Injections des agents anti-facteur de croissance endothéliale vasculaire pour la rétinopathie diabétique proliférative

Problématique de la revue
Les injections de des agents anti-facteur de croissance endothéliale vasculaire (anti-VEGF) avec ou sans traitement au laser aident-elles les personnes atteintes de rétinopathie diabétique proliférative (avancée) en termes de vision et de progression de la maladie ? Ce traitement est-il sûr ?

Principaux messages

- Les anti-VEGF (combinés ou non au laser) améliorent la vision, mais le degré d'amélioration n'est pas cliniquement significatif. Ils réduisent également la formation de nouveaux vaisseaux, les hémorragies et la nécessité de retirer le vitré par chirurgie (vitrectomie).

- La sécurité des anti-VEGF (combinés ou non au laser) reste incertaine car nous avons très peu confiance dans les données probantes que nous avons trouvées.

- Davantage d'essais cliniques de qualité sont nécessaires pour mieux établir la dose de traitement appropriée et le moment de l'administration des anti-VEGF.

Contexte
La rétinopathie diabétique proliférante (RDP) est le nom médical d'une atteinte avancée de la rétine. La RDP consiste en la présence de nouveaux vaisseaux dans la rétine et d'une hémorragie vitréenne ou prérétinienne (fuite de sang dans et autour du gel qui remplit l'espace entre le cristallin et la rétine), et peut provoquer la cécité. La photocoagulation panrétinienne (PPR) au laser est le traitement actuel. Cependant, elle a des effets secondaires tels que la perte de vision. Les anti-VEGF empêchent la formation de nouveaux vaisseaux. Nous voulions savoir si les anti-VEGF, combinés à d'autres traitements ou seuls, étaient sûrs et meilleurs qu'une alternative standard pour améliorer la RDP.

Comment avons-nous procédé ?

Nous avons recherché des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant les anti-VEGF (associés ou non au laser) à un autre contrôle actif, à un traitement simulé ou à l'absence de traitement pour les personnes atteintes de RDP. Nous avons également inclus des études qui évaluaient l'association d'anti-VEGF avec d'autres traitements. Nous avons exclu les études portant sur des personnes ayant subi une vitrectomie ou un traitement visant à éliminer tout ou partie du gel qui remplit l'espace entre le cristallin et la rétine.

Qu’avons-nous trouvé ?
Nous avons trouvé 23 études réalisées en Amérique du Nord et du Sud, en Europe, au Moyen-Orient et en Asie. En moyenne, les personnes ont été étudiées pendant huit mois, mais une étude a suivi les participants pendant deux ans. Au total, nous avons inclus 2334 yeux de 1755 personnes ; 55 % étaient des hommes et l'âge moyen était de 56 ans. Environ la moitié des études n'ont pas déclaré leur source de financement et environ la moitié des auteurs des études n'ont pas indiqué s'ils avaient ou non des conflits d'intérêts.

Principaux résultats
En moyenne, les personnes traitées par anti-VEGF avec ou sans laser ont probablement une meilleure vision que les personnes non traitées par anti-VEGF (mais le degré d'amélioration est faible et pourrait ne pas être perceptible), et les nouveaux vaisseaux deviennent plus petits. Ils étaient également moins susceptibles de présenter des saignements dans l'œil et de devoir subir une vitrectomie. Seules deux études ont rapporté la qualité de vie, mais nous n'avons qu'une faible confiance dans les données probantes. Les effets secondaires étaient peu fréquents et les données n'étaient pas suffisantes pour détecter une différence de tolérance entre les deux groupes.

Quelles sont les limites des données probantes ?

Certaines études présentaient des lacunes dans leur plan d'étude et leurs résultats pouvaient être biaisés ; en outre, elles n'incluaient pas un grand nombre de personnes. Cela nous amène à n'avoir qu'une confiance faible à modérée dans les principaux résultats, et très peu de confiance dans les données probantes concernant les effets secondaires.

Ces données probantes sont-elles à jour ?

Cette revue est une mise à jour de notre précédente revue publiée en 2014. Les données probantes sont à jour jusqu'en juin 2022.

Conclusions des auteurs: 

Les agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF) ± la photocoagulation panrétinienne (PPR) comparés à la PPR seule augmentent probablement l'acuité visuelle, mais le degré d'amélioration n'est pas cliniquement significatif. En ce qui concerne les critères de jugement secondaires, les anti-VEGF ± PPR produisent une régression des nouveaux vaisseaux, réduisent l'hémorragie vitréenne et pourraient réduire la nécessité d'une vitrectomie par rapport aux yeux qui ont reçu la PPR seule. Nous ne savons pas si les anti-VEGF ± PPR ont un impact sur l'incidence des événements indésirables et ils pourraient avoir peu ou pas d'effet sur la qualité de vie des patients. Des essais cliniques soigneusement conçus et menés sont nécessaires, évaluant le calendrier optimal des anti-VEGF seuls par rapport à la PPR, et avec un suivi plus long.

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Contexte: 

La rétinopathie diabétique proliférante (RDP) est une complication avancée de la rétinopathie diabétique qui peut provoquer l'aveuglement. Elle consiste en la présence de nouveaux vaisseaux dans la rétine et d'une hémorragie du vitré. Bien que la photocoagulation panrétinienne (PPR) soit le traitement de choix de la RDP, elle a des effets secondaires qui peuvent affecter la vision. Les agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF), qui produisent une inhibition de la prolifération vasculaire, pourraient améliorer la vision des personnes atteintes de RDP.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et la tolérance des anti-VEGF dans le traitement de la RDP et résumer toute évaluation économique pertinente de leur utilisation.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL (qui contient le registre des essais contrôlés du groupe Cochrane sur l’ophtalmologie ; 2022, numéro 6) ; Ovid MEDLINE ; Ovid Embase ; le registre ISRCTN ; ClinicalTrials.gov, et l'ICTRP de l'OMS. Nous n'avons utilisé aucune restriction de date ou de langue. La dernière recherche dans les bases de données électroniques a été effectuée le 1er juin 2022.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) comparant les anti-VEGF à un autre contrôle actif, à un traitement fictif ou à l'absence de traitement pour les personnes atteintes de RDP. Nous avons également inclus des études qui évaluaient l'association d'anti-VEGF avec d'autres traitements. Nous avons exclu les études qui utilisaient des anti-VEGF chez des personnes subissant une vitrectomie.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont indépendamment sélectionné les études à inclure, extrait les données et évalué le risque de biais pour tous les essais inclus. Nous avons calculé le risque relatif (RR) ou la différence de moyennes (DM), ainsi que les intervalles de confiance (IC) à 95 %. Nous avons utilisé GRADE pour évaluer le niveau de confiance des données probantes.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 15 nouvelles études dans cette mise à jour, ce qui porte le total à 23 ECR avec 1755 participants (2334 yeux). Quarante-cinq pour cent des participants étaient des femmes et 55 % des hommes, avec un âge moyen de 56 ans (de 48 à 77 ans). L'hémoglobine glycosylée (Hb1Ac) moyenne était de 8.45 % pour le groupe PPR et de 8.25 % pour les personnes recevant des anti-VEGF seuls ou en association. Douze études incluaient des personnes atteintes de RDP, et les participants à 11 études présentaient une RDP à haut risque.

Douze études portaient sur le bévacizumab, sept sur le ranibizumab, une sur le conbercept, deux sur le pegaptanib et une sur l'aflibercept. Le nombre moyen de participants par ECR était de 76 (allant de 15 à 305). La plupart des études avaient un risque de biais incertain ou élevé, principalement en ce qui concerne la mise en aveugle des interventions et des évaluateurs des critère de jugement. Quelques études avaient une présentation sélective des résultats et un biais d'attrition.

Aucune étude n'a rapporté la perte ou le gain de 3 lignes ou plus d'acuité visuelle (AV) à 12 mois. Les anti-VEGF ± PPR augmentent probablement la AV par rapport à la PPR seule (différence de moyennes (DM) -0.08 logMAR, IC à 95 % -0.12 à -0.04 ; I2 = 28 % ; 10 ECR, 1172 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Les anti-VEGF ± PPR pourraient augmenter la régression des nouveaux vaisseaux (DM -4.14 mm2, IC à 95 % -6.84 à -1.43 ; I2 = 75 % ; 4 ECR, 189 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et probablement augmenter la régression complète des nouveaux vaisseaux (RR 1.63, IC à 95 % 1.19 à 2.24 ; I2 = 46 % ; 5 ECR, 405 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Les anti-VEGF ± PPR réduisent probablement l'hémorragie vitréenne (RR 0.72, IC à 95 % 0.57 à 0.90 ; I2 = 0 % ; 6 ECR, 1008 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Les anti-VEGF ± PPR pourraient réduire la nécessité d'une vitrectomie par rapport aux yeux ayant reçu la PPR seule (RR 0.67, IC à 95 % 0.49 à 0.93 ; I2 = 43 % ; 8 ECR, 1248 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Les anti-VEGF ± PPR pourraient entraîner peu ou pas de différence dans la qualité de vie par rapport à la PPR seule (DM 0.62, IC à 95 % -3.99 à 5.23 ; I2 = 0% ; 2 RCTs, 382 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Nous ne savons pas si les anti-VEGF ± PPR comparés à la PPR seule ont eu un impact sur les événements indésirables (données probantes d’un niveau de confiance très faible). Nous n'avons pas trouvé de différences d'acuité visuelle dans les analyses sous-groupes comparant le type d'anti-VEGF, la sévérité de la maladie (la RDP par rapport à la RDP à haut risque), le temps de suivi (< 12 mois par rapport à 12 mois ou plus), et le traitement par anti-VEGF + PPR par rapport à anti-VEGFs seuls.

Les principales raisons pour lesquelles le niveau de confiance des données probantes a été abaissé sont le risque de biais élevé, l'imprécision et l'incohérence des estimations de l'effet.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Farah Noureddine et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.