Le rituximab chez les personnes atteintes de sclérose en plaques

Principaux messages

- Le rituximab pourrait offrir un bénéfice modéré à important par rapport à une série d'autres médicaments dans la prévention des rechutes dans la sclérose en plaques (SEP) récurrente. En comparaison avec l'absence de traitement médicamenteux, les effets souhaités seraient plus importants.

- On dispose de peu d’informations pour déterminer l'effet du rituximab dans la prévention de l'aggravation du handicap dans toutes les formes de SEP.

- Les effets néfastes graves sont relativement rares chez les personnes atteintes de SEP, ce qui les rend difficiles à étudier, de plus ils n'ont pas été bien documentés dans les études.

Quelle est la question ?

Le rituximab est un médicament administré par voie d’une perfusion intraveineuse (par le relais d’une veine); il peut inhiber les fonctions de certaines cellules immunitaires. Le système immunitaire défend l’organisme contre les infections et se compose de nombreux types de cellules immunitaires ; il est affecté dans la physiopathologie de la SEP.

Le rituximab est actuellement utilisé dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire qui rencontrent des obstacles majeurs pour accéder aux médicaments officiellement approuvés pour la SEP. Cependant, le rituximab n'est pas toujours remboursé par les systèmes de santé car il n'est pas autorisé dans la SEP par les autorités de commercialisation.

Le rituximab est considéré comme une option de traitement abordable, car il est considéré comme étant un traitement grandement efficace (similaire aux autres médicaments approuvés et utilisés pour traiter la SEP), mais son coût est considérablement plus faible et la fréquence de traitement par le rituximab est inférieure à celle du traitement par les autres molécules. Le traitement par rituximab nécessite des soins spécialisés et des unités de soins munies d’installations pour perfusion, mais d'autres médicaments approuvés exigent de même ces conditions.

Que voulions-nous élucider?

Notre objectif était d'étudier les effets bénéfiques et indésirables du rituximab chez les personnes atteintes de sclérose en plaques (SEP), lorsqu'il est utilisé en tant que « traitement de premier choix » ou en tant que « traitement de substitution » (en d'autres termes, utilisé lorsque d'autres médicaments ne sont pas/plus efficaces ou deviennent contre-indiqués).

Nous voulions savoir si le rituximab était plus efficace que d'autres médicaments dans la prévention de l'aggravation du handicap et la récurrences des rechutes, et dans l’amélioration du bien-être.

Nous avons également voulu savoir si le rituximab était associé à des effets indésirables ou néfastes, par exemple des effets indésirables graves, les infections courantes, le cancer et la mortalité (décès).

Qu'avons-nous fait ?

Nous avons recherché les études qui ont comparé le rituximab à tous les autres médicaments approuvés pour la SEP. Nous avons effectué des recherches dans la littérature jusqu'en janvier 2021. Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué notre niveau de confiance dans les données probantes, sur la base de facteurs tels que la méthodologie et le niveau de qualité des études.

Qu'avons-nous trouvé ?

Nous avons trouvé 15 études portant sur environ 16 000 personnes atteintes de SEP et s’étant étendues sur une durée d’un ou de deux ans. La plus grande étude portait sur 6421 personnes et la plus petite sur 27 personnes. Les études ont été menées dans le monde entier ; la plupart provenaient de pays à revenu élevé, six études provenaient du registre suédois de la SEP. Deux études incluses avaient été financées par des compagnies pharmaceutiques.

Principaux résultats

Le rituximab comme traitement de premier choix dans la SEP récurrente :

- entraînerait probablement une forte réduction du nombre de personnes ayant des poussées en comparaison avec l'interféron bêta ou avec l'acétate de glatiramère (données probantes provenant d'une étude portant sur 335 personnes) ;

- pourrait réduire le nombre de personnes ayant des rechutes par rapport au diméthylfumarate et au natalizumab, mais les données probantes sont incertaines (données provenant d'une seule étude).

Il n'y avait pas d'informations utilisables concernant l'aggravation du handicap, le bien-être et les effets indésirables graves.

Le rituximab comme traitement de premier choix dans la SEP progressive :

- entraînerait probablement peu ou pas de différence dans le nombre de participants dont le handicap se voit s’aggraver sur une période de 24 mois par rapport à un placebo (données probantes provenant d'une étude portant sur 439 personnes) ;

- les données probantes sont très incertaines quant à l'effet du rituximab sur le bien-être et les effets indésirables graves.

Le rituximab en tant que « traitement de substitution » dans la SEP récurrente :

- entraînerait probablement une réduction importante du nombre de personnes qui ont des rechutes en comparaison avec l'interféron bêta ou avec l'acétate de glatiramère (données probantes provenant d'une étude portant sur 1383 personnes) et avec le fingolimod (données probantes provenant d'une étude portant sur 256 personnes). Les données probantes sont très incertaines en ce qui concerne la comparaison entre le rituximab et le natalizumab ;

- les données probantes sont très incertaines en ce qui concerne l'aggravation du handicap ;

- augmenterait probablement, à un léger degré, le nombre de personnes atteintes d'infections courantes par rapport à l'interféron bêta ou à l'acétate de glatiramère (données probantes provenant d'une étude portant sur 5 477 personnes) et au natalizumab (données probantes provenant de deux études portant sur 5001 personnes). Les données probantes sont incertaines pour les comparaisons du rituximab avec le fingolimod et l'ocrélizumab.

Il n'y avait pas d'informations utilisables concernant le bien-être et les effets indésirables graves.

Le rituximab en tant que traitement de substitution dans la SEP progressive

Seules trois études de petite taille ont étudié le rituximab dans la SEP progressive secondaire. Les données probantes sont incertaines quant à l'effet du rituximab sur l'aggravation du handicap, le bien-être et les effets indésirables graves.

Quelles sont les limites des données probantes ?

- Niveau de confiance limité quant à l'effet du rituximab sur l'aggravation du handicap dans toutes les formes de SEP.

- Informations limitées pour déterminer l'effet du rituximab dans le traitement des formes progressives de la SEP.

- Les études avaient une durée de suivi courte, avec une durée médiane de 24 mois.

Les données probantes sont-elles à jour ?

Cette revue systématique est à jour et valable jusqu'au 31 janvier 2021.

Conclusions des auteurs: 

Pour prévenir les poussées dans la sclérose en plaques récurrente, le rituximab, en tant que « traitement de premier choix » et en tant que « traitement de substitution », pourrait se rapprocher d’une manière favorable d’une large variété de traitements modificateurs de la maladie approuvés. Un quelconque effet protecteur du rituximab contre l'aggravation du handicap est incertain. On dispose de peu d’informations pour déterminer l'effet du rituximab dans la sclérose en plaques progressive.

Les données probantes sont incertaines quant à l'effet du rituximab sur les effets indésirables graves. Ils sont relativement rares chez les personnes atteintes de SEP, et donc difficiles à étudier, et ils n'ont pas été bien documentés dans les études. Il existe un risque accru d'infections courantes avec le rituximab, mais le risque absolu est faible.

Le rituximab est largement utilisé comme traitement non officiellement autorisé chez les personnes atteintes de sclérose en plaques ; cependant, les données probantes issues d’essais randomisés sont d’un niveau de confiance faible. En l'absence de données probantes issues d’essais randomisés, les incertitudes subsistantes quant aux effets bénéfiques et indésirables du rituximab dans le traitement de la sclérose en plaques pourraient être clarifiées par la mise à disposition de données du monde réel.

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Contexte: 

La sclérose en plaques (SEP) est la cause neurologique la plus fréquente de handicap chez les adultes jeunes. Le rituximab dans la sclérose en plaques est utilisé sans autorisation officielle dans la plupart des pays étudiés par la Fédération Internationale des Sociétés de Sclérose en Plaques, y compris dans les pays à revenu élevé où des traitements modificateurs de la maladie (TMM) ayant une autorisation officielle sont disponibles.

Objectifs: 

Évaluer les effets bénéfiques et les effets indésirables du rituximab en tant que « traitement de premier choix » et en tant que « traitement de substitution » chez les adultes atteints de SEP.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase, CINAHL et dans les registres d'essais contenant des études ayant abouti et des études en cours au 31 janvier 2021.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) et des essais contrôlés non randomisés d'interventions comparant le rituximab à un placebo ou à un autre TMM chez des adultes atteints de SEP.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons suivi la méthodologie standard de Cochrane. Nous avons utilisé l'outil de la Collaboration Cochrane afin d’évaluer le risque de biais. Nous avons évalué le niveau de confiance des données probantes en utilisant le système GRADE pour : l'aggravation du handicap, les poussées, les effets indésirables graves (EIG), la qualité de vie liée à la santé (QdVLS), les infections courantes, le cancer et la mortalité. Nous avons effectué des analyses distinctes pour le rituximab en tant que « traitement de premier choix » ou en tant que « traitement de substitution », dans la SEP récurrente ou progressive, pour la comparaison avec un placebo ou un autre TMM, et pour les ECR ou les essais contrôlés non randomisés.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 15 études (5 ECR, 10 non randomisés) avec 16 429 participants dont 13 143 étaient atteints de SEP récurrente et 3286 de SEP progressive. Les études avaient une durée allant de un à deux ans et comparaient le rituximab en tant que « traitement de premier choix » avec un placebo (1 ECR) ou d'autres TMM (1 non randomisé); elles comparaient aussi le rituximab en tant que « traitement de substitution » contre un placebo (2 ECR) ou d'autres TMM (2 ECR, 9 non randomisés). Les études ont été menées dans le monde entier ; la plupart provenaient de pays à revenu élevé, six études provenaient du registre suédois de la SEP. Deux études avaient été financées par des firmes pharmaceutiques. Nous avons identifié 14 études en cours.

Le rituximab comme « traitement de premier choix » dans la SEP récurrente

Le rituximab par rapport au placebo : aucune étude ne remplissait les critères d'éligibilité pour cette comparaison.

Le rituximab par rapport à d'autres TMM : un essai contrôlé non randomisé avait comparé le rituximab à l'interféron bêta ou à l'acétate de glatiramère, au diméthylfumarate, au natalizumab ou au fingolimod dans la forme active de SEP récurrente, au bout de 24 mois de suivi. Le rituximab entraînerait probablement une réduction importante des poussées par rapport à l'interféron bêta ou à l'acétate de glatiramère (rapport des risques instantanés [hazard ratio, HR] 0,14, intervalle de confiance (IC) à 95 % entre 0,05 et 0,39 ; 335 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Le rituximab pourrait réduire les poussées par rapport au diméthylfumarate (HR 0,29, IC à 95 % entre 0,08 et 1,00 ; 206 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et au natalizumab (HR 0,24, IC à 95 % entre 0,06 et 1,00 ; 170 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Il pourrait faire peu ou pas de différence en ce qui concerne les poussées en comparaison avec le fingolimod (HR 0,26, IC à 95 % entre 0,04 et 1,69 ; 137 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). L'étude n'a pas rapporté des décès sur les 24 mois de suivi. L'étude n'a pas évalué l'aggravation du handicap, les EIG, la QdVLS et les infections courantes.

Le rituximab comme « traitement de premier choix » dans la SEP progressive

Un ECR a comparé le rituximab au placebo dans la SEP primaire progressive au bout de 24 mois de suivi. Le rituximab entraînerait probablement peu ou pas de différence dans le nombre de participants présentant une aggravation du handicap en comparaison avec le placebo (rapport des cotes (RC) 0,71, IC à 95 % entre 0,45 et 1,11 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Le rituximab pourrait entraîner peu ou pas de différence en ce qui concerne les récurrences des rechutes (RC 0,60, IC à 95 % entre 0,18 et 1,99 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible), les EIG (RC 1,25, IC à 95 % entre 0,71 et 2,20 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible), les infections courantes (RC 1.14, IC à 95 % entre 0,75 et 1,73 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible), le cancer (RC 0,50, IC à 95 % entre 0,07 et 3,59 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et la mortalité (RC 0,25, IC à 95 % entre 0,02 et 2,77 ; 439 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). L'étude n'a pas évalué la QdVLS.

Le rituximab par rapport à d’autres TMM : aucune étude ne remplissait les critères d'éligibilité pour cette comparaison.

Le rituximab en tant que traitement de substitution dans la SEP récurrente

Un ECR a comparé le rituximab au placebo dans la SEP récurrente au bout de 12 mois de suivi. Le rituximab pourrait diminuer les récurrences des rechutes par rapport au placebo (RC 0,38, IC à 95 % entre 0,16 et 0,93 ; 104 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Les données n'ont pas permis de confirmer ou d'exclure un effet bénéfique ou néfaste du rituximab par rapport au placebo en ce qui concerne les EIG (RC 0,90, IC à 95 % entre 0,28 et 2,92 ; 104 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible), les infections courantes (RC 0,91, IC à 95 % entre 0,37 et 2.24 ; 104 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible), le cancer (RC 1,55, IC à 95 % entre 0,06 et 39,15 ; 104 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) et la mortalité (RC 1,55, IC à 95 % entre 0,06 et 39,15 ; 104 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). L'étude n'a pas évalué l’aggravation du handicap et la QdVLS.

Cinq essais contrôlés non randomisés ont comparé le rituximab à d'autres TMM dans la SEP récurrente au bout de 24 mois de suivi. Les données n'ont pas permis de confirmer ou d'exclure un effet bénéfique ou néfaste du rituximab par rapport à l'interféron bêta ou à l'acétate de glatiramère sur l'aggravation du handicap (HR 0,86, IC à 95 % entre 0,52 et 1,42 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 853 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Le rituximab entraînerait probablement une forte réduction dans les poussées par rapport à l'interféron bêta ou à l'acétate de glatiramère (HR 0,18, IC à 95 % entre 0,07 et 0,49 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 1383 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) ; et au fingolimod (HR 0,08, IC à 95 % entre 0,02 et 0,32 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 256 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Les données n'ont pas permis de confirmer ou d'exclure un effet bénéfique ou néfaste du rituximab relativement au natalizumab sur les rechutes (HR 1,0, IC à 95 % entre 0,2 et 5,0 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 153 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Il serait probable que le rituximab augmente légèrement les infections courantes en comparaison avec l'interféron bêta ou l'acétate de glatiramère (RC 1,71, IC à 95 % 1,11 à 2,62 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 5 477 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré) ; et en comparaison avec le natalizumab (RC 1,58, IC à 95 % entre 1,08 et 2,32 ; 2 essais contrôlés non randomisés, 5001 participants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Le rituximab pourrait augmenter légèrement le taux d’infections courantes par rapport au fingolimod (RC 1,26, IC à 95 % entre 0,90 et 1,77 ; 3 essais contrôlés non randomisés, 5187 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Il pourrait faire peu ou pas de différence par rapport à l'ocrélizumab (RC 0,02, IC à 95 % entre 0,00 et 0,40 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 472 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Les données n'ont pas permis de confirmer ou d'exclure un effet bénéfique ou néfaste du rituximab sur la mortalité par rapport au fingolimod (RC 5,59, IC à 95 % entre 0,22 et 139,89 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 136 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) et au natalizumab (RC 6,66, IC à 95 % entre 0,27 et 166,58 ; 1 essai contrôlé non randomisé, 153 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Les études incluses n'ont pas évalué les EIG, la QdVLS et le cancer.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Serge Medawar et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.