Les interventions de soutien pour améliorer l'apport alimentaire chez les groupes vulnérables sur le plan nutritionnel

Question de recherche

Est-ce que les interventions de soutien pour améliorer l'apport alimentaire chez les populations vulnérables (individus malnutris ou à risque de malnutrition) sont efficaces ?

Contexte

Servir les repas dans une salle à manger, ou l'assistance aux repas pour les personnes ayant des difficultés à manger, ou encore d'autres méthodes similaires sont souvent recommandées pour aider les personnes âgées particulièrement malades qui ont perdu du poids ou qui sont à risque d'en perdre (groupes à risque nutritionnel). De telles interventions de soutien sont implantées dans les soins de santé de nombreux pays, mais leurs effets ne sont pas bien étudiés.

Caractéristiques de l'étude

Nous avons inclus 41 études contrôlées randomisées (études cliniques où les gens sont assignés de façon aléatoire à un groupe parmi deux ou plusieurs groupes de traitement) avec un total de 10 681 participants dans notre revue. Il y avait cinq interventions différentes que nous appelons « interventions de soutien » : changements dans l'organisation des soins nutritionnels (13 études, 3456 participants), changements dans l'environnement alimentaire (5 études, 351 participants), modification du plan alimentaire (12 études, 649 patients), supplémentation des repas (10 études, 6022 participants) et systèmes de livraison de repas à domicile (1 étude, 203 participants). La surveillance des participants au fil du temps (suivi) allait de la « durée du séjour à l'hôpital » à 12 mois. Les groupes de comparaison recevaient les soins habituels. Plus de la moitié de tous les participants ont pris part à des études évaluant la supplémentation des repas (par exemple l'ajout d'un supplément nutritionnel oral protéino-énergétique en plus de la diète habituelle).

Résultats principaux

Il est possible que les interventions de soutien pour améliorer l'apport alimentaire chez les groupes à risque nutritionnel réduisent les décès, toutes causes confondues (environ 23 cas de décès en moins pour 1000 participants en faveur des interventions de soutien). Cependant, cela doit être confirmé par un plus grand nombre de données probantes issues d'études contrôlées randomisées de haute qualité. Le nombre de participants ayant éprouvé des complications médicales ne différait pas significativement entre les interventions de soutien et les groupes de comparaison. La même chose a été observée pour la qualité de vie liée à la santé (qui est la condition physique, mentale, sociale et émotionnelle liée à la santé), la satisfaction du patient, l'apport nutritionnel ou énergétique et le nombre de jours passés à l'hôpital. Les coûts économiques n'ont pas été bien étudiés.

Seulement trois études ont rapporté des effets secondaires, décrivant l'intolérance pour le supplément nutritionnel (diarrhée ou vomissements chez 5 des 34 participants) et l'arrêt des suppléments nutritionnels oraux en raison de refus ou d'aversion pour le goût (567 des 2017 participants).

Après l'analyse de 15 études portant sur 1945 participants, nous avons trouvé un effet bénéfique des interventions de soutien sur le poids, par rapport aux groupes de comparaison : en moyenne, les personnes dans les groupes d'intervention ont augmenté leur poids de 0,6 kg de plus que les personnes dans les groupes de comparaison.

Ces données sont à jour en date du mois de septembre 2016.

Qualité des données probantes

La qualité des données probantes était modérée à très faible, principalement en raison d'un trop petit nombre d'études et de participants pour nos critères de jugement, ou de risques de biais rendant les résultats incertains. Toutefois, si des études contrôlées randomisées incluant un grand nombre de participants, étaient conduites avec un faible risque de biais quant aux critères de jugement importants pour les patients, cette revue pourrait fournir rapidement des recommandations pour de meilleurs soins de santé.

Conclusions des auteurs: 

Il existe des données probantes de qualité très faible à modérée suggérant que les interventions de soutien pour améliorer les soins nutritionnels entraînent une prise de poids minime. La majorité des données probantes en faveur des interventions de soutien pour la diminution du risque de mortalité toutes causes confondues proviennent d'études ayant eu lieu en milieu hospitalier et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour confirmer cet effet. Il existe des données probantes de très faible qualité concernant les effets indésirables ; par conséquent, alors que certaines de ces interventions sont recommandées à un niveau national, les cliniciens devraient reconnaître le manque de preuves claires pour les soutenir. Cette revue souligne l'importance d'évaluer les résultats importants pour le patient dans les recherches futures.

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Contexte: 

Les interventions de soutien telles que le service des repas en salle à manger ou le recours à des assistants pour nourrir les patients sont fréquemment recommandées pour la prise en charge des groupes à risque nutritionnel. De telles interventions sont incluses dans de nombreuses politiques et lignes directives, ce qui a des conséquences sur le temps de travail et les coûts associés, bien qu'il semble y avoir une lacune au niveau des données probantes démontrant leur efficacité.

Objectifs: 

Évaluer les effets des interventions de soutien pour améliorer l'apport alimentaire chez les adultes souffrant de malnutrition ou étant à risque nutritionnel.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons identifié les publications à partir de recherches exhaustives dans la Bibliothèque Cochrane , MEDLINE, Embase, AMED, British Nursing Index, CINAHL, SCOPUS, ISI Web of Science. Nous avons consulté les références bibliographiques des études incluses et les revues systématiques associées, et avons effectué des recherches manuelles dans les résumés de congrès pertinents. La dernière recherche dans toutes les bases de données a été faite en date du 31 mars 2013. Des recherches supplémentaires ont été effectuées dans CENTRAL, MEDLINE, ClinicalTrials.gov et WHO ICTRP jusqu'en septembre 2016. La dernière recherche dans ces bases de données a été faite le 14 septembre 2016.

Critères de sélection: 

Les études contrôlées randomisées portant sur des interventions de soutien administrées dans le but d'améliorer l'apport alimentaire chez les adultes vulnérables sur le plan nutritionnel, en comparaison avec les soins habituels.

Recueil et analyse des données: 

Trois auteurs de la revue, en plus de l'éditeur pour la dernière recherche, ont sélectionné les études à partir des titres et des résumés et ont évalué de manière indépendante l'admissibilité des études sélectionnées. Deux auteurs de la revue ont indépendamment extrait les données et évalué le risque de biais, tout en évaluant la qualité globale des données probantes en utilisant la méthode GRADE, puis sont arrivés à une entente en entrant les données dans la revue. La probabilité de l'hétérogénéité clinique entre les études a été jugée élevée car les études ont été conduites avec des populations et dans des contextes cliniques très différents, et malgré le regroupement de certaines interventions similaires, elles portaient sur des interventions qui variaient considérablement. Nous avons donc seulement été en mesure de réaliser des méta-analyses pour la mortalité toutes causes confondues, l'hospitalisation et l'état nutritionnel (changement de poids).

Résultats principaux: 

Quarante et une études (10 681 participants) respectaient les critères d'inclusion. Les études ont été regroupées en fonction des interventions similaires (changements dans l'organisation des soins nutritionnels (N = 13 ; 3456 participants), changements dans l'environnement alimentaire (N = 5 ; 351 participants), modification du plan alimentaire (N = 12 ; 649 participants), supplémentation des repas (N = 10 ; 6022 participants) et systèmes de livraison de repas à domicile (N = 1 ; 203 participants). La durée du suivi allait de la « durée de séjour à l'hôpital » à 12 mois.

Les données probantes étaient de qualité très faible à modérée, avec la majorité des études présentant un risque de biais incertain dans plusieurs domaines de risque. Le risque relatif (RR) pour la mortalité toutes causes confondues était de 0,78 (intervalle de confiance à 95 % (IC) de 0,66 à 0,92) ; P = 0,004 ; 12 études ; 6683 participants ; données probantes de qualité moyenne. Cela se traduit par 26 (IC à 95 % de 9 à 41) cas de décès en moins pour 1000 participants en faveur des interventions de soutien. Le RR pour le nombre de participants présentant n'importe quelle complication médicale variait de 1,42 en faveur du groupe de comparaison par rapport à 0,59 en faveur des interventions de soutien (données probantes de très faible qualité). Seulement cinq études (4451 participants) ont examiné la qualité de vie liée à la santé et n'ont montré aucune différence substantielle entre les groupes d'intervention et de comparaison. L'information sur la satisfaction des patients n'était pas fiable. Par rapport aux groupes contrôle, les interventions de soutien ont montré une différence moyenne (DM) de -0,5 jours pour l'hospitalisation (IC à 95 % -2,6 à 1,6) ; P = 0,65 ; 5 études ; 667 participants ; données probantes de qualité très médiocre. Seulement 3 des 41 études incluses (4108 participants ; données probantes de qualité très médiocre) ont rapporté les effets indésirables, décrivant l'intolérance au supplément (diarrhée, vomissements ; 5/34 participants) et l'arrêt de la supplémentation orale nutritionnelle en raison de refus ou d'aversion pour le goût (567/2017 participants). Une méta-analyse sur les 17 études ayant des données adéquates sur le changement de poids a révélé une amélioration globale du poids en faveur des interventions de soutien par rapport aux groupes contrôle : DM de 0,6 kg (IC à 95 % de 0,21 à 1,02) ; 2024 participants ; données probantes de qualité moyenne. Un total de 27 études ont investigué l'apport nutritionnel et n'ont trouvé aucune différence marquée de l'apport énergétique entre les groupes d'intervention et de contrôle. Seulement trois études (1152 participants) ont rapporté des données sur les coûts économiques, mais n'ont pas utilisé de méthodes d'économie de la santé acceptables (données probantes de très faible qualité).

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Geneviève Painchaud Guérard, Dt. P., Québec, Canada, et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.