L’amygdalectomie par rapport à la tonsillotomie dans les troubles respiratoires obstructifs du sommeil chez les enfants

Problématique de la revue

Cette revue compare les bénéfices et les risques de la chirurgie d'ablation complète des amygdales (amygdalectomie) à ceux de la chirurgie d’ablation partielle des amygdales (tonsillotomie) chez les enfants souffrant de troubles du sommeil dus à des problèmes respiratoires causés par l'obstruction des voies aériennes supérieures (appelés troubles respiratoires obstructifs du sommeil). Nous avons inclus toutes les études dans lesquelles des enfants ont reçu soit une amygdalectomie soit une tonsillotomie, publiées jusqu'en juillet 2019.

Contexte

Les troubles respiratoires obstructifs du sommeil peuvent survenir aussi bien chez les enfants que chez les adultes. Sa gravité va du simple ronflement au syndrome d'apnée obstructive du sommeil (SAOS), où des épisodes de blocage complet des voies aériennes supérieures et de difficultés respiratoires peuvent faire chuter le taux d'oxygène dans le sang, ce qui réveille l'enfant. L'hypertrophie des amygdales et des végétations adénoïdes est considérée comme la cause la plus fréquente chez les enfants. A ce titre, l'amygdalectomie avec ou sans ablation des végétations adénoïdes (adénoïdectomie) est considérée comme une première option thérapeutique valable pour la plupart des enfants. Au cours de la dernière décennie, grâce à la disponibilité de nouvelles technologies et de nouveaux dispositifs chirurgicaux, la tonsillotomie est devenue plus populaire. Il est estimé que les enfants se remettent plus rapidement de cette opération et développeraient moins de problèmes qu'après une amygdalectomie.

Caractéristiques des études

Nous avons inclus 22 études, avec un total de 1984 enfants âgés de 2 à 16 ans présentant des symptômes de troubles respiratoires obstructifs du sommeil. Dans trois études, une étude du sommeil a également été réalisée dans le cadre du diagnostic. Les enfants ont reçu soit une amygdalectomie soit une tonsillotomie, avec ou sans ablation des végétations adénoïdes, et ont été suivis après l'opération pendant une période allant de six jours à six ans. Dix-neuf de ces études ont mesuré certaines des données que nous cherchions à recueillir et à analyser. Cependant, nous n'avons pu combiner que les résultats d'un nombre limité d'études, car chaque étude a mesuré des critères de jugement différents et a utilisé pour ce faire des instruments de mesure différents. Il a également été difficile d'accéder aux données brutes de nombreuses études.

Principaux résultats

Les enfants souffrant de troubles respiratoires obstructifs du sommeil qui sont sélectionnés pour une opération des amygdales et qui reçoivent une tonsillotomie semblent se remettre plus rapidement de l'opération que les enfants qui reçoivent une amygdalectomie, notamment en termes de retour à leur activité normale (quatre jours plus tôt). Les enfants recevant une tonsillotomie pourraient présenter un risque légèrement plus faible d'avoir en post opératoire des complications nécessitant un traitement médicamenteux ou une autre opération que ceux qui ont subi une amygdalectomie (2,6 % contre 4,9 %). Toute différence potentielle en termes de perte de sang pendant l'opération (14 ml) et de scores de douleur 24 heures après l'opération (1,09 point sur une échelle de 10 points) en faveur de la tonsillotomie n'a pas été considérée comme perceptible.

Très peu d'études ont mesuré les effets des deux opérations sur les signes et symptômes des troubles respiratoires obstructifs du sommeil proprement dits, sur la qualité de vie de l'enfant, sur la récidive des troubles respiratoires obstructifs du sommeil ou sur la nécessité d'une ré-opération. Ceux qui l'ont fait n'ont pas trouvé des données probantes indiquant une différence entre les enfants qui ont subi une amygdalectomie ou une tonsillotomie, mais ces résultats doivent être interprétés avec une grande prudence car les données probantes tirées de ces études étaient pour la plupart d’un niveau de confiance très faible.

Niveau de confiance des données probantes

La grande majorité des études incluses dans cette revue présentaient un risque de biais allant d’incertain à élevé et les données probantes de la plupart des critères de jugement étaient de qualité faible à très faible, ce qui signifie que les résultats sont très incertains. Cela signifie que nous avons besoin de plus d'informations provenant d'études bien conçues sur les résultats à long terme de l'amygdalectomie et de la tonsillotomie pour aider les parents et les chirurgiens ORL à choisir le type d'opération des amygdales le mieux adapté aux enfants souffrant de troubles respiratoires obstructifs du sommeil qui doivent être opérés.

Conclusions des auteurs: 

Pour les enfants atteints de troubles respiratoires obstructifs du sommeil (TROS) et sélectionnés pour une opération des amygdales, la tonsillotomie entraîne probablement un retour plus rapide à une activité normale (quatre jours) et une légère réduction des complications postopératoires nécessitant une intervention médicale dans la première semaine suivant l'opération.

Ceci doit être pris en considération par rapport à l'efficacité clinique d'une opération par rapport à l'autre. Toutefois, il n'est pas possible de le déterminer dans le cadre de cette étude, car les données sur les effets à long terme des deux opérations sur les symptômes du TROS, la qualité de vie, la récidive du TROS et la nécessité de réopérer sont limitées et les données probantes sont de très faible qualité, ce qui entraîne un niveau élevé d'incertitude quant aux résultats.

Des données plus robustes provenant d'études de cohorte de haute qualité, qui pourraient être plus appropriées pour détecter les différences dans des événements moins courants au long terme, sont nécessaires pour orienter la technique de chirurgie des amygdales la plus appropriée pour les enfants ayant un TROS nécessitant une intervention chirurgicale.

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Contexte: 

Les troubles respiratoires obstructifs du sommeil (TROS) sont des situations qui englobent les problèmes respiratoires pendant le sommeil dus à l'obstruction des voies aériennes supérieures. Chez les enfants, il est estimé que l'hypertrophie des amygdales et/ou des végétations adénoïdes est la cause la plus fréquente. C'est pourquoi l'(adéno)amygdalectomie a longtemps été le traitement de choix. L'augmentation de l'ablation partielle des amygdales au cours de la dernière décennie est due à l'hypothèse selon laquelle la tonsillotomie est associée à une morbidité postopératoire plus faible et à moins de complications.

Objectifs: 

Évaluer si l'ablation partielle des amygdales (tonsillotomie intra-capsulaire) est aussi efficace que l'ablation totale des amygdales (amygdalectomie extra-capsulaire) pour soulager les signes et les symptômes des TROS chez les enfants, et si elle entraîne une morbidité postopératoire plus faible et moins de complications.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre du groupe Cochrane sur l’otorhinolaryngologie, le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, EMBASE, CINAHL, Web of Science, ClinicalTrials.gov, ICTRP et d'autres sources pour les essais publiés et non publiés. La dernière date de recherche était le 22 juillet 2019.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) comparant l'efficacité de l'(adéno)amygdalectomie à celle de l'(adéno)tonsillotomie chez les enfants de 2 à 16 ans atteints de TROS.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les méthodes Cochrane habituelles et évalué le niveau de confiance des données probantes pour nos critères de jugement prédéfinis en utilisant GRADE. Nos principaux critères de jugement étaient la qualité de vie liée à la maladie, la perte de sang péri-opératoire et la proportion d'enfants nécessitant une intervention médicale postopératoire (avec ou sans hospitalisation). Les critères de jugement secondaires comprenaient la douleur postopératoire, le retour à l'activité normale, la récidive des symptômes du TROS suite à la repousse des amygdales et les taux de ré-opération.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 22 études (1984 enfants), avec présentant un risque de biais majoritairement incertain ou élevé Trois études ont utilisé la polysomnographie dans le cadre de leurs critères d'inclusion. La durée du suivi variait de six jours à six ans. Bien que 19 études aient rapporté certains de nos critères de jugement, nous n'avons pu regrouper les résultats que de quelques-unes d'entre elles en raison à la fois de la variété des critères de jugement, des instruments de mesure utilisés, et de l'absence de données combinables.

Qualité de vie spécifique à la maladie

Quatre études (540 enfants ; 484 (90 %) analysés) ont rapporté ce critère de jugement; les données n'ont pas pu être mises en commun en raison des différents instruments utilisés pour mesurer les critères de jugement. Il est très incertain qu'il y ait une différence de qualité de vie spécifique à la maladie entre les deux procédures chirurgicales à court terme (0 à 6 mois ; 3 études, 410 enfants), moyen terme (7 à 13 mois ; 2 études, 117 enfants) et long terme (13 à 24 mois ; 1 étude, 67 enfants) (données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Perte de sang péri-opératoire

Nous ne savons pas si la tonsillotomie réduit la perte de sang péri-opératoire dans une mesure cliniquement significative (différence moyenne (DM) de 14,06 ml, IC à 95 % de 1,91 à 26,21 ml ; 8 études, 610 enfants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Dans l'analyse de sensibilité (limitée à trois études avec un faible risque de biais), il n'y avait pas de données probantes indiquant une différence entre les groupes.

Complications postopératoires nécessitant une intervention médicale (avec ou sans hospitalisation)

Le risque de complications postopératoires au cours de la première semaine suivant l'opération était probablement plus faible chez les enfants ayant subi une tonsillotomie (4,9 % contre 2,6 %, risque relatif (RR) de 1,75, IC à 95 % de 1,06 à 2,91 ; 16 études, 1416 enfants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Douleur post-opératoire

Onze études (1017 enfants) ont rapporté ce critère de jugement. La douleur a été mesurée à l'aide de différentes échelles et notée soit par les enfants, les parents, les cliniciens ou le personnel de l'étude.

En ce qui concerne la douleur postopératoire, il y avait peu ou pas de différence entre l'amygdalectomie et la tonsillotomie à 24 heures (échelle de 10 points) (DM 1,09, IC à 95 % 0,88 à 1,29 ; 4 études, 368 enfants) ; à deux ou trois jours (DM 0,93, IC à 95 % -0,14 à 2,00 ; 3 études, 301 enfants) ; ou à quatre ou sept jours (DM 1,07, IC à 95 % -0,40 à 2,53 ; 4 études, 370 enfants) (données probantes d’un niveau de confiance très faible pour toutes les comparaisons). Dans l'analyse de sensibilité (limitée aux études présentant un faible risque de biais), nous n'avons pas trouvé de données probantes indiquant une différence dans les scores moyens de douleur entre les groupes.

Retour à une activité normale

La tonsillotomie entraîne probablement un retour plus rapide à une activité normale. Les enfants qui ont reçu une tonsillotomie ont pu reprendre une activité normale quatre jours plus tôt (DM 3,84 jours, IC à 95 % 0,23 à 7,44 ; 3 études, 248 enfants ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

Récidive du TROS et taux de ré-opération

Nous ne savons pas s'il existe une différence entre les groupes à court terme (RR 0,26, IC à 95 % 0,03 à 2,22 ; 3 études, 186 enfants), à moyen terme (RR 0,35, IC à 95 % 0,04 à 3,23 ; 4 études, 206 enfants) ou à long terme (RR 0,21, IC à 95 % 0,01 à 4,13 ; 1 étude, 65 enfants) (données probantes d’un niveau de confiance très faible pour toutes les comparaisons).

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Robin Guelimi et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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