de services de rééducation) à l'aide de téléphones ou d'ordinateurs) ont un effet sur la douleur, mais il est probable qu'elles améliorent la fonction (la façon dont les personnes peuvent bouger leur cou).
- La pratique d'exercices et d'activités physiques par le biais de la télé-rééducation peut réduire légèrement les douleurs cervicales par rapport à un traitement minimal (par exemple, absence de traitement ou conseils).
- Il n'existe pas de données probantes suffisantes pour se prononcer sur l'efficacité de la télé-rééducation, et d'autres études de haute qualité sont nécessaires.
Que voulions‐nous savoir ?
Les douleurs cervicales sont fréquentes et peuvent limiter les activités quotidiennes. La télé-rééducation consiste à obtenir des services de rééducation (thérapies conçues pour aider les personnes à se rétablir et à retrouver leurs mouvements) par le biais de la technologie, comme les appels téléphoniques, les appels vidéo ou les applications mobiles. Cela peut aider les gens à recevoir des soins sans avoir à se rendre dans une clinique. Nous voulions savoir si le fait de recevoir des soins par le biais de la télé-rééducation réduisait les douleurs cervicales et améliorait la fonction (la capacité des personnes à bouger leur cou).
Nous voulions savoir si la télé-rééducation était plus efficace que :
- une intervention minimale (comme les soins standards, l'éducation uniquement ou l'inscription sur une liste d'attente) ;
- un traitement similaire dispensé en personne dans une clinique (appelé traitement apparié hors télésanté) ; et
- un traitement en personne différent (appelé traitement non apparié).
Nous avons étudié la réduction de la douleur, l'amélioration de la fonction, de la qualité de vie et de la santé mentale chez des personnes souffrant de différents types de cervicalgies.
Nous voulions également vérifier si la télé-rééducation entraînait des effets indésirables graves ou si les personnes arrêtaient le traitement en raison d'un problème quelconque.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études comparant la télé-rééducation à un traitement minimal, à une rééducation en personne ou à d'autres traitements chez des adultes souffrant de douleurs cervicales.
Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons trouvé 13 études portant sur 1 042 personnes, dont la plupart étaient des femmes. Les études ont été menées en Chine, au Danemark, en Allemagne, en Grèce, en Italie, aux Pays-Bas, en Corée du Sud, en Thaïlande et en Turquie.
La télé-rééducation a été dispensée au moyen d'appels téléphoniques, d'applications, de vidéos enregistrées, d'appels vidéo et de sites web. Les programmes ont duré entre un jour et 48 semaines.
Principaux résultats
Nous ne sommes pas sûrs de l'efficacité de la télé-rééducation. La meilleure estimation à ce jour suggère qu'elle pourrait apporter une légère aide par rapport à une intervention minimale.
Douleur cervicale chronique (durant plus de 12 semaines)
La télé-rééducation psychologique ou éducative (qui vise à modifier les pensées, les comportements et les émotions) peut ne faire que peu ou pas de différence (mais les données probantes sont très incertaines), ne pas améliorer la qualité de vie ou ne pas réduire la dépression. Cependant, elle améliore probablement la fonction et réduit légèrement l'anxiété par rapport à une intervention minimale.
La télé-rééducation basée sur l'exercice peut légèrement réduire la douleur, mais les données probantes sont très incertaines quant à son effet sur la fonction ou la qualité de vie par rapport à une intervention minimale.
Une étude a testé la télé-rééducation à composantes multiples (un mélange de différents traitements). Les données probantes suggèrent qu'elle pourrait ne pas contribuer à réduire la douleur par rapport à une intervention minimale.
Peu d'études ont fait état d'effets indésirables, et aucune n'a fourni de détails sur les personnes ayant arrêté le traitement en raison de problèmes.
Quelles sont les limites des données probantes ?
Nous ne sommes pas certains des bénéfices de la télé-rééducation pour les raisons suivantes :
- il n'y avait pas assez d'études la comparant à d'autres traitements ;
- la qualité des études était variable ; et
- la plupart des études étaient de petite taille, ce qui rend difficile l'obtention de résultats clairs.
Des recherches plus approfondies sont nécessaires pour savoir si la télé-rééducation est efficace pour les douleurs cervicales.
Ces données probantes sont-elles à jour ?
Les données probantes sont à jour au 11 avril 2024.
Lire le résumé complet
La cervicalgie est une affection très courante, classée au quatrième rang mondial en termes d'années vécues avec un handicap. La télé-rééducation gagne en popularité grâce aux progrès des technologies et des télécommunications. Malgré les bénéfices potentiels et le nombre croissant d'essais cliniques, l'efficacité de la télé-rééducation chez les personnes souffrant de douleurs cervicales non spécifiques reste incertaine.
Objectifs
Évaluer les bénéfices et les risques de la télé-rééducation pour améliorer la douleur et la fonction par rapport à l'absence de traitement, à la liste d'attente, aux soins standards ou à toute autre intervention active chez les personnes souffrant de douleurs cervicales aiguës, subaiguës et chroniques non spécifiques.
Stratégie de recherche documentaire
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane Central des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, Embase, cinq autres bases de données et deux registres d'essais jusqu'au 11 avril 2024, sans restriction de langue ou de statut de publication. Nous avons examiné les références bibliographiques des études potentielles pertinentes.
Critères de sélection
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés sur la télé-rééducation chez des adultes souffrant de douleurs cervicales non spécifiques. Nous avons classé les interventions de télé-rééducation en trois catégories : 1. les interventions psychologiques ou éducatives délivrées en télésanté ; 2. les exercices ou activités physiques délivrées en télésanté ; et 3. les interventions à composantes multiples délivrées en télésanté. Nous avons inclus des essais comparant la télé-rééducation à une intervention minimale, à un traitement non-télésanté apparié et à un traitement témoin non apparié. Les critères de jugement principaux étaient l'intensité de la douleur, la fonction, la qualité de vie liée à la santé, l'anxiété, la dépression, les événements indésirables, les abandons pour cause d'événements indésirables et les événements indésirables graves à court terme. Les critères de jugement secondaires étaient le retour au travail, l'auto-efficacité, l'évitement de la peur, la dramatisation de la douleur et l'adhésion.
Recueil et analyse des données
Deux auteurs de la revue ont indépendamment examiné les références pertinentes, extrait les données et évalué le risque de biais dans les études incluses. Nous avons extrait les données à l'aide d'un formulaire standardisé. Nous avons regroupé les résultats des essais en utilisant un modèle à effets aléatoires pour la méta-analyse. Nous avons combiné les résultats dans une méta-analyse en utilisant la différence de moyennes (DM avec les critères de jugement de douleur et d'incapacité exprimés sur une échelle de 0 à 100) ou la différence de moyennes standardisée (DMS), et les intervalles de confiance à 95 % (IC) pour les critères de jugement continus lors du suivi immédiat, à court, moyen et long terme. Dans le cas contraire, nous présentons les données avec un résumé narratif. Nous avons évalué l'hétérogénéité à l'aide de la valeur I 2 et du test Chi 2 , et évalué le niveau de confiance de données probantes à l'aide de l'approche GRADE.
Résultats principaux
Nous avons inclus 13 essais contrôlés randomisés (1 042 participants). La plupart des études ont porté sur des femmes (71 %), âgées de 21 à 60 ans (moyenne 39 ans, écart-type 11 ans). Les études ont utilisé différentes modalités pour la télé-rééducation, comme le téléphone, les applications pour smartphone, les vidéos préenregistrées, la visioconférence et les sites web. Les études ont été menées en Chine, au Danemark, en Allemagne, en Grèce, en Italie, aux Pays-Bas, en Corée du Sud, en Thaïlande et en Turquie. Les interventions de télé-rééducation ont duré entre un jour et 48 semaines. La plupart des études présentaient un faible risque de biais de sélection, d'attrition et de notification. Toutes les études présentaient un risque élevé de biais de performance lié à l'aveugle des participants et des thérapeutes, et de biais de détection pour l'évaluation des critère de jugement.
Douleurs cervicales chroniques
Télé-rééducation (psychologique ou éducative) par rapport à une intervention minimale
Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance très faible selon lesquelles il pourrait y avoir peu ou pas de différence entre la télé-rééducation (psychologique ou éducative) et l'intervention minimale en ce qui concerne l'intensité de la douleur lors du suivi à court terme, mais les données probantes sont très incertaines (DM -8,4, IC à 95 % -23,9 à 7,1 ; 2 études, 170 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance modéré indiquant que la télé-rééducation (psychologique ou éducative) améliore probablement la fonction par rapport à une intervention minimale lors d'un suivi à court terme (DM 6,0, IC à 95 % 0,9 à 11,1 ; 1 étude, 53 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance faible selon lesquelles la télé-rééducation (psychologique ou éducative) pourrait ne pas améliorer la qualité de vie liée à la santé en ce qui concerne la composante physique par rapport à une intervention minimale lors d'un suivi à court terme (moyenne : 47,4 avec la télé-rééducation par rapport à 45,1 avec l'intervention minimale ; 1 étude, 117 participants) et la qualité de vie liée à la santé relative à la composante mentale lors du suivi à court terme (moyenne : 45,4 avec la télé-rééducation par rapport à 47,2 avec l'intervention minimale ; 1 étude, 117 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance modéré selon lesquelles la télé-rééducation (psychologique ou éducative) réduit probablement légèrement l'anxiété par rapport à une intervention minimale lors du suivi à court terme (DM -4,5, IC à 95 % -8,9 à -0,1 ; 1 étude, 53 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance faible indiquant qu'il pourrait y avoir peu ou pas de différence entre la télé-rééducation (psychologique ou éducative) et l'intervention minimale pour la dépression lors du suivi à court terme (DM -2,3, IC à 95 % -6,5 à 1,9 ; 1 étude, 53 participants). Aucune étude de cette comparaison n’a rapporté d’abandon dû à des événements indésirables ou d'événements indésirables graves.
Télé-rééducation (exercice et activité physique) par rapport à une intervention minimale
Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance faible indiquant que la télé-rééducation (exercice et activité physique) peut réduire l'intensité de la douleur par rapport à une intervention minimale lors d'un suivi à court terme (DM -20,4, IC à 95 % -21,9 à -19,1 ; 3 études, 146 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance très faible que la télé-rééducation peut améliorer la fonction par rapport à une intervention minimale lors d'un suivi à court terme, mais les données probantes sont très incertaines (DM 5,0, IC à 95 % 0,5 à 9,4 ; 3 études, 146 participants). Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance très faible qui indiquent qu'il pourrait y avoir peu ou pas de différence entre la télé-rééducation (exercice et activité physique) et l'intervention minimale en ce qui concerne la qualité de vie (composante physique) lors du suivi à court terme (DMS -0,06, IC à 95 % -0,7 à 0,6 ; 2 études, 64 participants) ou la qualité de vie (composante mentale) lors du suivi à court terme (DMS -0,3, IC à 95 % -0,8 à 0,2 ; 2 études, 64 participants), mais les données probantes sont très incertaines. Aucune étude de cette comparaison n'a évalué l'anxiété, la dépression, l'abandon en raison d'événements indésirables ou d'événements indésirables graves.
Télé-rééducation (interventions à composantes multiples) par rapport à une intervention minimale
Nous avons trouvé des données probantes d’un niveau de confiance faible qui indiquent qu'il pourrait y avoir peu ou pas de différence entre la télé-rééducation (à composantes multiples) et l'intervention minimale en ce qui concerne l'intensité de la douleur lors du suivi à court terme (DM -1,0, IC à 95 % -5,9 à 3,9 ; 1 étude, 213 participants). Aucune étude de cette comparaison n'a évalué la fonction, la qualité de vie liée à la santé, l'anxiété, la dépression, les abandons pour cause d'événements indésirables et les événements indésirables graves.
Conclusions des auteurs
Les données probantes actuellement disponibles ne sont pas concluantes en raison de leur très faible niveau de confiance, et la question de l'efficacité des interventions de télé-rééducation pour les douleurs cervicales non spécifiques reste donc sans réponse.
Traduction et Post-édition réalisées par Cochrane France avec le soutien de Julie Bui (bénévole chez Cochrane France) et grâce au financement du Ministère de la Santé. Une erreur de traduction ou dans le texte original ? Merci d’adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr