Héparine dans la procréation assistée

Question de la revue

Les chercheurs de la Cochrane Collaboration ont passé en revue les preuves concernant l'effet de l'administration d'héparine autour du moment de l'implantation, comparée à un placebo ou à l'absence de traitement, sur les résultats cliniques chez les femmes hypofertiles bénéficiant d'une technologie de procréation assistée.Ils ont trouvé trois essais contrôlés randomisés.

Contexte

L'héparine est un médicament appartenant à la classe des médicaments anticoagulants qui sont utilisés dans la prévention et le traitement des caillots sanguins. Il a été suggéré que l'héparine pourrait améliorer l'environnement intra-utérin en augmentant les facteurs de croissance afin de renforcer la fixation de l'embryon à la paroi de l'utérus. Le résultat pourrait être une amélioration des taux de grossesse lors de la procréation assistée. 

Caractéristiques des études

Trois études impliquant 386 participantes ont été incluses dans la revue. Toutes les études ont inclus des femmes hypofertiles bénéficiant d'une procédure de procréation assistée. Les caractéristiques des participantes étaient différentes entre les études. Une étude a inclus des femmes ayant suivi leur premier cycle de FIV, sans aucun trouble de la coagulation. Une autre étude a inclus des femmes ayant présenté au moins un trouble de la coagulation. La troisième étude a inclus des femmes ayant suivi au moins deux précédents cycles de procréation assistée sans résultat. L'héparine de faible poids moléculaire (en injections quotidiennes) a été administrée à des femmes à compter du moment du prélèvement de l'œuf ou du transfert de l'embryon au cours de la procédure de procréation assistée dans les trois études. Il n'y avait aucun problème lié à la source de financement dans aucune des études. Cette recherche est à jour jusqu'à mai 2013.

Résultats principaux

Les résultats de cette revue Cochrane ont mis en évidence des preuves suggérant que l'héparine est susceptible d'augmenter les naissances vivantes et les grossesses cliniques. Toutefois, ces observations doivent être interprétées avec prudence puisque, lorsque les auteurs de la revue ont vérifié l'effet de l'utilisation d'une autre méthode d'analyse possible, les résultats n'étaient plus statistiquement significatifs. De surcroît, la qualité des preuves issues des essais était médiocre, l'héparine a eu des effets secondaires tels que ecchymoses et saignements, et son innocuité à long terme n'a pas été établie. Les preuves ne justifient pas l'utilisation de l'héparine en dehors des essais de recherche clinique bien conçus. De tels essais sont une priorité.

Qualité des preuves

La qualité des preuves était très faible étant donné le petit nombre d'études impliquant des populations de femmes hypofertiles différentes, et l'incohérence des résultats obtenus en utilisant des analyses et des tests statistiques différents. Nous suggérons donc qu'il est nécessaire de réaliser d'autres études contrôlées randomisées bien conçues pour clarifier le rôle possible de l'héparine dans la procréation assistée.

Conclusions des auteurs: 

Les résultats de cette revue Cochrane de trois essais contrôlés randomisés avec un effectif total de 386 femmes ont suggéré que l'héparine de faible poids moléculaire (LMWH) péri-implantation au cours des cycles de procréation assistée est susceptible d'améliorer le taux de naissances vivantes chez les femmes bénéficiant d'une procédure de procréation assistée. Toutefois, ces résultats dépendaient d'un petit nombre d'études fournissant des données de faible qualité et ayant une hétérogénéité considérable, et ont été sensibles au modèle statistique choisi. Des effets secondaires ont été signalés avec l'utilisation d'héparine, incluant des ecchymoses et des saignements, et aucune donnée fiable sur les effets à long terme n'a été rapportée. Les résultats ne justifient pas cette utilisation de l'héparine en dehors des essais de recherche clinique bien conçus.

Ces observations doivent être davantage approfondies en réalisant des essais contrôlés contre placebo, randomisés, multicentriques, en double aveugle, d'une puissance suffisante et bien conçus. Des investigations supplémentaires pourraient aussi se consacrer aux effets de l'application locale (utérine) et non systémique d'héparine au cours d'une procédure de procréation assistée.

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Contexte: 

L'héparine comme thérapie d'appoint dans la procréation assistée (héparine péri-implantation) est administrée pendant ou après le prélèvement de l'œuf ou le transfert de l'embryon au cours de la procédure de procréation assistée. L'héparine a été préconisée pour améliorer l'implantation de l'embryon et les résultats cliniques.  Il a été proposé l'hypothèse selon laquelle l'héparine renforce l'environnement intra-utérin en améliorant la décidualisation avec l'activation associée des facteurs de croissance et un profil d'expression de cytokines dans l'endomètre qui est favorable à la grossesse.

Objectifs: 

Évaluer si l'administration d'héparine autour du moment de l'implantation (héparine péri-implantation) améliore les résultats cliniques chez les femmes hypofertiles bénéficiant d'une procédure de procréation assistée.

Stratégie de recherche documentaire: 

Une stratégie de recherche complète et approfondie a été développée en concertation avec le coordinateur de recherche d'essais du groupe Cochrane sur les troubles menstruels et de la fertilité (MDSG). La stratégie a été utilisée dans l'optique d'identifier toutes les études pertinentes indépendamment de la langue ou du statut de publication (publiée, non publiée, sous presse et en cours). Les essais pertinents ont été identifiés à la fois dans les bases de données électroniques et d'autres ressources (dernière recherche effectuée le 06.05.13).

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tous les essais contrôlés randomisés (ECR) dans lesquels l'héparine péri-implantation a été administrée au cours de la procédure de procréation assistée. L'héparine de faible poids moléculaire (LMWH) péri-implantation au cours des procédures de FIV/IICS a été administrée pendant ou après le prélèvement de l'œuf ou pendant le transfert de l'embryon dans les études incluses. Le principal critère de jugement était le taux de naissances vivantes par femme.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont, de manière indépendante, évalué l'éligibilité et la qualité méthodologique des essais et extrait les données pertinentes. La qualité des données a été évaluée au moyen de l'échelle GRADE.

Résultats principaux: 

Trois ECR (impliquant 386 femmes) ont été inclus dans cette revue.

L'administration d'héparine de faible poids moléculaire (LMWH) péri-implantation au cours de la procédure de procréation assistée a été associée à une amélioration significative du taux de naissances vivantes comparée à un placebo ou à l'absence de LMWH (odds ratio (OR) 1,77, intervalle de confiance (IC) à 95 % 1,07 à 2,90, trois études, 386 femmes, I2 = 51 %, données de très faible qualité avec une importante hétérogénéité). Nous avons également constaté une amélioration significative du taux de grossesses cliniques avec l'utilisation de LMWH (OR 1,61, IC à 95 % 1,03 à 2,53, trois études, 386 femmes, I2 = 29 %, données de très faible qualité avec une importante hétérogénéité).

Toutefois, ces résultats doivent être interprétés avec une extrême prudence puisqu'ils dépendent de la méthode d'analyse statistique choisie : ils n'étaient plus statistiquement significatifs lorsque nous avons utilisé un modèle à effets aléatoires.

La méthode de notification des événements indésirables était insuffisante dans toutes les études incluses, ne fournissant aucune donnée comparative. Mais l'héparine de faible poids moléculaire (LMWH) a néanmoins provoqué des effets indésirables incluant notamment les suivants : contusions, ecchymoses, saignements, thrombocytopénie et réactions allergiques. Il semble que ces effets indésirables ont été majorés avec l'utilisation du traitement par héparine pendant une période plus longue.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.