Que voulions-nous savoir ?
Dans cette revue Cochrane, nous voulions savoir dans quelle mesure un médicament appelé la cérébrolysine fonctionne pour traiter un accident vasculaire cérébral.
Qu'est-ce qu'un accident vasculaire cérébral ?
Un accident vasculaire cérébral est une faiblesse soudaine qui touche généralement un côté du corps. Il se produit lorsque le flux sanguin est interrompu vers une partie du cerveau, ce qui empêche l'apport d'oxygène et de nutriments aux cellules cérébrales. Si l'apport de sang au cerveau est interrompu, les cellules cérébrales commencent à mourir. Cela peut entraîner des lésions cérébrales, des handicaps, voire la mort.
Les accidents vasculaires cérébraux ischémiques sont les plus fréquents. Un accident vasculaire cérébral ischémique se produit lorsque le flux sanguin est bloqué par un caillot de sang ou des corps gras dans une artère.
Pourquoi cette revue est-elle importante ?
Les accidents vasculaires cérébraux sont une urgence médicale et un traitement d’urgence est essentiel. Les accidents ischémiques cérébraux sont généralement traités avec une combinaison de médicaments pour prévenir la formation de caillots sanguins ou les dissoudre, réduire la pression artérielle et abaisser le taux de cholestérol.
La cérébrolysine est un mélange de protéines purifiées provenant du cerveau de porcs. Certaines des protéines de la cérébrolysine se trouvent naturellement dans le cerveau humain et peuvent aider à protéger et à réparer les cellules cérébrales. La cérébrolysine est souvent utilisée dans certains pays pour traiter les accidents vasculaires cérébraux.
Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études portant sur l'utilisation de la cérébrolysine pour traiter les AVC ischémiques aigus. Nous avons recherché des études contrôlées randomisées, dans lesquelles le traitement que les personnes reçoivent est décidé au hasard, parce que ces études donnent les données probantes les plus fiables sur les traitements.
Date des recherches : Nous avons inclus les données probantes publiées jusqu'en octobre 2019.
Ce que nous avons trouvé
Nous avons trouvé sept études portant sur 1 601 personnes qui avaient eu un accident ischémique aigu. Les études ont examiné l'effet de l'administration de la cérébrolysine en même temps que des médicaments pour prévenir la formation de caillots sanguins ou les dissoudre (traitement standard) dans les 48 premières heures après une attaque. Les études ont comparé ce traitement au traitement standard seul ou au traitement standard combiné à un traitement factice (placebo).
Les études ont été menées dans des hôpitaux en Autriche, en Croatie, en République tchèque, en Hongrie, en Russie, en Slovaquie, en Slovénie, en Chine, à Hong Kong, en Iran, en Birmanie et en Corée du Sud. Elles ont duré de 28 à 90 jours.
Résultats de notre revue
L'ajout de la cérébrolysine au traitement standard ne fait probablement que peu ou pas de différence concernant le risque de mourir, de quelque cause que ce soit, après un accident vasculaire cérébral (6 études ; 1 517 personnes).
L'ajout de la cérébrolysine au traitement standard n'a probablement que peu ou pas de différence concernant :
- le nombre total de personnes victimes d’effets indésirables graves (effets mettant leur vie en danger et pouvant entraîner la mort, un handicap ou un séjour prolongé à l'hôpital) (4 études ; 1 435 personnes) ;
- le nombre d'effets indésirables graves ayant causé la mort (3 études ; 1 335 personnes).
Toutefois, les personnes ayant reçu de la cérébrolysine en plus du traitement standard ont été plus nombreuses à présenter des effets indésirables graves qui ne les ont pas tuées que celles ayant reçu le traitement standard seul ou avec placebo (4 études ; 1 435 personnes).
La cérébrolysine pourrait ne faire que peu ou pas de différence par rapport au nombre total de personnes ayant eu des effets indésirables moins graves (4 études ; 1 435 personnes).
Nous ne savons pas si l'ajout de la cérébrolysine au traitement standard a fait une différence concernant le nombre de personnes qui ont abandonné les études (6 études ; 1 517 personnes).
Nous n'avons pas trouvé suffisamment de données probantes concernant l'effet de la cérébrolysine sur :
- le risque de mourir ou de nécessiter des soins continus à la fin de l'étude ;
- le risque de mourir dans les deux semaines suivant un accident vasculaire cérébral ;
- le temps nécessaire pour que les personnes puissent retourner au travail ;
- ou le bien-être des personnes (qualité de vie).
Notre confiance dans les résultats
Nous sommes modérément confiants (certains) dans les résultats de cette revue. Cependant, les données probantes proviennent d'un petit nombre d'études. Quatre études ont impliqué une société pharmaceutique qui fabrique la cérébrolysine, ce qui a pu affecter la manière dont ces études ont été conçues, réalisées et rapportées. Nos conclusions sont susceptibles de changer si les résultats d'autres études sont disponibles.
Conclusions
L'ajout de la cérébrolysine au traitement standard après un accident vasculaire cérébral ischémique :
- ne réduit probablement pas le risque de mourir ;
- n'affecte probablement pas le nombre de personnes ayant des effets indésirables graves dans l'ensemble ;
- mais augmente probablement le nombre d'effets indésirables graves et non mortels.
Des données probantes de qualité modérée indiquent que la cérébrolysine a probablement peu ou pas d'effet bénéfique sur la prévention des décès toutes causes confondues en cas d'accident ischémique cérébral aigu, ou sur le nombre total de personnes présentant des effets indésirables graves. Des données probantes de qualité modérée indiquent également une augmentation potentielle des effets indésirables graves non mortels avec l'utilisation de la cérébrolysine.
La cérébrolysine est un mélange de peptides et d'acides aminés de bas poids moléculaire issus du cerveau du porc, possédant potentiellement des propriétés neuroprotectrices. Il est largement utilisé dans le traitement des AVC ischémiques aigus en Russie, en Europe de l'Est, en Chine et dans d'autres pays asiatiques ou postsoviétiques. Il s'agit de la mise à jour d'une revue publiée pour la première fois en 2010 et mise à jour pour la dernière fois en 2017.
Évaluer les avantages et les inconvénients de la cérébrolysine pour le traitement des AVC ischémiques aigus.
En octobre 2019, nous avons effectué des recherches dans le registre d'essais du groupe Cochrane sur les accidents vasculaires cérébraux , CENTRAL, MEDLINE, Embase, Web of Science Core Collection avec le Science Citation Index, LILACS, OpenGrey et dans un certain nombre de bases de données russes. Nous avons également consulté les références bibliographies, des registres d’essais en cours et des comptes rendus de conférences.
Des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant la cérébrolysine, commencée dans les 48 heures suivant le début de l'attaque et poursuivie pendant un certain temps, à un placebo ou à l’absence de traitement chez des personnes victimes d’un AVC ischémique aigu.
De manière indépendante, deux auteurs de cette revue ont appliqué les critères d'inclusion, ont évalué la qualité des essais et leurs risques de biais, ont extrait des données et ont appliqué les critères GRADE aux données probantes.
Sept ECR (1 601 participants) ont répondu aux critères d'inclusion de la revue.
Dans cette mise à jour, nous avons réévalué le risque de biais par l'identification, l'examen et l'évaluation des protocoles d'étude et nous l'avons jugé faible, incertain ou élevé selon les cas : un risque incertain pour tous les domaines dans une étude et incertain concernant le risque de communication sélective des critères pour toutes les études ; un risque faible concernant la mise en aveugle des participants et du personnel dans quatre études et incertain dans les trois autres ; un risque de biais faible pour la mise en aveugle des évaluateurs concernant les critères de jugement dans trois études et un risque incertain dans quatre études. Nous avons jugé que le risque de biais était faible dans deux études et incertain dans les cinq autres pour la génération de la séquence de randomisation ; faible dans une étude et incertain dans six études pour l’assignation secrète ; et faible dans une étude, incertain dans une étude et élevé dans les cinq autres à cause de données incomplètes concernant les critères de jugements. Le fabricant de la cérébrolysine a soutenu quatre études multicentriques, soit en totalité, soit en fournissant de la cérébrolysine et un placebo, des codes de randomisation, des subventions de recherche ou des statisticiens. Nous avons jugé que trois études présentaient un risque élevé d'autres biais et que les quatre autres études présentaient un risque incertain d'autres biais.
Mort toutes causes confondues : nous avons extrait les données de six essais (1 517 participants). La cérébrolysine entraîne probablement peu ou pas de différence dans les décès toutes causes confondues : risque relatif (RR) de 0,90, intervalle de confiance (IC) à 95% de 0,61 à 1,32 (6 essais, 1 517 participants, données probantes de qualité modérée).
Aucun des essais inclus n'a fait état de mauvais critères de jugements fonctionnels, définis comme étant le décès ou la dépendance à la fin de la période de suivi, le décès précoce (dans les deux semaines suivant l'apparition de l'attaque) ou le temps nécessaire pour rétablir la capacité de travail et la qualité de vie.
Un seul essai a clairement indiqué la cause du décès : infarctus cérébral (quatre dans le groupe avec la cérébrolysine et deux dans le groupe placebo), insuffisance cardiaque (deux dans le groupe avec la cérébrolysine et un dans le groupe placebo), embolie pulmonaire (deux dans le groupe placebo) et pneumonie (un dans le groupe placebo).
Les effets indésirables graves (EIG) : La cérébrolysine n'entraîne probablement que peu ou pas de différence dans le nombre total de personnes victimes d'EIG (RR de 1,15 ; IC à 95 % entre 0,81 et 1,65 ; 4 ECR ; 1 435 participants ; données probantes de qualité modérée). Cela comprend les EIG mortels (RR de 0,90, IC à 95% entre 0,59 et 1,38) et une augmentation du nombre total de personnes victimes d’EIG non mortels (RR de 2,15 ; IC à 95 % entre 1,01 et 4,55 ; P = 0,047 ; 4 essais ; 1 435 participants ; données probantes de qualité modérée). Dans le sous-groupe du programme de dosage à 30 ml pendant 10 jours (dose cumulée de 300 ml), l'augmentation était plus importante : RR de 2,86 ; IC à 95 % entre 1,23 et 6,66 ; P = 0,01 (2 essais, 1 189 participants).
Nombre total de personnes présentant des effets indésirables : quatre essais ont fait état de ce critère de jugement. La cérébrolysine peut n'entraîner que peu ou pas de différence dans le nombre total de personnes présentant des effets indésirables : RR de 0,97 ; IC à 95 % entre 0,85 et 1,10 ; P = 0,90 ; 4 essais ; 1 435 participants ; données probantes de faible qualité.
Attrition pour une raison non fatale : les résultats de six essais impliquant 1 517 participants suggèrent que la cérébrolysine n'entraîne que peu ou pas de différence dans l'attrition pour une raison non fatale avec 96 des 764 participants traités à la cérébrolysine et 117 des 753 participants traités au placebo qui ont été perdus de vue pour des raisons autres que le décès (données probantes de très faible qualité).
Post-édition effectuée par Maud Bénard et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr