Les inhibiteurs calciques pour les personnes souffrant de maladies rénales chroniques nécessitant une dialyse

Quelle est la problématique ?
Les personnes souffrant d'une maladie rénale chronique (MRC) développent souvent une hypertension artérielle (HTA), et celles qui souffrent d'une MRC avancée ont besoin d'une dialyse lorsque leurs reins ne fonctionnent plus. Le traitement de l'HTA est souvent difficile pour les personnes atteintes d'une maladie rénale chronique avancée traité par dialyse. Plusieurs médicaments sont utilisés pour traiter l'hypertension artérielle, notamment les inhibiteurs calciques (ICa).

Nous voulions savoir si l'utilisation des ICa chez les personnes atteintes d'un MRC, sous hémodialyse ou dialyse péritonéale, présentait des bénéfices supplémentaires par rapport aux autres médicaments utilisés pour traiter l'hypertension ou au placebo (pas de traitement actif) en termes de réduction de la pression artérielle, de risque de décès et d'effets indésirables.

Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché dans la littérature, jusqu'en avril 2020, toutes les études qui évaluaient l'utilisation des ICa chez les adultes et les enfants souffrant d'HTA et de MRC soumis à une hémodialyse ou à une dialyse péritonéale. Chaque étude a été évaluée pour détecter d'éventuels biais dans plusieurs domaines prédéterminés. Nous avons regroupés les résultats d'études qui rendaient compte des mêmes critères de jugement pour des comparaisons similaires et nous avons rapporté les effets globaux. Nous avons appliqué un système appelé « GRADE » pour évaluer la qualité des données probantes que nous avons trouvées.

Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons inclus 13 études randomisant 1459 adultes sous hémodialyse. Nous n'avons trouvé aucune étude ni sur les enfants ni sur les patients traités par dialyse péritonéale. Les patients ont été randomisés pour recevoir des ICa, d'autres médicaments anti-hypertenseur, ou un placebo ou des soins standard. Certaines études étaient de courte durée (quelques mois), et les complications cardiaques n'ont pas été évaluées. L'avantage des ICa par rapport à d'autres médicaments n'est pas clair, peut-être en raison du petit nombre de participants et du nombre total d'événements. Par rapport au placebo ou à l'absence de traitement, les ICa pourraient diminuer la pression artérielle avant l'hémodialyse, bien que la qualité des données probantes soit faible.

Conclusions
Il n'a pas été possible de déterminer les bénéfices des inhibiteurs calciques (ICa) par rapport à d'autres médicaments pour traiter l'hypertension, tandis que les ICa pourraient faire baisser la pression artérielle par rapport au placebo ou aux soins habituels.

Conclusions des auteurs: 

Les avantages des inhibiteurs calciques (ICa) par rapport aux autres antihypertenseurs, sur les niveaux de pression artérielle avant dialyse et sur l'hypotension perdialytique chez les personnes atteintes des maladies rénales chroniques nécessitant une hémodialyse, étaient incertains. Les effets des ICa sur d'autres effets secondaires, et sur le décès d’origine cardiovasculaire, restent également incertains. Les inhibiteurs calciques du groupe des dihydropyridines pourraient diminuer la pression artérielle systolique et diastolique avant dialyse par rapport au placebo ou à l'absence de traitement. Aucune étude n'a été identifiée chez les enfants ou sur la dialyse péritonéale. Les études disponibles n'ont pas été conçues pour mesurer les effets sur les coûts. Les limites de ces études sont qu'elles ont recruté très peu de participants, qu'elles ont eu peu d'événements, qu'elles ont eu des périodes de suivi très courtes, que certains critères de jugement n'ont pas été rapportés et que le rapport de résultats tels que les changements de pression artérielle n'a pas été fait de manière uniforme d'une étude à l'autre.

Des ECR bien conçus, menées chez des adultes et des enfants atteints des maladies rénales chroniques nécessitant une hémodialyse ou une dialyse péritonéale, évaluant à la fois les ICa des groupes dihydropyridine et non-dihydropyridine par rapport à d'autres antihypertenseurs sont nécessaires. Les futures recherches devraient être axées sur des critères plus pertinents pour les patients (y compris le décès et les maladies cardiovasculaires), les variations de la pression artérielle, le risque d'effets secondaires et les coûts des soins de santé afin d'aider à la prise de décision dans la pratique clinique.

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Contexte: 

Les inhibiteurs calciques (ICa) sont utilisés pour traiter l'hypertension, qui est très répandue chez les personnes souffrant de maladies rénales chroniques (MRC). Le traitement de l'hypertension est particulièrement difficile pour les personnes dialysées.

Objectifs: 

Évaluer les bénéfices et les risques des inhibiteurs calciques chez les patients atteints d'une maladie rénale chronique nécessitant une dialyse.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué une recherche dans le registre d’études du groupe Cochrane sur les reins et les greffes jusqu'au 27 avril 2020, en communiquant avec le spécialiste de l'information, et en utilisant des termes de recherche pertinents pour cette revue. Les études figurant dans le registre spécialisé sont identifiées par des recherches dans CENTRAL, MEDLINE et EMBASE, les actes de conférences, le portail de recherche du système d’enregistrement international des essais cliniques de l’OMS (ICTRP) et ClinicalTrials.gov.

Critères de sélection: 

Tout essai contrôlé randomisé (ECR) et quasi-ECR comparant tout type d’ICa avec d'autres ICa, différentes doses du même ICa, d'autres antihypertenseurs, de contrôle ou de placebo ont été inclus. La durée minimale des études était de 12 semaines.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs ont évalué la qualité méthodologique des études et extrait les données de manière indépendante. Des analyses statistiques ont été effectuées à l'aide d'un modèle à effets aléatoires et les résultats ont été exprimés sous forme de risques relatifs (RR), de différence des risques (DR) ou de différence moyenne (DM) avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %.

Résultats principaux: 

Cette revue a inclus 13 études (24 rapports) randomisant 1459 participants traités par hémodialyse au long cours. Neuf études ont été incluses dans la méta-analyse (622 participants). Aucune étude n'a été réalisée chez les enfants ou chez les personnes traitées par dialyse péritonéale. Dans l'ensemble, le risque de biais a été évalué comme incertain à élevé dans la plupart des domaines.

La génération de séquences aléatoires et le secret d’attribution étaient à faible risque de biais dans huit et une études, respectivement. Deux études ont rapporté l’utilisation de méthodes à faible risque de mise en aveugle des participants et des investigateurs, et l'évaluation des critères de jugement a été effectuée en aveugle dans 10 études. Trois études présentaient un faible risque de biais d'attrition, huit études présentaient un faible risque de biais de notification sélective et cinq études présentaient un faible risque d'autres sources potentielles de biais. Dans l'ensemble, le niveau de confiance des données probantes était faible à très faible pour tous les critères de jugement. Aucun événement n'a été rapporté concernant les décès d'origine cardiovasculaire dans aucune des comparaisons. Les autres effets secondaires étaient rarement signalés et les études n'étaient pas conçues pour déterminer les coûts.

Cinq études (451 adultes randomisés) ont comparé les ICa à la dihydropyridine à un placebo ou à l'absence de traitement. Les ICa du groupe des dihydropyridines pourraient diminuer la pression artérielle systolique avant dialyse (1 étude, 39 participants : DM -27,00 mmHg, IC à 95% -43,33 à -10,67 ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et le niveau de pression artérielle diastolique (2 études, 76 participants ; DM -13,56 mmHg, IC à 95 % -19,65 à -7,48 ; I2 = 0 %, données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport au placebo ou à l'absence de traitement. Les ICa du groupe des dihydropyridines pourraient ne faire que peu ou pas de différence dans la survenue de l'hypotension perdialytique (2 études, 287 participants ; RR 0,54, IC à 95 % 0,25 à 1,15 ; I2 = 0%, données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport au placebo ou à l'absence de traitement. Les autres effets secondaires n'ont pas été signalés.

Huit études (1037 adultes randomisés) ont comparé les ICa du groupe des dihydropyridiniques à d'autres antihypertenseurs. Les ICa du groupe des dihydropyridines pourraient ne faire que peu ou pas de différence sur la pression artérielle systolique prédialyse (4 études, 180 participants : DM 2,44 mmHg, IC à 95% -3,74 à 8,62 ; I2 = 0 %, données probantes d’un niveau de confiance faible) et la pression artérielle diastolique (4 études, 180 participants : DM 1,49 mmHg, IC à 95% -2,23 à 5,21 ; I2 = 0%, données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport à d'autres antihypertenseurs. Il n'y avait pas de données probantes indiquant une différence dans l'occurrence de l'hypotension perdialytique (1 étude, 92 participants : RR 2,88 IC à 95% 0,12 à 68,79 ; données probantes d’un niveau de confiance faible très faible) entre les ICa du groupe des dihydropyridines et les autres antihypertenseurs. Les autres effets secondaires n'ont pas été signalés.

Les ICa du groupe des dihydropyridines pourraient ne faire que peu ou pas d’effets sur la pression artérielle systolique prédialytique (1 étude, 40 participants : DM -4 mmHg, IC à 95% -11,99 à 3,99 ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et la pression artérielle diastolique (1 étude, 40 participants : DM -3,00 mmHg, IC à 95 % -7,06 à 1,06 ; données probantes d’un niveau de confiance faible) par rapport aux ICa du groupe non-dihydropyridines. Aucune différence n'a été constatée sur les autres effets secondaires (1 étude, 40 participants : RR 0,13, IC à 95 % 0,01 à 2,36 ; données probantes d’un niveau de confiance faible) entre les ICa du groupe des dihydropyridines et les ICa du groupes non-dihydropyridines. Les hypotensions perdialytiques n'ont pas été rapportées.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Nicolas Cornière et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.