Réinjection ou élimination des résidus gastriques pour améliorer la croissance des prématurés

Problématique de la revue

La réinjection (donner à nouveau) des aspirations gastriques (lait partiellement digéré et hormones intestinales retirés de la sonde d'alimentation) chez les bébés prématurés favorise-t-elle la croissance sans causer de problèmes d'alimentation ?

Principaux messages

- Des données probantes limitées suggèrent que la réinjection des bébés prématurés ayant aspiré leur estomac pourrait avoir peu ou pas d'effet sur des critères de jugement importants tels que 

      - l'apparition d'une maladie intestinale grave qui provoque des lésions et la mort du tissu intestinal et pourrait entraîner un trou dans l'intestin du bébé prématuré (entérocolite nécrosante) ;

      - le temps de retrouver son poids de naissance ;

      - le temps de mettre en place une alimentation entérale complète (lait administré par voie orale ou par l'intermédiaire d'une sonde dans l'estomac ou l'intestin grêle) ;

      - le nombre de jours de nutrition parentérale totale (alimentation par voie veineuse) ; et

      - décès avant la sortie de l'hôpital.

- Les données probantes disponibles sont insuffisantes pour évaluer les bénéfices potentiels, ainsi que les risques éventuels, de la réinjection des bébés prématurés ayant aspiré leur estomac.

Contexte

Il est courant de surveiller les aspirations gastriques des prématurés nourris par sonde. L'alimentation par sonde signifie que le bébé est nourri à l'aide d'un petit tube souple placé dans son nez ou sa bouche et qui descend le long de sa gorge par le conduit alimentaire (œsophage) jusqu'à son estomac. Les aspirations gastriques du bébé sont contrôlés afin d'identifier une éventuelle intolérance alimentaire (difficulté à digérer les aliments) et une entérocolite nécrosante. Il n'y a pas d'accord sur la question de savoir s'il faut réinjecter ou jeter les aspirations d'estomac. La réinjection des aspirations gastriques pourrait remplacer le lait partiellement digéré et les hormones intestinales nécessaires à la maturité de l'intestin. Cependant, la réinjection d'aspirations anormaux pourrait entraîner des vomissements, une entérocolite nécrosante ou une infection. Nous avons recherché des données probantes issues d'essais cliniques visant à déterminer si la réinjection des aspirations gastriques était bénéfique ou néfaste pour les prématurés.

Que voulions-nous découvrir ?

Nous voulions savoir si la réinjection des aspirations gastriques était bénéfique ou néfaste pour les prématurés.

Comment avons-nous procédé ?

Nous avons recherché des études portant sur la réinjection des aspirations gastriques chez les prématurés. Nous avons comparé et résumé les résultats de ces études. Nous avons évalué notre confiance dans les données probantes, sur la base de facteurs tels que la taille de l'étude et les méthodes utilisées.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous n'avons trouvé qu'une seule petite étude portant sur 72 bébés prématurés qui s'est penchée sur cette question. La réinjection des aspirations gastriques pourrait avoir peu ou pas d'effet sur des critères de jugement importants tels que la survenue d'une entérocolite nécrosante, le décès avant la sortie de l'hôpital, le temps nécessaire à la mise en place d'une alimentation complète, le nombre de jours de nutrition parentérale totale et la prise de poids à l'hôpital. Nous n'avons pas trouvé d'informations sur d'autres critères de jugement.

Quelles sont les limites des données probantes ?

D'autres études sont nécessaires avant de pouvoir dire si la réinjection est bénéfique ou néfaste pour les prématurés.

Ces données probantes sont-elles à jour ?

La recherche est à jour en février 2022.

Conclusions des auteurs: 

Nous n'avons trouvé que des données limitées provenant d'un petit essai non masqué sur l'efficacité et la tolérance de la réinjection des résidus gastriques chez les prématurés. Des données probantes d’un niveau de confiance faible suggèrent que la réinjection des résidus gastriques pourrait avoir peu ou pas d'effet sur des critères de jugement cliniques importants tels que l'entérocolite nécrosante, la mortalité toutes causes confondues avant la sortie de l'hôpital, le temps nécessaire à la mise en place d'une alimentation entérale, le nombre de jours de nutrition parentérale totale et la prise de poids à l'hôpital. Un ECR de grande envergure est nécessaire pour évaluer l'efficacité et la tolérance de la réinjection des résidus gastriques chez les prématurés avec un niveau de confiance suffisant des données probantes pour informer les politiques et les pratiques.

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Contexte: 

La surveillance systématique des résidus gastriques chez les prématurés alimentés par sonde est une pratique courante dans les unités de soins intensifs néonatales, utilisée pour guider la mise en place et l'avancement de l'alimentation entérale. Il n'existe pas de consensus sur la question de savoir s'il faut réinjecter ou éliminer les résidus gastriques aspirés. Si la réinjection des résidus gastriques peut faciliter la digestion et favoriser la motilité et la maturation gastro-intestinales en remplaçant le lait partiellement digéré, les enzymes gastro-intestinales, les hormones et les substances trophiques, des résidus anormaux pourraient entraîner des vomissements, une entérocolite nécrosante ou une septicémie.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et la tolérance de la réinjection par rapport à l'élimination des résidus gastriques chez les prématurés. 

Stratégie de recherche documentaire: 

Des recherches ont été effectuées en février 2022 dans Cochrane CENTRAL via CRS, Ovid MEDLINE et Embase, et CINAHL. Nous avons également recherché dans les bases de données d'essais cliniques, les comptes rendus de conférences et les références bibliographiques des articles retrouvés des essais contrôlés randomisés (ECR) et des quasi-ECR.

Critères de sélection: 

Nous avons sélectionné des ECR comparant la réinjection à l'élimination des résidus gastriques chez les prématurés.

Recueil et analyse des données: 

Les auteurs de la revue ont évalué l'éligibilité des essais et le risque de biais et ont extrait les données, en double exemplaire. Nous avons analysé les effets du traitement dans les essais individuels et rapporté le risque relatif (RR) pour les données dichotomiques et la différence de moyennes (DM) pour les données continues, avec les intervalles de confiance (IC) à 95 % respectifs. Nous avons utilisé l'approche GRADE pour évaluer le niveau de confiance des données probantes.

Résultats principaux: 

Nous avons trouvé un essai éligible qui comprenait 72 prématurés. L'essai n'était pas masqué mais était par ailleurs de bonne qualité méthodologique.

La réinjection du résidu gastrique pourrait avoir peu ou pas d'effet sur le délai de reprise du poids de naissance (DM 0,40 jour, IC à 95 % -2,89 à 3,69 ; 59 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible), le risque d'entérocolite nécrosante de stade ≥ 2 ou de perforation intestinale spontanée (RR 0,71, IC à 95 % 0,25 à 2,04 ; 72 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible), la mortalité toutes causes confondues avant la sortie de l'hôpital (RR 0,50, IC à 95 % 0,14 à 1.85 ; 72 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible), le temps nécessaire à l'établissement d'une alimentation entérale ≥ 120 ml/kg/j (DM -1,30 jour, IC à 95 % -2,93 à 0,33 ; 59 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible), le nombre de jours de nutrition parentérale totale (DM -0,30 jour, IC à 95 % -2,07 à 1,47 ; 59 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible) et le risque de retard de croissance extra-utérin à la sortie de l'hôpital (RR 1,29, IC à 95 % 0,38 à 4,34 ; 59 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance faible). Nous ne sommes pas certains de l'effet de la réinjection du résidu gastrique sur le nombre d'épisodes d'interruption de l'alimentation d'une durée ≥ 12 heures (RR 0,80, IC à 95 % 0,42 à 1,52 ; 59 nourrissons ; données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Inès Belalem et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.