Principaux messages
- Comparée à l'injection placebo, l'injection de cellules souches pour les personnes souffrant d'arthrose du genou pourrait légèrement améliorer la douleur et la fonction.
- Nous ne savons pas si l'injection de cellules souches ralentit la progression de la maladie, améliore la qualité de vie ou les chances de succès du traitement, ni si elle est sûre.
Qu'est-ce que l'arthrose ?
L'arthrose est une maladie des articulations. L'articulation perd du cartilage et d'autres modifications de la structure de l'articulation peuvent survenir. Cela peut entraîner des douleurs et une réduction de la capacité à utiliser l'articulation.
Comment l'arthrose est-elle traitée ?
La plupart des traitements visent à soulager les symptômes, mais peu d'entre eux sont efficaces. La chirurgie de remplacement de l’articulation est le seul traitement définitif et est réservée aux personnes atteintes d'une forme sévère de la maladie et pour lesquelles les autres traitements n'ont apporté aucun bénéfice.
Les cellules souches sont un type particulier de cellules qui peuvent se développer en cellules matures dans différentes parties du corps, y compris les cellules qui produisent le cartilage, les os et le tissu graisseux. Ainsi, en théorie, ces cellules souches pourraient conduire à la repousse du cartilage endommagé dans l'articulation, ce qui a mené à leur utilisation comme traitement de l'arthrose.
Que voulions‐nous savoir ?
Nous voulions savoir si les injections de cellules souches amélioraient la douleur, la fonction, le succès du traitement et la qualité de vie, si elles ralentissaient la progression de la maladie ou causaient des effets indésirables chez les personnes souffrant d'arthrose du genou.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études qui comparaient les injections de cellules souches avec un placebo, l'absence de traitement, les soins habituels ou d'autres traitements pour l'arthrose du genou.
Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué notre confiance dans les données probantes, sur la base de facteurs tels que la variabilité des injections de cellules souches, l'exhaustivité des données probantes et la taille de l'étude.
Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons trouvé 25 études (1 341 participants), dont 8 études (459 participants) qui comparaient une injection de cellules souches dans le genou avec une injection placebo. Les autres études comparaient les injections de cellules souches avec l'absence de traitement ou aux soins habituels (2 études, 30 participants), avec une injection intra-articulaire de glucocorticoïdes (1 étude, 33 participants), avec l'injection d'acide hyaluronique (7 études, 429 participants), avec une injection de plasma riche en plaquettes (2 études, 142 participants), avec l'acétaminophène par voie orale (paracétamol ; 1 étude, 51 participants), avec les AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens) plus thérapie physique plus injection d'acide hyaluronique (1 étude, 57 participants) et avec une injection de cellules souches plus une co-intervention intra-articulaire par rapport à la co-intervention seule (3 études, 140 participants). Les études ont été menées dans le monde entier, notamment en Europe, au Moyen-Orient, en Asie, aux États-Unis, en Amérique du Sud, au Royaume-Uni et en Australie.
Résultats principaux
Comparées aux injections placebo, les injections de cellules souches peuvent améliorer légèrement la douleur et la fonction.
La douleur mesurée sur une échelle de 0 à 10 (0 étant l'absence de douleur) à six mois était améliorée de 1,2 point grâce à l'injection de cellules souches.
- Les personnes ayant reçu une injection de cellules souches ont évalué leur douleur à 3,3 points.
- Les personnes ayant reçu une injection placebo ont évalué leur douleur à 4,5 points.
La fonction mesurée sur une échelle de 0 à 100 (0 étant la meilleure fonction) à six mois était améliorée de 14,2 points grâce à l'injection de cellules souches.
- Les personnes ayant reçu une injection de cellules souches ont évalué leur fonction à 32,1 points.
- Les personnes ayant reçu une injection placebo ont évalué leur fonction à 46,3 points.
On ne sait pas si les injections de cellules souches améliorent la qualité de vie mesurée sur une échelle de 0 à 100 (0 étant la meilleure fonction) à six mois.
- Les personnes ayant reçu une injection de cellules souches ont évalué leur qualité de vie à 68,1 points.
- Les personnes ayant reçu une injection placebo ont évalué leur qualité de vie à 45,3 points.
Après l'injection de cellules souches, 153 personnes de plus sur 1000 ont estimé que leur traitement était un succès à 12 mois.
- 683 pour 1000 ont fait état d'un succès du traitement par injection de cellules souches.
- 530 pour 1000 ont fait état d'un succès du traitement avec l'injection placebo.
Après l'injection de cellules souches, 7 personnes de moins sur 1000 ont présenté des événements indésirables graves à 12 mois.
- 16 personnes sur 1000 ont subi un événement indésirable grave lié à l'injection de cellules souches.
- 23 personnes sur 1000 ont rapporté un événement indésirable grave avec l'injection placebo.
Aucun retrait prématuré de l'étude en raison de risques liés aux injections de cellules souches ou de placebo n'a été signalé.
La progression de la maladie n'a été évaluée dans aucune étude.
Quelles sont les limites des données probantes ?
Notre confiance dans les estimations relatives à la douleur et à la fonction est faible, car la façon de préparer les cellules souches et la bonne dose sont inconnues et varient d'une étude à l'autre. En outre, jusqu'à trois grandes études n'ont pas pu être incluses, car elles ont été menées mais retirées par leurs investigateurs avant la publication des résultats.
Nous ne savons pas si davantage de personnes font état d'un succès du traitement ou d'une amélioration de la qualité de vie. Nous sommes incertains du risque des effets indésirables graves ou de l'arrêt du traitement dû aux effets indésirables car, en plus des différences entre les cellules souches utilisées et l'absence des résultats de grandes études, il y a eu un très petit nombre d'événements.
Ces données probantes sont-elles à jour ?
Les données probantes sont à jour jusqu'au 15 septembre 2023.
Note de l'éditeur : Il s'agit d'une revue systématique dynamique. Nous recherchons de nouvelles données probantes tous les trois mois et nous mettons à jour la revue lorsque nous identifions de nouvelles données pertinentes. Veuillez consulter la base de données Cochrane des revues systématiques pour connaître l’état actuel de cette revue.
Lire le résumé complet
Les cellules souches sont des cellules précurseurs spécialisées qui peuvent remplacer les cellules âgées ou endommagées, contribuant ainsi à maintenir une fonction tissulaire saine. La thérapie par cellules souches est de plus en plus utilisée comme traitement de l'arthrose du genou, malgré l'absence de clarté sur le mécanisme par lequel la thérapie par cellules souches peut ralentir la progression de la maladie, et malgré l'incertitude de ses bénéfices et risques.
Objectifs
Évaluer les bénéfices et risques des injections de cellules souches pour les personnes souffrant d'arthrose du genou. Un objectif secondaire est de maintenir à jour les données probantes à l’aide d’une revue systématique dynamique.
Stratégie de recherche documentaire
Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane Central Register of Controlled Trials (CENTRAL), MEDLINE et Embase le 15 septembre 2023, sans restriction de date ou de langue de publication. Nous avons également effectué des recherches sur ClinicalTrials.gov et sur la plateforme internationale de registres d'essais cliniques de l'OMS (ICTRP) pour identifier des registres d'essais pertinents et des essais en cours.
Critères de sélection
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) ou quasi randomisés, comparant une injection de cellules souches avec une injection placebo, l'absence de traitement ou une prise en charge habituelle, une injection de glucocorticoïdes, d'autres injections, l'exercice, la pharmacothérapie, les interventions chirurgicales, les suppléments ou les thérapies complémentaires chez les personnes souffrant d'arthrose du genou.
Recueil et analyse des données
Deux auteurs de la revue ont sélectionné les études à inclure, extrait les caractéristiques des essais et les données sur les critères de jugement, évalué le risque de biais et évalué la certitude des données probantes à l'aide de l'approche GRADE. La comparaison principale était l'injection de cellules souches par rapport à l'injection placebo. Le premier point de mesure pour évaluer la douleur, la fonction et la qualité de vie était entre trois et six mois, et la fin de l'essai pour évaluer le succès rapporté par les participants, les modifications de la structure de l'articulation et les événements indésirables. Les principaux critères de jugement comprenaient la douleur, la fonction, la qualité de vie, l'évaluation globale du succès du traitement, la progression radiographique des articulations, les abandons pour cause d'événements indésirables et les événements indésirables graves.
Résultats principaux
Nous avons identifié 25 essais randomisés (1 341 participants) comparant les injections de cellules souches avec une injection placebo (8 essais), avec l'absence de traitement ou aux soins habituelles (analgésie, perte de poids et exercice) (2 essais), avec une injection de glucocorticoïdes (1 essai), avec une injection d'acide hyaluronique (7 essais), avec une injection de plasma riche en plaquettes (2 essais), avec de l’acétaminophène oral (paracétamol) (1 essai), avec des anti-inflammatoires non stéroïdiens combinés à une thérapie physique et à une injection d'acide hyaluronique (1 essai) et avec une injection de cellules souches associée à une co-intervention intra-articulaire par rapport à la co-intervention seule (3 essais) chez des personnes souffrant d'arthrose du genou. Les essais étaient principalement de petite taille, allant de 6 à 252 participants, seuls deux essais comptaient plus de 100 participants. L'âge moyen des participants était compris entre 51 et 66 ans, et la durée des symptômes variait de un à dix ans.
Les essais contrôlés par placebo étaient globalement exempts de biais, tandis que la plupart des essais sans placebo étaient susceptibles de présenter des biais de performance et de détection. Ici, nous nous limitons à la comparaison principale, l'injection de cellules souches par rapport à l'injection placebo.
Comparée à une injection placebo, l'injection de cellules souches pourrait améliorer légèrement la douleur et la fonction jusqu'à six mois après le traitement. La douleur moyenne (échelle de 0 à 10, 0 pas de douleur) était de 4,5 points sur 10 avec l'injection de placebo et meilleure de 1,2 points (de 2,5 à 0 points) avec l'injection de cellules souches (I 2 = 80 % ; 7 études, 445 participants). La fonction moyenne (échelle de 0 à 100, 0 étant la meilleure fonction) était de 46,3 points avec l'injection de placebo et de 14,2 points de mieux (25,3 à 3,1 points) avec l'injection de cellules souches (I 2 = 82 % ; 7 études, 432 participants). Nous ne savons pas si les injections de cellules souches améliorent la qualité de vie ou augmentent le nombre de participants qui déclarent avoir une réussite du traitement par rapport à l'injection placebo, car le niveau de confiance dans les données probantes était très faible. La qualité de vie moyenne était de 45,3 points avec l'injection placebo et de 22,8 points de mieux (18,0 points de moins bien à 63,7 points de mieux) avec l'injection de cellules souches (I 2 = 96 % ; 2 études, 288 participants) jusqu'à six mois de suivi. À la fin du suivi, 89/168 participants (530 pour 1000) dans le groupe placebo ont déclaré avoir une réussite du traitement, contre 126/180 participants (683 pour 1000) dans le groupe cellules souches (risque relatif (RR) 1,29, IC à 95 % 1,10 à 1,53 ; I 2 = 0 % ; 4 essais, 348 participants).
Nous avons rétrogradé la certitude des données probantes en niveau de confiance faible pour la douleur et la fonction en raison du caractère indirect (la source, la méthode de préparation et la dose de cellules souches variaient d'une étude à l'autre) et d'un biais de publication présumé (jusqu'à trois ECR plus importants ont été menés, mais retirés avant que les résultats ne soient notifiés). Pour la qualité de vie et le succès du traitement, nous avons encore rétrogradé les données probantes à un niveau de confiance très faible en raison de l'imprécision, en plus du caractère indirect et du biais de publication suspecté.
Nous ne sommes pas certains des risques potentiels associés à l'injection de cellules souches, car le taux d'événements indésirables graves était très faible. À la fin du suivi, 5/219 participants (23 pour 1000) du groupe placebo ont présenté des événements indésirables graves, contre 4/242 participants (16 pour 1000) du groupe cellules souches (RR 0,72, IC à 95 % 0,20 à 2,64 ; I 2 = 0 % ; 7 essais, 461 participants), aucun abandon n'a été signalé en raison d'événements indésirables. Les données probantes ont été rétrogradées en niveau de confiance très faible en raison de leur caractère indirect, d'un biais de publication présumé et de leur imprécision.
La progression radiographique n'a été évaluée dans aucune des études incluses.
Conclusions des auteurs
Comparées aux injections placebo et sur la base de données probantes d’un niveau de confiance faible, les injections de cellules pourraient améliorer légèrement la douleur et la fonction chez les personnes souffrant d'arthrose du genou. Les effets des injections de cellules souches sur la qualité de vie ou sur le nombre de personnes qui déclarent avoir une réussite du traitement sont incertains. Bien que les bénéfices supposés des thérapies à base de cellules souches pour l'arthrose incluent des effets régénérateurs potentiels sur les tissus endommagés, en particulier le cartilage articulaire, nous restons incertains de l'effet des injections de cellules souches sur la progression structurelle du genou (mesurée par l'apparence radiographique). Il existe également des incertitudes quant à la sécurité des injections de cellules souches. Les événements indésirables graves ont été peu fréquents, bien que toutes les interventions invasives sur les articulations (y compris les injections) comportent un faible risque d'arthrite septique. Le risque d’avoir d'autres effets indésirables importants, y compris ceux liés à l'utilisation d'une thérapie ayant la capacité théorique de favoriser la croissance cellulaire, ou liés à l'utilisation de cellules allogéniques, reste inconnu.
Traduction et Post-édition réalisées par Cochrane France avec le soutien de Pauline Coutault (bénévole chez Cochrane France) et grâce au financement du Ministère de la Santé. Une erreur de traduction ou dans le texte original ? Merci d’adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr