Le dropéridol pour l'agressivité ou l'agitation liée à une psychose

Le dropéridol est-il efficace pour la prise en charge des patients qui sont agressifs ou agités en raison d'une psychose ?

Contexte

Les personnes souffrant de psychose peuvent présenter des symptômes tels que des hallucinations (voir ou entendre des choses qui ne sont pas là) ou des délires (croire des choses qui sont étranges ou évidemment fausses). Ces symptômes sont souvent préoccupants voire effrayants et peuvent conduire les personnes souffrant de psychose à devenir très agitées ou violentes. Le dropéridol est l'un des médicaments communément utilisé pour calmer (tranquilliser) dans ces situations. L'utilisation de ce médicament était auparavant basée sur les résultats d'essais cliniques de petite taille sans conclusion définitive concernant ses effets. Des essais de plus grande taille étaient nécessaires.

Recherche

En 2015, le spécialiste de l'information du registre spécialisé du groupe Cochrane sur la schizophrénie a mis à jour les recherches précédentes de leur registre spécialisé d'études. Les auteurs de la revue ont identifié et passé au crible 21 documents.

Description des études

Six études contrôlées randomisées sont désormais incluses dans la revue. Toutes les études avaient randomisé des personnes qui ont été agressives ou agitées en raison d'une psychose pour recevoir soit du dropéridol ou un placebo (un faux médicament), de l'halopéridol, de l'olanzapine ou du midazolam. La taille des études variait de 40 à 221 participants. Toutes ont été réalisées dans un unique hôpital. Quatre des six études ont duré moins de deux heures.

Principaux résultats

Par rapport au placebo, le dropéridol était plus efficace pour tranquilliser les participants agités 30 minutes après avoir été pris. Des résultats similaires ont été observés pour la tranquillisation lorsque le dropéridol était comparé à l'halopéridol, mais cet effet était moins clair et peu marqué lorsque le dropéridol a été comparé au midazolam ou à de l'olanzapine. Le dropéridol n'a pas entraîné davantage d'effets secondaires que les autres médicaments dans les études. Les études n'ont pas étudié les coûts.

Conclusions des auteurs de la revue

Même si nous avons seulement pu inclure six études, celles-ci ont fourni des preuves de bonne qualité suggérant que le dropéridol est efficace et peut être utilisé pour maîtriser les personnes ayant des comportements très agités ou agressifs causés par une psychose.

Conclusions des auteurs: 

Auparavant, l'utilisation du dropéridol était justifiée par l'expérience plutôt que par des preuves issues d'essais randomisés bien réalisés et documentés. Cependant, cette mise à jour a trouvé des preuves de bonne qualité avec peu de risques de biais permettant de soutenir l'utilisation du dropéridol pour la psychose aiguë. En outre, nous n'avons trouvé aucune preuve suggérant que le dropéridol ne devrait pas être une option de traitement pour les personnes gravement malades et agitées en raison de troubles mentaux graves.

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Contexte: 

Les personnes souffrant de troubles psychotiques aigus, en particulier lorsque ceux-ci sont associés à un comportement agité ou violent, peuvent avoir besoin de tranquillisants ou d'une sédation. Le dropéridol, un antipsychotique de la classe des butyrophénones, a été utilisé à cet effet dans plusieurs pays.

Objectifs: 

Estimer les effets du dropéridol, y compris son rapport coût-efficacité, par rapport à un placebo, à d'autres traitements « standard » ou « non-standard », ou à d'autres formes de prise en charge des troubles psychotiques, pour maîtriser les agitations sévères et réduire les symptômes psychotiques chez des patients atteints de troubles schizophréniformes.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons mis à jour les recherches précédentes en consultant le registre du groupe Cochrane sur la schizophrénie (18 décembre 2015). Nous avons effectué des recherches dans les références bibliographiques de toutes les études pertinentes afin d'identifier d'autres essais, et contacté les auteurs des essais. Nous avons complété ces recherches électroniques par une recherche manuelle dans les références bibliographiques et en contactant à la fois l'industrie pharmaceutique et les auteurs pertinents.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tous les essais contrôlés randomisés (ECR) avec des données utilisables qui comparaient le dropéridol à n'importe quel autre traitement chez les patients gravement malades potentiellement atteints de troubles psychotiques aigus, y compris de schizophrénie, de trouble schizo-affectif, de troubles affectifs mixtes, de phase maniaque du trouble bipolaire ou de crise psychotique brève.

Recueil et analyse des données: 

Pour les études incluses, nous avons évalué la qualité, le risque de biais et extrait les données. Les données ont été exclues lorsque plus de 50 % des participants étaient perdus de vue. Pour les résultats binaires, nous avons calculé des estimations standard du risque relatif (RR) et des intervalles de confiance à 95 % (IC). Nous avons créé un tableau « Résumé des résultats » en utilisant le système GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons identifié quatre essais pertinents à partir de la mise à jour de la recherche (la précédente version de cette revue incluait seulement deux essais). Lorsque le dropéridol était comparé à un placebo, pour le critère de jugement de la tranquillisation ou de l'endormissement au bout de 30 minutes, nous avons trouvé des preuves d'une différence nette (1 ECR, N = 227, RR 1,18, IC à 95 % 1,05 à 1,31, preuves de qualité élevée). Il y avait une démonstration claire d'une réduction du risque de recours à un médicament supplémentaire après 60 minutes dans le groupe du dropéridol (1 ECR, N = 227, RR 0,55, IC à 95 % 0,36 à 0,85, preuves de qualité élevée). Il n'y avait aucune preuve que le dropéridol entraînait plus d'arythmies cardiovasculaires (1 ECR, N = 227, RR 0,34, IC à 95 % 0,01 à 8,31, preuves de qualité modérée) ou d'obstruction des voies respiratoires (1 ECR, N = 227, RR 0,62, IC à 95 % 0,15 à 2,52, preuves de faible qualité) par rapport au placebo. Pour le critère « participants étant prêts à sortir du service », il n'y avait aucune différence claire entre les groupes (1 ECR, N = 227, RR 1,16, IC à 95 % 0,90 à 1,48, preuves de qualité élevée). Il n'y avait pas de données concernant l'état mental et les coûts.

De même, lorsque le dropéridol était comparé à l'halopéridol, pour le critère de jugement de la tranquillisation ou de l'endormissement au bout de 30 minutes, nous avons trouvé des preuves d'une différence marquée (1 ECR, N = 228, RR 1,01, IC à 95 % 0,93 à 1,09, preuves de qualité élevée). Il y avait une démonstration claire d'une réduction du risque de recours à un médicament supplémentaire après 60 minutes pour les participants dans le groupe du dropéridol (2 ECR, N = 255, RR 0,37, IC à 95 % 0,16 à 0,90, preuves de qualité élevée). Il n'y avait aucune preuve que le dropéridol entraînait plus d'hypotensions cardiovasculaires (1 ECR, N = 228, RR 2,80, IC à 95 % 0,30 à 26,49, preuves de qualité modérée) et d'hypotension/désaturation cardiovasculaire (1 ECR, N = 228, RR 2,80, IC à 95 % 0,12 à 67,98, preuves de faible qualité) que l'halopéridol. Il n'a pas été suggéré que l'utilisation du dropéridol était dangereuse. Pour l'état mental, il n'y avait aucune preuve de différence claire entre l'efficacité du dropéridol par rapport à l'halopéridol (échelle de quantification de la gravité des symptômes psychotiques, 1 ECR, N = 40, différence moyenne (DM) 0,11, IC à 95 % -0,07 à 0,29, preuves de faible qualité). Il n'y avait pas de données concernant l'utilisation des services et les coûts.

Tandis que, lorsque le dropéridol a été comparé avec le midazolam, pour le critère de jugement de la tranquillisation ou de l'endormissement au bout de 30 minutes, nous avons trouvé que le dropéridol avait un effet tranquillisant inférieur au midazolam (1 ECR, N = 153, RR 0,96, IC à 95 % 0,72 à 1,28, preuves de qualité élevée). En ce qui concerne le « besoin d'un médicament supplémentaire 60 minutes après une premier sédation adéquate », nous avons trouvé un effet (1 ECR, N = 153, RR 0,54, IC à 95 % 0,24 à 1,20, preuves de qualité modérée). En termes d'effets indésirables, nous n'avons trouvé aucune différence statistiquement significative entre les deux médicaments pour l'obstruction des voies respiratoires (1 ECR, N = 153, RR 0,13, IC à 95 % 0,01 à 2,55, preuves de faible qualité) ou l'hypoxie respiratoire (1 ECR, N = 153, RR 0,70, IC à 95 % 0,16 à 3,03, preuves de qualité modérée) - mais l'utilisation du midazolam a nécessité chez trois personnes (sur environ 70) une sorte de « prise en charge des voies respiratoires » ; ces événements ne sont pas survenus dans le groupe du dropéridol. Il n'y avait pas de données concernant l'état mental, l'utilisation des services et les coûts.

De plus, lorsque le dropéridol était comparé à l'olanzapine, pour le critère de jugement de la tranquillisation ou de l'endormissement à n'importe quel moment, nous n'avons identifié aucune différence notable entre le médicament plus ancien (le dropéridol) et l'olanzapine (par exemple au bout de 30 minutes : 1 ECR, N = 221, RR 1,02, IC à 95 % 0,94 à 1,11, preuves de qualité élevée). Il a été suggéré que les participants assignés au dropéridol ont besoin de moins de médicaments supplémentaires après 60 minutes comparés aux personnes ayant reçu de l'olanzapine (1 ECR, N = 221, RR 0,56, IC à 95 % 0,36 à 0,87, preuves de qualité élevée). Il n'y avait aucune preuve indiquant que le dropéridol entraînait plus d'arythmies cardiovasculaires (1 ECR, N = 221, RR 0,32, IC à 95 % 0,01 à 7,88, preuves de qualité modérée) et d'obstruction des voies respiratoires (1 ECR, N = 221, RR 0,97, IC à 95 % 0,20 à 4,72, preuves de faible qualité) par rapport à l'olanzapine. Pour le critère « participant étant prêt à sortir du service », il n'y avait aucune différence entre les groupes (1 ECR, N = 221, RR 1,06, IC à 95 % 0,83 à 1,34, preuves de qualité élevée). Il n'y avait pas de données concernant l'état mental et les coûts.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Martin Vuillème et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.