Interventions pour le traitement de la radionécrose cérébrale (dommages radio-induits) après un traitement par radiothérapie du cerveau

Contexte
Lorsque des tissus cérébraux meurent en réaction à la radiothérapie, on parle de radionécrose cérébrale. La radionécrose cérébrale peut endommager les capacités fonctionnelles du patient. Les conséquences dépendent de la zone cérébrale où la radionécrose est survenue et elle peut affecter la qualité de vie du patient. Il existe actuellement peu de traitements disponibles pour la radionécrose cérébrale. Les patients reçoivent généralement des anti-inflammatoires puissants (appelés corticostéroïdes) et certains patients peuvent nécessiter une intervention chirurgicale pour enlever la zone du cerveau qui présente une radionécrose. Des traitements plus efficaces pour cette nécrose sont nécessaires.

Caractéristiques de l’étude
Nous avons consulté, en octobre 2017, une liste de bases de données documentaires et de comptes rendus de conférences afin d'identifier les études qui évaluaient les traitements de la radionécrose cérébrale. Au total, trois études portant sur l’évaluation des médicaments ont été identifiées, dont deux seulement étaient des ECR, l'une ne comptant que 14 participants. Aucune étude portant sur l’évaluation des traitements non médicamenteux n'a été identifiée.

Résultats principaux
Dans cette revue, les deux médicaments comparés aux corticostéroïdes administrés seuls sont le bévacizumab (un médicament qui affecte les vaisseaux sanguins) et l'édaravone (un puissant antioxydant).

Une étude de très petite taille a rapporté que le bévacizumab améliorait l'apparence de la radionécrose en imagerie par résonance magnétique (IRM). Cette rémission s’est accompagnée d’une amélioration des symptômes neurologiques par rapport au traitement placebo. Cependant, elle a aussi eu de graves effets secondaires.

La combinaison édaravone et corticostéroïdes a amélioré l'apparence de la radionécrose à l'IRM, ce qui a été associé à une amélioration des symptômes signalés selon l'échelle LENT/SOMA. Cependant, le patient et l'équipe soignante connaissaient le traitement reçu par le patient, ce qui a peut être influencé les symptômes rapportés.

Aucune des études incluses n’a rapporté de critères de jugement relatifs à la qualité de vie ni de détails suffisants sur les besoins en corticostéroïdes.

Enfin, une étude non randomisée à deux bras opposant la vitamine E à l'absence de traitement actif et basée sur les préférences du patient a fait état d'une amélioration de la capacité d’apprentissage et de la mémoire, mais cette étude n’aborde pas l’imagerie. Dans cette étude, les résultats peuvent avoir été influencés par le fait que les patients ont choisi leur traitement, introduisant ainsi d'autres biais potentiels.

Niveau de certitude des preuves
D'après les résultats de cette revue, la certitude des données probantes disponibles est faible/très faible, ce qui limite notre capacité à déterminer les risques et les avantages des traitements évalués pour la radionécrose cérébrale. Les études risquaient d'être biaisées en raison de certains aspects de leur conception et/ou du nombre très limité de participants. Obtenir des données probantes de meilleure qualité dans le cadre d'essais contrôlés randomisés multicentriques de plus grande envergure sur les traitements de la radionécrose cérébrale est grandement nécessaire. Dans notre recherche documentaire pour cette revue, nous avons identifié deux ECR en cours, l'un évaluant le bévacizumab et l'autre évaluant l'oxygénothérapie hyperbare.

Conclusions des auteurs: 

Il n'existe pas de données probantes fiables permettant de quantifier les risques et les avantages des interventions pour le traitement de la radionécrose cérébrale après une radiothérapie ou une radiochirurgie. Dans un ECR de 14 patients, le bévacizumab a montré une réponse radiologique associée à une légère amélioration des facultés cognitives ou de la gravité des symptômes. Bien qu'il s'agisse d'un plan d’essai randomisé, la petite taille de l'échantillon limite la qualité des données. Un essai portant sur le traitement édaravone plus corticostéroïdes comparé à un traitement avec des corticostéroïdes seuls a fait état d'une réduction plus importante de l'œdème environnant avec un traitement combiné, mais sans effet sur la lésion radionécrosique qui l'aggrave. En raison du plan ouvert et des intervalles de confiance importants dans les résultats, la qualité de ces données était également faible. Aucune preuve pouvant appuyer les interventions non pharmacologiques pour le traitement de la radionécrose n’a été rapportée. D'autres études randomisées prospectives sur les interventions pharmacologiques et non pharmacologiques sont nécessaires afin de fournir des preuves plus solides. Deux ECR en cours ont été identifiés : l'un évaluant le bévacizumab et l'autre l'oxygénothérapie hyperbare.

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Contexte: 

La radionécrose cérébrale (mort des tissus causée par la radiation) peut survenir à la suite d'une radiothérapie à forte dose dans le tissu cérébral et peut avoir un impact significatif sur la qualité de vie (QdV) et les capacités fonctionnelles d'une personne. Le mécanisme physiopathologique sous-jacent de cette affection reste incertain et rend difficile la mise au point de traitements efficaces.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité des interventions utilisées pour le traitement de la radionécrose cérébrale chez les adultes de plus de 18 ans.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons fait des recherches, en octobre 2017, dans le Registre des essais contrôlés Cochrane (CENTRAL), dans MEDLINE, EMBASE et dans l’Index cumulé de la littérature en soins infirmiers et apparentés (CINAHL) pour trouver des études admissibles. Nous avons également recherché des données non publiées par le biais du Physicians Data Query, www.controlled-trials.com/rct, www.clinicaltrials.gov et www.cancer.gov/clinicaltrials pour les essais en cours et nous avons fait des recherches manuelles dans des actes de conférence pertinents.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus les essais contrôlés randomisés (ECR) de toute intervention visant à traiter la radionécrose cérébrale chez des adultes de plus de 18 ans ayant déjà été traités par radiothérapie du cerveau. Nous savions que nous allions trouver peu d'essais contrôlés randomisés, c’est pour cela que nous avions également prévu d’inclure tous les essais comparatifs d'intervention prospectifs et les essais quasi-randomisés d'interventions pour la radionécrose cérébrale chez les adultes, du moment que ces études avaient un groupe témoin reflétant la norme de soins (c'est-à-dire placebos ou corticoïdes). Pour les études non randomisées incluses, le biais de sélection pouvait poser problème, c’est pour cette raison que les résultats ont été interprétés avec prudence.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue (CC, PB) ont extrait indépendamment des données des études choisies et ont effectué une évaluation du « risque de biais ». Pour les critères de jugement dichotomiques, le rapport des cotes (RC) pour le critère de jugement d'intérêt a été rapporté. Pour les critères de jugement continus, l'effet du traitement a été rapporté sous forme de différence moyenne (DM) entre les bras de traitement avec des intervalles de confiance (IC) à 95 %.

Résultats principaux: 

Deux ECR et une étude prospective non randomisée évaluant les interventions pharmacologiques répondaient aux critères d'inclusion de cette revue. Il n’a pas été possible de réaliser une méta-analyse, étant donné que chaque étude évaluait un médicament ou une intervention différents à l'aide de critères d'évaluation différents. Aucun essai d'interventions non pharmacologiques ne répondait aux critères d'inclusion.

Un essai randomisé de très petite taille, à double insu, contrôlé contre placebo, portant sur un traitement au bévacizumab par rapport à un traitement placebo, a rapporté que 100 % (7/7) des participants avec un traitement au bévacizumab ont présenté une réduction d'au moins 25 % de l'œdème cérébral et une réduction des rehaussements après injection de gadolinium, alors que tous ceux recevant le placebo ont vu leur état clinique ou radiologique se dégrader ou les deux à la fois. Il s'agit là d'un résultat encourageant, mais en raison de la petite taille de l'échantillon, nous n'avons pas signalé d'effet relatif. Les auteurs n'ont pas non plus fourni suffisamment de détails sur les procédures de randomisation et d'insu de l’étude. Par conséquent, le degré de certitude de ces preuves est faible et un ECR plus large respectant les normes de déclaration est nécessaire.

Un ECR ouvert a démontré une réduction plus importante de l'œdème cérébral (hyperintensité T2) dans le groupe traité avec de l'édaravone et des corticostéroïdes que dans le groupe traité par des corticostéroïdes seuls (DM de 3,03 (IC à 95 % : 0,14-5,92 ; preuve peu probante en raison du risque élevé de biais et du manque de précision). Bien que le résultat soit proche du seuil de significativité, aucune différence importante dans la réduction des rehaussements après injection de gadolinium entre bras (DM = 0,47 ; IC à 95 % : 0,80-1,74 ; faible certitude en raison du risque élevé de biais et du manque de précision) n’a été notée.

Dans l'ECR comparant le traitement au bévacizumab et le traitement placebo, une amélioration neurologique a été rapportée chez les sept participants recevant du bévacizumab, tandis que cinq des sept participants recevant un placebo présentaient une détérioration neurologique (preuve très peu probante en raison de la petite taille de l'échantillon et des préoccupations concernant la validité des analyses). Bien qu'aucun effet indésirable n'ait été observé avec le placebo, trois effets indésirables graves ont été observés avec le bévacizumab, notamment une pneumonie par aspiration, une embolie pulmonaire et une thrombose supérieure du sinus sagittal. Dans l'ECR portant sur le traitement avec corticostéroïdes avec ou sans édaravone, les participants ayant reçu le traitement corticostéroïdes-édaravone présentaient une amélioration clinique significativement supérieure au traitement avec des corticostéroïdes seuls selon l'échelle LENT/SOMA (RC = 2,51, IC à 95 % : 1,26 à 5,01 ; faible certitude en raison du modèle ouvert). Aucune différence n'a été observée entre les bras en ce qui concerne la toxicité du traitement.

Une étude prospective non randomisée portant sur l’utilisation de l'alpha-tocophérol (vitamine E) par rapport à l'absence de traitement actif a été trouvée, mais elle n’incluait pas d'évaluation radiologique. Comme une seule des études incluses était un essai contrôlé randomisé à double insu, les autres études étaient sujettes à un biais de sélection et de détection.

Aucune des études incluses n’a rapporté de critères de jugement relatifs à la qualité de vie ni de détails suffisants sur les besoins en corticostéroïdes.

Un nombre limité d'études prospectives ont été identifiées, puis exclues par la suite, car ces études ont évalué différentes interventions pharmacologiques à l'aide de critères d'évaluation variables chez un nombre limité de participants.

Notes de traduction: 

Post-édition : Chloé Richir - Révision : Chama Chellaoui (M2 ILTS, Université Paris Diderot)

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.