iStent pour le traitement du glaucome à angle ouvert

Objectif de la revue
L'objectif de cette revue Cochrane était de déterminer si l'implantation d'un ou de plusieurs dispositifs iStent ou iStent inject ("iStents") permet aux personnes atteintes de glaucome à angle ouvert d’éliminer le besoin de gouttes ophtalmiques comparativement aux traitements médicaux conventionnels, traitements chirurgicaux ou au laser. Les gouttes médicamentées contre le glaucome servent à contrôler la pression à l’intérieur de l’œil (la pression intraoculaire ou PIO). Nous avons également examiné le changement moyen dans le nombre de gouttes nécessaires pour maîtriser la PIO par rapport aux valeurs initiales, le changement moyen de la PIO par rapport aux valeurs initiales (c.-à-d. avant le traitement) et la qualité de vie liée à la santé telle que définie par les chercheurs des études. Nous avons examiné tous les critères de jugement à court terme (moins de six mois), à moyen terme (de six à ≤ 18 mois), à long terme (> 18 mois et ≤ 36 mois) et au-delà de 36 mois. Nous avons recueilli et analysé tous les essais contrôlés randomisés pertinents (ECR ; études cliniques dans lesquelles les participants sont répartis au hasard dans au moins deux groupes de traitement) pour répondre à cette question et nous avons trouvé sept ECR qui évaluaient les iStents.

Messages clés
Des données probantes de très faible qualité suggèrent que le traitement par iStent s’est possiblement traduit par une proportion plus élevée de personnes qui n’avaient plus besoin de gouttes à moyen terme ou qui éprouvaient un meilleur contrôle de leur PIO. Aucun des sept ECR n'a examiné la façon dont iStent affectait la qualité de vie et les déclarations sur les complications était très variable. À l'heure actuelle, les décisions relatives à la pratique clinique devraient être fondées sur le jugement du professionnel de santé et les préférences du patient, compte tenu de l'incohérence des résultats et du risque de biais dans les études pertinentes publiées à ce jour.

Qu'avons-nous examiné dans cette revue ?
Le glaucome représente un ensemble de maladies oculaires qui endommagent irréversiblement le nerf optique de l'œil. S'il n'est pas traité, le glaucome peut entraîner la cécité. Une PIO élevée est le seul facteur de risque modifiable connu du glaucome à angle ouvert, la forme de glaucome la plus courante. Les traitements conventionnels de premier choix pour le glaucome à angle ouvert comprennent les interventions médicales (p. ex. les gouttes médicamentées) ou au laser. La chirurgie, qui présente un profil de risque plus élevé, est offerte lorsque le glaucome progresse malgré un traitement médicamenteux ou au laser.

Les interventions chirurgicales mini-invasives pour le glaucome impliquent l'implantation de dispositifs tels que l'iStent. Ils ont été proposés comme une alternative plus sûre aux chirurgies anti-glaucomateuses conventionnelles chez les personnes atteintes de formes légères à modérées de glaucome à angle ouvert. L'iStent crée un pontage entre la chambre antérieure de l'œil et les voies de drainage naturelles. Ce pontage augmente le drainage du liquide à l’intérieur de l'œil, ce qui peut diminuer la PIO ainsi que la nécessité d'utiliser des gouttes médicamentées pour la contrôler.

Principaux résultats de la revue
Nous avons identifié quatre ECR dans lesquels les participants ont été randomisés pour recevoir un traitement par iStents en combinaison avec une chirurgie de la cataracte (appelée la phacoémulsification) ou par la phacoémulsification seule. De plus, nous avons identifié deux ECR dans lesquels on a randomisé les participants pour recevoir un traitement par iStents ou des interventions médicales. Nous avons également identifié un ECR dans lequel on a randomisé les participants pour recevoir un traitement comprenant soit un, deux ou trois iStents. Le fabricant de l'iStent a parrainé et financé tous les ECR examinés dans cette revue.

Nous avons constaté que des données probantes de faible qualité suggèrent que les participants ayant reçu un traitement par iStent en association avec une chirurgie de la cataracte étaient plus propices à ne plus avoir besoin de gouttes et qu'ils étaient plus susceptibles d’avoir subi une modeste réduction dans le nombre de gouttes quotidiennes nécessaires pour contrôler leur PIO à moyen terme, comparativement aux participants qui avaient subi une chirurgie de la cataracte seule ; cependant, il n'y avait aucune différence entre les deux groupes quant aux changements moyens de la PIO par rapport aux valeurs initiales.

En raison d’une hétérogénéité importante, nous n'avons pas effectué une analyse des deux études qui comparaient le traitement par iStent aux interventions médicales. Les chercheurs de ces deux études ont signalé qu'aucun participant du groupe ayant reçu des interventions médicales n’avait plus besoin de gouttes ophtalmiques après 12 mois, comparativement à plus de 90 % des participants dans les groupes de traitement par iStent. Les données suggèrent qu’un traitement comprenant deux ou trois iStents était possiblement plus efficace qu’un traitement par une seule iStent pour le contrôle de la PIO.

Aucune des sept études incluses dans cette revue n'a fourni des données sur la qualité de vie. En outre, les différences entre groupes en ce qui concerne les complications et les effets secondaires n’étaient pas claires, étant donné le peu d'événements signalés et l'efficacité variable du traitement.

La revue est-elle à jour ?
Nous avons recherché des études publiées jusqu'au 17 août 2018.

Conclusions des auteurs: 

Il existe des données probantes de très faible qualité qu’un traitement par iStent peut permettre à une plus grande proportion de participants d'éliminer leur besoin de gouttes ophtalmologiques ou de mieux contrôler leur PIO, à court, à moyen ou à long terme. Les résultats des 13 études en cours ou en attente de publication pourraient clarifier les effets bénéfiques du traitement par iStent. De plus, les études MIGS prochaines devraient envisager de mesurer la qualité de vie et les critères de jugement qui reflètent la capacité des gens à accomplir des activités qui dépendent de leur vision.

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Contexte: 

Le glaucome est l'une des principales causes de cécité irréversible dans le monde. Dans les premiers stades, le glaucome entraîne une perte progressive de la vision périphérique (latérale) ; dans les stades ultérieurs, il entraîne une perte de la vision centrale qui se termine par la cécité. Une pression intraoculaire élevée (PIO) est le seul facteur de risque modifiable connu du glaucome. Les techniques de chirurgie mini-invasive du glaucome (en anglais : Minimally invasive glaucoma surgical, MIGS), telles que le pontage trabéculaire ab interno avec iStent (Glaukos Corporation, Laguna Hills, CA, É.-U.), représentent un nouveau mode de traitement du glaucome. Cependant, l'efficacité des MIGS pour éliminer la nécessité d'utiliser des gouttes ophtalmiques pour le contrôle de la PIO est incertaine, tout comme d'autres critères de jugement.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et l'innocuité d'un pontage trabéculaire ab interno avec iStent (ou iStent inject) pour le glaucome à angle ouvert par rapport aux traitements médicaux, chirurgicaux ou au laser conventionnels.

Stratégie de recherche documentaire: 

Le spécialiste en information du groupe Cochrane sur l’ophtalmologie a effectué des recherches dans les bases de données suivantes le 17 août 2018 : le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) (qui contient le registre Cochrane des essais contrôlés en ophtalmologie ; 2018, numéro 7), MEDLINE Ovid, Embase Ovid, le registre ISRCTN, ClinicalTrials.gov et le Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Nous n'avons imposé aucune restriction quant à la date ou à la langue. Nous avons effectué une recherche dans les listes bibliographiques des études incluses.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) qui ont comparé l'iStent ou l’iStent inject au traitement médical, au traitement au laser, à la chirurgie anti-glaucomateuse conventionnelle (trabéculectomie) ou à d'autres procédures MIGS. Nous avons inclus les ECR qui ont comparé l’iStent ou l’iStent inject en association avec la phacoémulsification à la phacoémulsification seule.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standards définies par Cochrane. Deux auteurs de la revue ont examiné indépendamment les résultats de la recherche, évalué le risque de biais et extrait les données des ECR inclus à l'aide d'un formulaire électronique pour la collecte de données.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus sept ECR (765 yeux appartenant à 764 participants ; entre 33 à 239 participants par étude) qui ont évalué l’iStent chez des personnes atteintes de glaucome à angle ouvert. Nous avons également identifié 13 études en cours ou en attente de publication des résultats. La plupart des participants aux études incluses étaient des femmes (417/764; 55 %) et des personnes âgées (tranche d'âge : 49 à 89 ans). Nous avons évalué la plupart des essais cliniques comme étant peu clairs ou présentant un risque élevé de biais : quatre essais n'indiquaient pas clairement les détails de la méthode de randomisation ; cinq étaient des études ouvertes, non masquées, que nous avons évaluées comme présentant un risque élevé de biais de performance et de détection. Les sept essais ont tous été financés par l’entreprise Glaukos Corporation. Nous avons évalué la certitude des données probantes comme étant très faible.

Quatre ECR ont comparé l’iStent en association avec la phacoémulsification à la phacoémulsification seule. L'estimation combinée que nous avons tirée de deux des quatre ECR suggère que les participants du groupe traité par iStent en association avec phacoémulsification étaient 1,38 fois plus susceptibles que ceux ayant subit une phacoémulsification seule de ne plus avoir besoin de gouttes entre six et 18 mois après le traitement (risque relatif [RR] 1,38, intervalle de confiance [IC] à 95 % 1,18-1,63, I2 = 67 %). Les données de deux ECR suggèrent également qu’un traitement par iStent en association avec la phacoémulsification par rapport à la phacoémulsification seule a possiblement induit une légère réduction dans le nombre de gouttes nécessaires pour abaisser la PIO (différence moyenne (DM) -0,42 baisse, IC à 95 % -0,60 à -0,23). Il n'est pas certain qu'il y ait eu une différence en termes de réduction moyenne de la PIO par rapport au départ (aucune méta-analyse).

Deux ECR ont comparé le traitement par iStent au traitement médical ; l'un des deux essais a utilisé l’iStent inject. Nous avons déterminé que les deux essais étaient cliniquement et méthodologiquement hétérogènes et nous n’avons pas effectué de méta-analyse ; toutefois, les chercheurs des deux essais ont signalé que plus de 90 % des participants des groupes de traitement n'avaient plus besoin de gouttes ophtalmiques entre six et 18 mois après le traitement, comparativement à aucun participant des groupes de traitement médical.

Un ECR a comparé les résultats de traitement comprenant l'implantation de soit un, deux ou trois iStents. Il n'y avait pas de différence en ce qui a trait au nombre de participants qui n'avaient plus besoin de gouttes après 36 mois ou moins ; cependant, lors d'un suivi plus long (c.-à-d. après 42 mois), les participants traités par un seul iStent étaient moins susceptibles de ne plus avoir besoin de gouttes que ceux ayant reçu deux iStents (RR 0,51 ; IC à 95 %, 0,34 à 0,75) ou trois iStents (RR 0,49 ; IC à 95 %, 0,34 à 0,73). L'étude n'a pas signalé le changement moyen dans le nombre de gouttes ophtalmiques utilisées pour abaisser la PIO.

Le type et le moment des complications signalées variaient selon l’ECR. Des proportions semblables de participants qui ont subi un traitement par iStent en association avec une phacoémulsification et qui ont subi une phacoémulsification seule ont dû subir une chirurgie anti-glaucomateuse secondaire. Aucun ECR n'a fait état de résultats liés à la qualité de vie.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Dara O’Connor et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.