Thérapies actives du mouvement corps-esprit pour la broncho-pneumopathie chronique obstructive

Contexte

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une cause majeure de mauvaise santé et est actuellement la quatrième cause de décès dans le monde. La BPCO qualifie une maladie pulmonaire chronique dont les symptômes typiques sont l'essoufflement, la fatigue et l'intolérance à l'effort. Les thérapies actives du mouvement corps-esprit (TAMCE) reposent sur des thérapies corps-esprit telles que la respiration contrôlée et/ou des interventions ciblées de méditation/attention par lesquelles les participants doivent bouger activement leurs articulations et muscles (p. ex. yoga, tai chi, qigong). Bien que les différentes formes de TAMCE puissent être d’origines diverses, elles partagent généralement des principes similaires : mouvement / posture, respiration contrôlée et attention / méditation ciblée. Les stratégies de TAMCE appliquées aux personnes atteintes de BPCO se sont avérées plus efficaces que les soins habituels. Cependant, l'effet de la TAMCE en complément ou en comparaison directe avec la réadaptation pulmonaire (RP), pierre angulaire de la prise en charge de la BPCO, reste à déterminer ; tel est l'objectif de la présente revue.

Caractéristiques de l’étude

Nous avons inclus 10 études impliquant 762 participants qui ont été répartis au hasard pour recevoir la TAMCE seule ou en combinaison avec la RP ou seulement la RP (principalement de l’entraînement non structuré à la marche). La qualité des études incluses était globalement faible.

Résultats principaux

Compte tenu de la qualité des données probantes disponibles, les effets de la TAMCE par rapport à la RP ou de la TAMCE en combinaison avec la RP par rapport à la RP seule demeurent peu concluants. L'une des principales raisons en est que les programmes de RP utilisés pour les comparaisons présentaient d'importants défauts de conception ; par exemple, l’expression "RP" était utilisée sans esprit critique dans la grande majorité des études, et la RP était souvent considérée comme étant équivalente à de l’entraînement non structuré à la marche. Cette situation, conjuguée à la faible qualité des données probantes, nous conduit à émettre des doutes quant aux effets observés. Les données probantes disponibles suggèrent que lorsque la TAMCE a été comparée à la RP seule, des améliorations plus importantes de la qualité de vie spécifique à la maladie ont été observées avec la TAMCE, bien que la TAMCE ne fonctionnait pas mieux que la RP en ce qui concerne la dyspnée (essoufflement). L'ajout de la TAMCE à la RP a entraîné une amélioration importante de la qualité de vie générique comparativement à la RP seule, cependant cela n'a pas entraîné d'autres améliorations de la qualité de vie spécifique à la maladie. Toutefois, avant de pouvoir tirer des conclusions définitives, de nouvelles études comparant la TAMCE à la RP doivent être menées, et celles-ci devraient suivre les lignes directrices actuelles en matière de RP pour la conception d'interventions de comparaison, de préférence émises par des professionnels dûment formés ayant une compréhension approfondie de la physiologie respiratoire, des sciences de l’activité physique et de la pathologie de la BPCO.

Conclusions des auteurs: 

Compte tenu de la qualité des données probantes disponibles, les effets de la TAMCE par rapport à la RP ou de la TAMCE en combinaison avec la RP par rapport à la RP seule chez les personnes atteintes de BPCO stable demeurent peu concluants. Les données probantes de faible qualité suggèrent une meilleure QdV spécifique à la maladie avec la TAMCE par rapport à la RP chez les personnes atteintes de BPCO stable, et les données probantes de très faible qualité ne suggèrent aucune différence pour ce qui est de la dyspnée entre la TAMCE et la RP. Des données probantes de qualité modérée montrent que la TAMCE combinée à la RP n'améliore pas la QdV spécifique à la maladie, et d’autres de très faible qualité suggèrent que la TAMCE combinée à la RP peut conduire à une meilleure QdV générique par rapport à la RP seule. Des études futures comportant des descriptions adéquates de l'entraînement aux exercices conventionnels (c.-à-d. de l'information sur la durée, l'intensité et la progression des exercices), effectuées par des professionnels qualifiés ayant une compréhension approfondie de la physiologie respiratoire, des sciences de l'activité physique et de la pathologie de la BPCO, sont nécessaires avant que des conclusions définitives puissent être tirées sur les résultats thérapeutiques de la TAMCE comparativement à la RP ou de la TAMCE combinée à la RP comparativement à la RP seule chez des patients atteints de BPCO.

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Contexte: 

Les thérapies actives du mouvement corps-esprit (TAMCE), y compris, mais sans s'y limiter, le yoga, le tai chi et le qigong, ont été appliquées comme modalités d'exercice pour les personnes atteintes de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO). Les stratégies de TAMCE se sont révélées plus efficaces que les soins habituels ; toutefois, il reste à déterminer si la TAMCE fonctionne mieux, ou moins bien que la réadaptation pulmonaire (RP), ou si les résultats obtenus par ces deux traitements sont équivalents chez les personnes atteintes de BPCO.

Objectifs: 

Évaluer les effets des TAMCE par rapport à la RP ou en plus de celle-ci dans la prise en charge de la BPCO.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le Registre Spécialisé des essais du Groupe Cochrane sur les Voies Respiratoires et dans les principales bases de données de Chine, ainsi que dans les registres d'essais depuis leur création jusqu'à juillet 2017. De plus, nous avons cherché des références d'études primaires et des revues. Nous avons mis à jour cette recherche en juillet 2018, mais nous n'avons pas encore intégré ces résultats.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus (1) des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant la TAMCE (c.-à-d. des interventions de respiration contrôlée et/ou de méditation/attention ciblée pour lesquelles les patients doivent bouger activement leurs articulations et leurs muscles pendant au moins quatre semaines sans fréquence minimale d'intervention) à la RP (tout programme de réadaptation à domicile ou à base communautaire, en milieu hospitalier ou non, d'au moins quatre semaines, sans fréquence minimale d'intervention, et qui incluait des entraînements composés d’exercices conventionnels avec ou sans formation ou soutien psychologique) et (2) des ECR comparant la TAMCE + RP à la RP seule chez les patients souffrant de BPCO. Deux auteurs indépendants de revue ont passé au crible et sélectionné les études à inclure.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de revue ont choisi indépendamment les essais à inclure, ont extrait les données sur les résultats et ont évalué leur risque de biais. Nous avons contacté les auteurs de l'étude lorsque cela fut nécessaire afin de leur demander de fournir les données manquantes. Nous avons calculé les différences moyennes (DM) à l'aide d'un modèle à effets aléatoires.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus dans la méta-analyse 10 études auxquelles ont participé 762 personnes à une ou plusieurs comparaisons. La taille de l'échantillon des études incluses variait de 11 à 206 participants. Neuf études sur dix portant sur tous les niveaux de gravité de la BPCO ont été menées en Chine auprès d'adultes âgés de 55 à 88 ans, dont une proportion plus élevée d'hommes (78 %). Neuf études sur dix incluaient des programmes de tai chi et/ou de qigong dans le cadre de la TAMCE, et une étude a inclus du yoga. Dans l'ensemble, l’expression "RP" a été utilisée sans esprit critique dans la grande majorité des études, ce qui pose des limites dans la comparaison entre la TAMCE et la RP. Par exemple, huit études sur dix considéraient que l'entraînement à la marche était équivalent à la RP et l'utilisaient comme entraînement avec des exercices conventionnels dans le cadre de la RP. La qualité globale des études pour les comparaisons principales variait de moyenne à très faible, principalement en raison de leur imprécision, leur caractère indirect (composante de l'exercice non conforme aux recommandations) et de leur risque de biais. Les principaux critères d’évaluation de notre revue ont été la qualité de vie, la dyspnée et les évènements indésirables graves.

Lorsque des chercheurs ont comparé la TAMCE à la RP seule (principalement de l’entraînement non structuré à la marche), des améliorations statistiquement significatives de la qualité de vie spécifique à la maladie (QdV) (score total du Questionnaire de l’Hôpital St Georges sur les Problèmes Respiratoires (SGRQ)) favorisaient la TAMCE : différence moyenne (MD) -5,83, intervalle de confiance à 95 % (IC) -8,75 à -2,92 ; trois essais ; 249 participants ; données probantes de faible qualité. L'ampleur de l'effet commun, mais pas l'IC à 95 % autour de l'effet du traitement regroupé, dépassait la différence minimale cliniquement importante (DMCI) de moins quatre. Le test d'évaluation de la BPCO (CAT) a également révélé des améliorations statistiquement significatives favorisant la TAMCE par rapport à la RP, avec des scores supérieurs à la DMCI de trois, une DM de 6,58 unités (IC à 95 % -9,16 à -4,00 unités ; un essai ; 74 participants ; données probantes de faible qualité). Les résultats ne montrent aucune différence entre les groupes en ce qui concerne la dyspnée mesurée par l'échelle modifiée du Medical Research Council (DM 0,00 unité, IC à 95 % -0,37 à 0,37 ; deux essais ; 127 participants ; données probantes de faible qualité), l'échelle Borg (DM 0,44 unité, IC à 95 % -0,88 à 0,00 ; un essai ; 139 participants ; données probantes de faible qualité) ou l'échelle de dyspnée CRQ (questionnaire sur les maladies respiratoires chroniques) (DM -0,21 ; IC à 95 % -2,81 à 2,38 ; un essai ; 11 participants ; données probantes de faible qualité). Les comparaisons entre la TAMCE et la RP seule ne comprenaient pas les évaluations de la qualité de vie générique, des événements indésirables, de la fonction musculaire des membres, des exacerbations ou de l'observance.

Les comparaisons de la TAMCE combinée à la RP par rapport à la RP seule (principalement l'entraînement non structuré à la marche) ont révélé des améliorations significatives de la QdV générique mesurée par le questionnaire Short Form (SF)-36 pour le score sommaire de santé générale SF-36 (DM 5,42, IC à 95 % 3,82 à 7,02 ; un essai ; 80 participants ; données probantes de très faible qualité) et le score sommaire de santé mentale SF-36 (DM 3,29, IC à 95 % 1,45 à 4,95 ; un essai ; 80 participants ; données probantes de très faible qualité). En ce qui concerne la qualité de vie spécifique à la maladie, les chercheurs n'ont noté aucune amélioration significative avec l'ajout de la TAMCE à la RP par rapport à la RP seule (score total du SGRQ : MD -2,57, IC à 95 % -7,76 à 2,62 unités ; un essai ; 192 participants ; données probantes de qualité moyenne ; score à l'échelle de dyspnée CRQ : DM 0,04, IC à 95 % -2,18 à 2,26 unités ; un essai ; 80 participants ; données probantes de très faible qualité). Les comparaisons de la TAMCE + RP à la RP seule ne comprenaient pas les évaluations de la dyspnée, des évènements indésirables, de la fonction musculaire des membres, des exacerbations ou de l’observance.

Notes de traduction: 

Traduction effectuée par Amira Yasmine BENMELOUKA et révisée par Cochrane France.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.