Les modulateurs des récepteurs de la progestérone contre l'endométriose

Problématique de la revue

Les chercheurs de la Collaboration Cochrane ont examiné les preuves de l'efficacité et de l'innocuité des modulateurs des récepteurs de la progestérone pour les femmes atteintes d'endométriose.

Contexte

L'endométriose est une maladie du tissu endométrial (glandes et stroma) en dehors de la cavité utérine. Elle est dépendante des œstrogènes et survient donc principalement pendant les années de fécondité. Elle peut provoquer des douleurs dans l'abdomen généralement pendant les règles (menstruations) ou des douleurs associées aux rapports sexuels. Les modulateurs des récepteurs de la progestérone ont été préconisés comme l'un des traitements hormonaux pour l'endométriose.

Caractéristiques de l’étude

Nous avons trouvé 10 essais contrôlés randomisés incluant 960 femmes ; les preuves sont à jour en novembre 2016.

Résultats principaux

Trois études ont évalué la mifépristone. Des données de valeur probante moyenne montrent que la mifépristone soulage la dysménorrhée (règles douloureuses) chez les femmes atteintes d'endométriose. Les preuves suggèrent que si 40 % des femmes prenant un placebo souffrent de dysménorrhée, 3 % à 10 % des femmes prenant de la mifépristone en souffrent. Des données de faible valeur probante suggèrent que la mifépristone soulage également la dyspareunie (douleur pendant les rapports sexuels). Cependant, l'aménorrhée (absence de règles) et les bouffées de chaleur étaient des effets secondaires fréquents de la mifépristone. Près de 90 % des patientes du groupe prenant de la mifépristone présentaient une aménorrhée, et 24 % des bouffées de chaleur, alors que les chercheurs ne signalaient qu'un événement de chaque effet secondaire (1 %) chez les femmes prenant un placebo. Les preuves étaient insuffisantes pour démontrer des différences en ce qui concerne les taux de nausées, de vomissements, ou de fatigue, le cas échéant.

Les comparaisons de différentes doses de mifépristone n'étaient pas concluantes, bien que des preuves suggèrent que la dose de 2,5 mg pourrait être moins efficace que les doses plus élevées.

D'autres études ont évalué d'autres modulateurs des récepteurs de la progestérone. Les chercheurs ont comparé la gestrinone par rapport à d'autres traitements (danazol ou leuproréline), l'ulipristal par rapport à l'acétate de leuprolide, et l'asoprisnil par rapport à un placebo. Cependant, les preuves étaient insuffisantes pour tirer des conclusions définitives concernant l'innocuité et l'efficacité de ces interventions.

Valeur probante des données

La valeur probantes des données variait de faible à moyenne. Les principales limitations étaient un sérieux risque de biais (associé à un mauvais compte‐rendu des méthodes et des taux d'attrition élevés ou incertains dans la plupart des études), une imprécision très importante (associée à des taux d'événements faibles et des intervalles de confiance étendus), et un caractère indirect (critère de jugement évalué dans un sous‐groupe de participants sélectionnés).

Conclusions des auteurs: 

Chez les femmes atteintes d'endométriose, des données de valeur probante moyenne montrent que la mifépristone soulage la dysménorrhée, et des données de faible valeur probante suggèrent que cet agent soulage la dyspareunie, bien que l'aménorrhée et les bouffées de chaleur soient des effets secondaires fréquents. Les données sur le dosage n'étaient pas concluantes, bien qu'elles suggèrent que la dose de 2,5 mg de mifépristone pourrait être moins efficace que les doses plus élevées. Nous n'avons pas trouvé suffisamment de preuves pour tirer des conclusions définitives concernant l'innocuité et l'efficacité d'autres modulateurs des récepteurs de la progestérone.

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Contexte: 

L'endométriose est définie comme la présence de tissu endométrial (glandes et de stroma) en dehors de la cavité utérine. Cette affection est dépendante des œstrogènes et survient donc principalement pendant les années de fécondité. En raison de leurs effets antiprolifératifs sur l'endomètre, les modulateurs des récepteurs de la progestérone (MRP) ont été préconisés pour le traitement de l'endométriose.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et l'innocuité des MRP, essentiellement du point de vue du soulagement de la douleur, par rapport à d'autres traitements ou à un placebo ou à l'absence de traitement chez les femmes en âge de procréer atteintes d'endométriose.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans les bases de données électroniques, les registres d'essais et les sites internet suivants : le registre spécialisé d'essais contrôlés du groupe Cochrane relatif à la gynécologie et la fertilité (CGFG), le registre central des études en ligne (CRSO), MEDLINE, Embase, PsycINFO, clinicaltrials.gov, et la plateforme de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), depuis leur création jusqu'au 28 novembre 2016. Nous avons effectué une recherche manuelle dans les références bibliographiques des articles obtenus par les recherches.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) publiés dans toutes les langues qui examinaient les effets des MRP dans le traitement de l'endométriose symptomatique.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standard prévues par la Collaboration Cochrane. Les principaux critères de jugement incluaient les mesures de la douleur et les effets secondaires.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 10 essais contrôlés randomisés (ECR) incluant 960 femmes. Deux ECR comparaient la mifépristone à un placebo ou à une dose différente de mifépristone, un ECR comparait l'asoprisnil à un placebo, un ECR comparait l'ulipristal à l'acétate de leuprolide, et quatre ECR comparaient la gestrinone au danazol, à des analogues de l’hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires (GnRH) ou à une dose différente de gestrinone. La valeur probante des données variait de très faible à élevée. Les principales limitations étaient un sérieux risque de biais (associé à un mauvais compte‐rendu des méthodes et des taux d'attrition élevés ou incertains dans la plupart des études), une imprécision très importante (associée à des taux d'événements faibles et des intervalles de confiance étendus), et un caractère indirect (critère de jugement évalué dans un sous‐groupe de participants sélectionnés).

Mifepristone versus placebo

Une étude a effectué cette comparaison et rapporté des taux de symptômes douloureux chez les femmes ayant signalé des symptômes à l'inclusion.

Au bout de trois mois, le groupe de la mifépristone avait des taux plus faibles de dysménorrhée (rapport des cotes [RC] 0,08, intervalle de confiance [IC] à 95 % 0,04 à 0,17 ; un ECR, n = 352 ; preuves de qualité modérée), suggérant que si 40 % des femmes prenant un placebo souffraient de dysménorrhée, entre 3 % et 10 % des femmes prenant de la mifépristone en souffraient. Le groupe de la mifépristone avait également un plus faible taux de dyspareunie (RC 0,23, IC à 95 % 0,11 à 0,51 ; un ECR, n = 223 ; données de faible valeur probante). Cependant, le groupe de la mifépristone avait des taux plus élevés d'effets secondaires : près de 90 % étaient en aménorrhée et 24 % avaient des bouffées de chaleur, alors que le groupe placebo ne signalait qu'un seul événement de chaque effet secondaire (1 %) (données de valeur probante élevée). Les preuves étaient insuffisantes pour démontrer des différences en ce qui concerne les taux de nausées, de vomissements, ou de fatigue, le cas échéant.

Comparaisons de doses de mifépristone

Deux études ont comparé des doses de mifépristone et n’ont pas trouvé suffisamment de preuves pour démontrer des différences entre les différentes doses en matière d'efficacité ou d'innocuité. Cependant, l'analyse en sous‐groupe des comparaisons entre la mifépristone et un placebo suggère que la dose de 2,5 mg pourrait être moins efficace que les doses de 5 mg ou 10 mg pour le traitement de la dysménorrhée ou de la dyspareunie.

Comparaisons avec la gestrinone

Une étude a comparé la gestrinone au danazol, et une autre étude comparait la gestrinone à leuproréline.

Les preuves étaient insuffisantes pour démontrer des différences, le cas échéant, entre la gestrinone et le danazol pour les taux de soulagement de la douleur (celles ne signalant pas de douleurs pelviennes ou signalant de légères douleurs) (RC 0,71, IC à 95 % 0,33 à 1,56 ; deux ECR, n = 230 ; preuves de très faible qualité), dysménorrhée (RC 0,72, IC à 95 % 0,39 à 1,33 ; deux ECR, n = 214 ; preuves de très faible qualité), ou dyspareunie (RC 0,83, IC à 95 % 0,37 à 1,86 ; deux ECR, n = 222 ; données de très faible valeur probante). Le groupe de la gestrinone avait un taux plus élevé d'hirsutisme (RC 2,63, IC à 95 % 1,60 à 4,32 ; deux ECR, n = 302 ; données de très faible valeur probante) et un taux plus faible de diminution du volume des seins (RC 0,62, IC à 95 % 0,38 à 0,98 ; deux ECR, n = 302 ; données de faible valeur probante). Les preuves étaient insuffisantes pour démontrer des différences entre les groupes, le cas échéant, pour la fréquence des bouffées de chaleur (RC 0,79, IC à 95 % 0,50 à 1,26 ; deux ECR, n = 302 ; données de très faible valeur probante) ou de l'acné (RC 1,45, IC à 95 % 0,90 à 2,33 ; deux ECR, n = 302 ; données de faible valeur probante).

Lorsque les chercheurs ont comparé la gestrinone à la leuproréline grâce à des mesures sur l'échelle d'évaluation verbale de 1 à 3 (le score le plus bas indique un bénéfice), le score de dysménorrhée moyen était plus élevé dans le groupe de la gestrinone (DM 0,35 points, IC à 95 % 0,12 à 0,58 ; un ECR, n = 55 ; données de faible valeur probante), mais le score de dyspareunie moyen était plus faible dans ce groupe (DM 0,33 points, IC à 95 % 0,62 à 0,04 ; données de faible valeur probante). Le groupe gestrinone avait des taux plus faibles d'aménorrhée (RC 0,04, IC à 95 % 0,01 à 0,38 ; un ECR, n = 49 ; preuves de faible qualité) et de bouffées de chaleur (RC 0,20, IC à 95 % 0,06 à 0,63 ; une étude, n = 55 ; données de faible valeur probante), mais des taux plus élevés de pertes de sang ou de saignements (RC 22,92, IC à 95 % 2,64 à 198,66 ; un ECR, n = 49 ; données de faible valeur probante).

Les preuves étaient insuffisantes pour démontrer des différences au niveau de l'efficacité ou de l'innocuité entre les différentes doses de la gestrinone.

Comparaison entre asoprisnil et placebo

Une étude (n = 130) a effectué cette comparaison, mais n’a pas rapporté de données appropriées pour l'analyse.

Comparaison entre ulipristal et acétate de leuprolide

Une étude (n = 38) a effectué cette comparaison, mais n’a pas rapporté de données appropriées pour l'analyse.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Sophie Fleurdépine et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.