Il s'agit d'une version mise à jour de la Revue Cochrane publiée dans le numéro 12, 2016 de la Base de données Cochrane sur les revues systématiques.
Contexte
L'épilepsie est un trouble courant du système nerveux dans lequel des décharges électriques anormales du cerveau provoquent des crises récurrentes (convulsions physiques ou troubles de la pensée ou une combinaison de ces symptômes). Nous avons étudié deux types de crises épileptiques dans le cadre de cette étude : les crises d'épilepsie généralisées dans lesquelles les décharges électriques commencent dans une partie du cerveau et se déplacent dans tout le cerveau, et les crises d'épilepsie focales (aussi appelées crises partielles) dans lesquelles la crise est produite dans une même partie du cerveau et affecte cette même partie. Les crises d'épilepsie focales peuvent se généraliser (généralisation secondaire) et se propager d'une partie du cerveau à l'ensemble du cerveau. Jusqu'à 70 % des personnes atteintes d'épilepsie active peuvent obtenir une rémission à long terme peu de temps après le début du traitement médicamenteux et environ 70 % de ces personnes peuvent atteindre la rémission avec un seul médicament antiépileptique.
Cette revue s'applique aux personnes ayant des crises à déclenchement focal (avec ou sans généralisation secondaire) et aux personnes ayant des crises tonico-cloniques, un type particulier de crise généralisée, car les traitements recommandés pour ces types de crises sont semblables.
Objectif
Le topiramate et la carbamazépine sont des traitements couramment utilisés chez les personnes épileptiques. L'objectif de cette revue était de comparer l'efficacité de ces médicaments pour contrôler les crises récemment diagnostiquées, de déterminer s'ils sont associés à des effets secondaires qui peuvent entraîner l'arrêt du traitement et d'éclairer le choix entre ces médicaments.
Méthodes
Nous avons évalué les résultats de trois essais cliniques comparant le topiramate et la carbamazépine. Nous avons été en mesure de combiner les données de 1 151 personnes provenant de deux essais ; nous n'avons pas été en mesure d'utiliser les données de l'essai restant, qui comprenait 88 participants.
Résultats
La plupart (81 %) des personnes incluses dans les deux essais ont subi des crises focales, de sorte que les résultats de cette revue s'appliquent principalement aux personnes ayant ce type de crises. Bon nombre des 19 % de personnes restantes ont eu des crises d'épilepsie qu'il était difficile de classer dans la catégorie des crises focales ou généralisées (crises non classées). Si l'on ne considère que les personnes ayant des crises focales, les résultats ont montré que celles qui prenaient de la carbamazépine étaient d’avantage susceptibles de prendre leur traitement plus longtemps et d'obtenir une rémission 12 mois plus tôt que celles prenant du topiramate. Aucune différence n'a été observée entre les médicaments chez les personnes atteintes d'épilepsie généralisée ou non classée.
Les effets secondaires les plus fréquemment signalés par les participants au cours des essais étaient la fatigue, les picotements, les maux de tête, les problèmes gastro-intestinaux et l'anxiété ou la dépression. Ces effets secondaires ont été signalés un nombre similaire de fois par des personnes prenant du topiramate ou de la carbamazépine.
Certitude des preuves
Dans le cas des personnes ayant des crises à déclenchement focal, nous avons jugé que la certitude des données probantes était de modérée à élevée. La conception des essais (la question de savoir si les personnes et les cliniciens traitants savaient quel médicament ils prenaient) peut avoir influencé la durée pendant laquelle un participant a poursuivi son traitement. Pour le petit nombre de personnes ayant des crises d'épilepsie généralisées ou non classifiées, nous avons jugé que la certitude de la preuve était faible à modérée. La revue fait l’état des lieux des connaissances en mai 2018.
Conclusions
La carbamazépine est actuellement recommandée par les experts pour le traitement des personnes qui viennent de recevoir un diagnostic de crises d'épilepsie focale et les résultats de cette revue ne fournissent aucune preuve à l’encontre de cela. Davantage d'informations sont nécessaires pour les personnes souffrant de crises généralisées ou non classées. Tous les essais futurs comparant ces médicaments, ou des autres antiépileptiques, devraient être conçus à l'aide de méthodes de haute qualité, et les types de crises des personnes participant à ces essais devraient être classés très soigneusement pour s'assurer que les résultats soient de haute qualité.
Dans le cas des personnes qui ont des crises d'épilepsie focale, il existe des preuves de certitude modérée que la carbamazépine soit moins susceptible d'être retirée. Il existe des preuves de certitude élevée que la rémission de 12 mois soit obtenue plus tôt qu'avec le topiramate. Nous n'avons trouvé aucune différence entre les médicaments pour ce qui est des autres résultats mesurés dans l'étude et pour les personnes ayant des crises tonico-cloniques généralisées ou une épilepsie non classée ; cependant, nous encourageons la prudence dans l'interprétation des résultats, en regard notamment du petit nombre de participants ayant ces types de crises.
Les essais futurs devraient être conçus de la meilleure qualité possible et tenir compte de la mise en aveugle, du choix de la population, de la classification du type de crise, de la durée du suivi, du choix des critères de jugement et de l'analyse, de la présentation des résultats.
Il s'agit d'une version mise à jour de la Revue Cochrane originale publiée dans le numéro 12, 2016. Cette étude fait partie d'une série d'études Cochrane portant sur des comparaisons de monothérapies par paires.
L’épilepsie est un trouble neurologique fréquent lors duquel des décharges électriques anormales dans le cerveau causent des crises spontanées récurrentes. On croit qu'avec un traitement médicamenteux efficace, jusqu'à 70 % des personnes atteintes d'épilepsie active ont le potentiel de ne plus avoir de crises convulsives et d'obtenir une rémission à long terme peu après le début de la pharmacothérapie, la majorité d'entre elles pouvant obtenir une rémission avec un seul médicament antiépileptique (MAE).
Le choix correct d'un MAE de première intention pour les personnes qui viennent de recevoir un diagnostic de crises épileptiques est d'une grande importance et devrait être fondé sur les données probantes de la plus haute qualité disponibles concernant les avantages et les inconvénients potentiels des divers traitements pour une personne.
Le topiramate et la carbamazépine sont des MAE couramment utilisés. La réalisation d'une synthèse des données probantes issues d'essais existants permettra d'accroître la précision des résultats relatifs à l'efficacité et à la tolérance, et pourrait aider à éclairer un choix entre les deux médicaments.
Examiner le délai avant l'échec du traitement, la rémission et la première crise avec topiramate comparativement à la carbamazépine lorsqu'elles sont utilisées en monothérapie chez les personnes ayant des crises d'épilepsie focale (simples ou complexes et secondairement généralisées) ou des crises tonico-cloniques généralisées (avec ou sans autres types de crises généralisées).
Pour la dernière mise à jour, nous avons fait une recherche dans le Registre d'études Cochrane (CRS Web), qui comprend le Registre spécialisé du Cochrane Epilepsy Group et le Cochrane Central Register of Controlled Trials (CENTRAL) ; MEDLINE (Ovid) ; ClinicalTrials.gov ; et la plateforme internationale du registre des essais cliniques de l'OMS(ICTRP) au 22 mai 2018. Nous n'avons imposé aucune restriction de langue. Nous avons également contacté des sociétés pharmaceutiques et des investigateurs d'essais cliniques.
Essais cliniques comparatifs et randomisés (ECR) comparant la monothérapie au topiramate ou à la carbamazépine chez des enfants ou des adultes présentant des crises d'épilepsie focale ou des crises tonico-cloniques généralisées (avec ou sans autres types de crises généralisées).
Il s'agissait d'une revue sur des données individuelles de participants (DIP). Notre principal critère de jugement était le temps avant échec du traitement. Nos critères de jugement secondaires étaient le délai avant la première crise après la randomisation, le délai avant la rémission de six mois, le délai avant la rémission de 12 mois et l'incidence des effets indésirables. Nous avons utilisé des modèles de régression à risque proportionnel de Cox pour obtenir des estimations de hazard ratios (HR) spécifiques à l'essai, avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %, en utilisant la méthode de la variance inverse pour obtenir le HR global regroupé et l'IC à 95 %.
Les DIP étaient disponibles pour 1 151 des 1 239 personnes admissibles dans deux des trois études admissibles (93 % des données potentielles). Une petite proportion des personnes recrutées dans ces essais ont eu des crises non classées ; aux fins de l'analyse, ces personnes sont regroupées avec celles qui ont subi des crises généralisées. En ce qui concerne les critères de jugement relatifs à la rémission, un HR < 1 indiquait un avantage pour la carbamazépine, et pour les résultats de la première crise et de l'échec du traitement, un HR < 1 indiquait un avantage pour le topiramate.
Les principaux résultats relatifs au critère de jugement principal, soit le temps avant l'échec du traitement, donné sous forme de HR regroupés ajustés en fonction du type de crise étaient les suivants : temps avant l'échec pour toute raison liée au traitement 1,16 (IC, 95 % : 0,97 à 1,38) ; temps avant l'échec en raison des effets indésirables 1,02 (IC, 95 % : 0,82 à 1,27) ; et temps avant échec en raison du manque d'efficacité 1,46 (IC, 95 % : 1,08 à 1,98). Concernant les critères de jugement secondaires, le temps avant la première crise était de 1,11 (IC à 95 % : 0,96 à 1,29) et le temps avant la rémission de 6 mois était de 0,88 (0,76 à 1,01). Il n'y avait pas de différences statistiquement significatives entre les traitements. Un avantage statistiquement significatif de la carbamazépine a été démontré pour la rémission de 12 mois : 0.84 (IC à 95 % : 0,71 à 0,99).
Les résultats de cette revue s'appliquent principalement aux personnes ayant subi des crises d'épilepsie focale ; 81 % des personnes incluses dans l'analyse ont subi des crises de ce type au départ. Chez les personnes ayant des crises d'épilepsie focale, un avantage statistiquement significatif de la carbamazépine a été démontré sur le délai avant l'échec pour toute raison liée au traitement (IC, 1,21 %, 1,01 à 1,46), sur le délai avant échec du traitement en raison du manque d'efficacité (IC, 1,47 %, 1,07 à 2,02) et sur le délai avant une remission de 12 mois (IC, 0,82 %, 0,69 à 0,99). Il n'y avait pas de différence statistiquement significative entre le topiramate et la carbamazépine en ce qui concerne le "délai avant la première crise" et le "délai avant la rémission de six mois".
Les preuves applicables aux personnes ayant des crises tonico-cloniques généralisées (9 % des participants ayant contribué à l'analyse) et des crises non classées (10 % des participants ayant contribué à l'analyse) étaient très limitées ; aucune différence statistiquement significative n'a été observée, mais les IC étaient larges ; nous ne pouvons donc exclure un avantage pour un traitement ou une différence entre les traitements.
Les effets indésirables les plus souvent signalés avec les deux médicaments étaient la somnolence ou la fatigue, les paresthésies, les maux de tête, les troubles gastro-intestinaux et l'anxiété ou la dépression. Le taux d’événements indésirables était semblable pour les deux médicaments.
Nous avons jugé que la qualité méthodologique des essais inclus était généralement bonne ; cependant, il y a des preuves que le le taux d’échec du traitement puisse être influencé par la construction en ouvert du plus grands des deux essais inclus. Par conséquent, nous avons jugé que la certitude de la preuve de l'échec du traitement était modérée chez les personnes ayant des crises à déclenchement focal et faible chez les personnes ayant des crises à déclenchement généralisé. Pour ce qui est des résultats liés à l'efficacité (première crise, rémission), nous avons jugé que la certitude des données probantes tirées de cet examen était élevée chez les personnes ayant subi des crises à déclenchement focal et modérée chez celles ayant subi des crises généralisées ou non classées.
Post-édition effectuée par Sofyan Jankowski et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr