Traitements médicaux pour la prise en charge du sevrage de l'opium

Objectif de la revue

L’objectif de cette revue Cochrane est de déterminer quels sont les médicaments les plus efficaces et les plus sûrs pour la prise en charge du sevrage de l'opium. Nous avons recueilli et analysé toutes les études pertinentes pour répondre à cette question, et avons trouvé 13 études impliquant 1096 participants.

Principaux messages

Cette revue comprend les 12 comparaisons suivantes : baclofène contre clonidine, clonidine contre clonidine plus amantadine, clonidine contre buprénorphine, clonidine haut dosage contre clonidine faible dosage contre traitement symptomatique, clonidine contre méthadone, méthadone contre tramadol, méthadone contre méthadone plus gabapentine, réduction progressive de méthadone contre retrait soudain de méthadone, méthadone plus amitriptyline contre méthadone, diphénoxylate contre propoxyphène, trois différents protocoles de teinture d'opium, et teinture d'opium contre méthadone. Ces études ont été menées dans trois pays : l'Iran, l'Inde et la Thaïlande. L'appui d'une société pharmaceutique sous la forme d’un approvisionnement de médicaments gratuits n'a été signalé que dans une seule étude.

Les données probantes ne permettent pas de déterminer si l'un des traitements évalués est plus efficace qu'un autre dans la prise en charge du sevrage de l'opium. Cependant, il semble que les symptômes observés durant le sevrage de l'opium soient conséquents les premiers jours après l'arrêt de l'opium. Tous les traitements évalués pourraient être utiles pour soulager les symptômes. L'utilisation de la clonidine peut possiblement entraîner une baisse de la tension artérielle.

Sujets étudiés dans la revue

Les symptômes de sevrage de l'opium sont semblables à ceux d'autres opiacés comme l'héroïne, mais avec une faible intensité. Les patients ont habituellement besoin de médicaments pour soulager les symptômes de sevrage.

Principaux résultats de la revue

Nous ne savons pas avec certitude si les effets de la clonidine diffèrent de ceux du baclofène pour ce qui est du nombre de participants ayant terminé le traitement (la certitude des preuves étant très faible).

Nous ne savons pas avec certitude si l'ajout d'amantadine à la clonidine diminue la gravité des symptômes de sevrage au cours des jours 1 à 3 chez les patients hospitalisés ou si elle a un effet sur l’aboutissement du traitement (la certitude des preuves étant très faible).

Nous ne savons pas si la buprénorphine permet un meilleure contrôle des symptômes de sevrage que la clonidine chez les patients hospitalisés et les patients externes (la certitude des preuves étant très faible). Des effets indésirables, y compris de l'hypotension, ont été signalés en plus grand nombre dans le groupe traité à la clonidine.

Nous ne savons pas avec certitude si la clonidine haut dosage diffère de la clonidine faible dosage pour ce qui est de l’aboutissement du traitement en milieu hospitalier (la certitude des preuves étant très faible), mais un plus grand nombre de cas d'hypotension ont été signalés avec la clonidine haut dosage.

En comparaison avec la méthadone, la clonidine pourrait être plus efficace en termes de la poursuite du traitement chez les patients externes.

Nous ne savons pas avec certitude si le tramadol diffère de la méthadone pour ce qui est de l’aboutissement du traitement et de l'atténuation des symptômes de sevrage, et si les effets indésirables sont courants avec la méthadone (la certitude des preuves étant très faible).

L'ajout de la gabapentine à la méthadone ferait peu ou pas de différence dans l'aboutissement du traitement et la gravité des symptômes de sevrage.

Nous ne savons pas avec certitude si le retrait soudain de la méthadone est associé à moins de plaintes des patients que la réduction graduelle de la méthadone (la certitude des preuves étant très faible).

La teinture d'opium ne ferait possiblement aucune différence par rapport à la méthadone dans l'aboutissement du traitement, la gravité des symptômes de sevrage et les effets indésirables.

Actualisation de la revue

Nous avons recherché les études publiées jusqu'en septembre 2017.

Conclusions des auteurs: 

Les résultats n'appuient pas l'utilisation d'une approche pharmacologique spécifique pour la prise en charge du sevrage de l'opium en raison de données généralement de très faible qualité et de différences faibles ou nulles entre les traitements. Cependant, il semble que les symptômes de sevrage de l'opium soient importants, surtout entre le 2e et le 4e jour suivant l'arrêt de l'opium. Tous les traitements évalués pourraient être utiles pour soulager les symptômes. Ceux qui reçoivent de la clonidine peuvent possiblement souffrir d'hypotension.

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Contexte: 

Les traitements pharmacologiques pour la prise en charge du sevrage de l'héroïne ont fait l'objet d'études et de revues approfondies. La dépendance à l'opium est généralement associée à une dépendance moins grave et à des symptômes de sevrage plus légers que ceux de l'héroïne. Les données relatives à la prise en charge du sevrage de l'héroïne pourraient donc ne pas s'appliquer complètement à l'opium.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et l'innocuité de divers traitements pharmacologiques pour la prise en charge de la phase aiguë du sevrage de l'opium.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons cherché dans les sources suivantes jusqu'en septembre 2017 : CENTRAL, MEDLINE, Embase, CINAHL, PsycINFO, bases de données régionales et nationales (IMEMR, Iranmedex et IranPsych), les principales sources électroniques d’essais en cours et les listes de référence de tous les articles pertinents. De plus, nous avons communiqué avec des chercheurs connus pour obtenir des données manquantes ou des essais incomplets.

Critères de sélection: 

Essais cliniques contrôlés et essais contrôlés randomisés sur des thérapies pharmacologiques, comparées à l'absence d'intervention, placebo, autres traitements pharmacologiques, différentes doses du même médicament, et intervention psychosociale, pour prendre en charge la phase de sevrage aiguë de l'opium sur une durée maximale de 30 jours.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standard attendues par Cochrane.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 13 essais impliquant 1096 participants. Aucune analyse groupée n'a été possible. Les études ont été menées dans trois pays : l'Iran, l'Inde et la Thaïlande, en consultation externe et en milieu hospitalier. Les résultats constatés étaient généralement très peu probants.

Lorsque la moyenne des symptômes de sevrage a été fournie sur plusieurs jours, nous nous sommes surtout concentrés sur le troisième jour. Cela s'explique par le fait que les symptômes liés au sevrage de l'opium sont plus sévères entre le deuxième et le quatrième jour.

En comparant différents traitements pharmacologiques, la clonidine s’est avérée deux fois plus efficace que la méthadone dans l’aboutissement du traitement (risque relatif (RR) de 2,01, intervalle de confiance à 95 % (IC) de 1,69 à 2,38 ; 361 participants, 1 étude, preuves de faible qualité). Tous les autres résultats n'ont montré aucune différence entre les médicaments étudiés : baclofène contre clonidine (RR 1,06, IC à 95 % 0,63 à 1,80 ; 66 participants, 1 étude, données probantes de très faible qualité) ; clonidine contre clonidine plus amantadine (RR 1,03, IC à 95 % 0,86 à 1,24 ; 69 participants, 1 étude) ; clonidine contre buprénorphine en milieu hospitalier (RR 1,04, IC à 95 % 0,90 à 1,20 ; 1 étude, 35 participants, données probantes de très faible qualité) ; méthadone contre tramadol (RR 0,95, IC à 95 % : 0,65 à 1,37 ; 1 étude, 72 participants, données probantes de très faible qualité) ; méthadone contre méthadone plus gabapentine (RR 1,17, IC à 95 % : 0,96 à 1,43 ; 1 étude, 40 participants, preuves de faible qualité) et teinture d'opium contre méthadone (1 étude, 74 participants, données probantes de faible qualité).

En comparant différents traitements pharmacologiques, l'ajout d'amantadine à la clonidine a réduit les scores de symptômes de sevrage calculés au jour 3 (différence moyenne (DM) -3,56, IC à 95 % -5,97 à -1,15 ; 1 étude, 60 participants, données probantes de très faible qualité). En comparant la clonidine à la buprénorphine en milieu hospitalier, nous n'avons constaté aucune différence dans les symptômes de sevrage évalués par un médecin (DM -1,40, IC à 95 % -2,93 à 0,13 ; 1 étude, 34 participants, données probantes de très faible qualité) et des résultats en faveur de la buprénorphine sur les symptômes évalués par des participants (DM -11,80, IC à 95 % -15,56 à -8,04). La buprénorphine s'est révélée supérieure à la clonidine dans le contrôle des symptômes de sevrage graves en consultation externe (RR 0,35, IC à 95 % : 0,19 à 0,64 ; 1 étude, 76 participants). Nous n'avons constaté aucune différence dans la comparaison entre la méthadone et le tramadol (DM 0,04, IC à 95 % : -2,68 à 2,76 ; 1 étude, 72 participants) et dans la comparaison entre la méthadone et la méthadone avec gabapentine (DM 2,20, IC à 95 % : -6,72 à 2,32 ; 1 étude, 40 participants).

En comparant la clonidine à la buprénorphine en consultation externe, on a observé plus d'effets indésirables dans le groupe clonidine (1 étude, 76 participants). Un plus grand nombre de participants du groupe clonidine ont souffert d'hypotension du 5e au 8e jour, de maux de tête du 1er au 8e jour, d’endormissement du 5e au 8e jour, d'étourdissements et de sécheresse buccale du 1er au 10e jour et de nausées du 1er au 9e jour. On a relevé une sudation chez un nombre significativement plus élevé de participants du groupe traité à la buprénorphine du 1e au 10e jour. Nous n'avons trouvé aucune différence entre les groupes pour toutes les autres comparaisons prenant en compte ce critère de jugement.

En comparant différentes doses du même traitement pharmacologique de désintoxication, une dose élevée de clonidine (1 à 1,2 mg/jour) ne différait pas d'une faible dose de clonidine (0,5 à 0,6 mg/jour) dans l’aboutissement du traitement en milieu hospitalier (RR 1,00, 95 % IC 0,84 à 1,19 ; 1 étude, 68 participants), mais un nombre supérieur de participants présentant une hypotension a été signalé dans le groupe suivant le traitement forte dose (RR 3,25, 95 % IC 1,77 à 5,98). La réduction graduelle de la méthadone a été associée à un plus grand nombre d'effets indésirables que le retrait soudain de la méthadone (RR 2,25, IC à 95 % 1.02 à 4.94 : 1 étude, 20 participants, données probantes de très faible qualité).

Notes de traduction: 

Post-édition : Déborah MOTTE - Révision : Maxence JURBERT (M2 ILTS, Université Paris Diderot)

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.