Caféine pour la prévention des blessures et des erreurs chez les travailleurs faisant les trois-huit

La somnolence entraîne une baisse des performances et est associée à un risque accru d'erreurs et de blessures. Le travail posté (trois-huit) est une cause majeure de somnolence car il oblige les travailleurs à être éveillés à des heures qui ne correspondent pas à leur horloge biologique. Cela peut compromettre leur sécurité et celle des autres, et l'on sait que la somnolence est un facteur de risque d'événements tels que des accidents de la route, des accidents du travail et des erreurs médicales.

L'identification des interventions permettant de réduire le risque d'erreurs et de blessures est nécessaire pour garantir la sécurité des personnes tenues de travailler de nuit. Il a été suggéré que la caféine pourrait être une intervention potentiellement utile, mais son efficacité n'est pas établie chez les travailleurs faisant les trois-huit.

Dans cette revue systématique, les auteurs ont recherché des essais contrôlés randomisés examinant les effets de la caféine sur les blessures, les erreurs et les performances cognitives des travailleurs faisant les trois-huit. 13 essais ont été identifiés. Aucun n'examinait les effets de l'intervention sur les blessures, deux mesuraient les erreurs, tandis que les autres utilisaient des tests neuropsychologiques pour évaluer les performances cognitives.

Les résultats des essais suggèrent que, par rapport à l'absence d'intervention, la caféine peut réduire le nombre d'erreurs et améliorer les performances cognitives des travailleurs faisant les trois-huit. Aucune différence n'était observée en termes d'effets entre la caféine et d'autres interventions (telles qu'une sieste, une forte luminosité et du modafinil). Néanmoins, ces résultats doivent être interprétés avec précaution en raison des faiblesses méthodologiques des essais.

Les auteurs de cette revue systématique en concluent que la caféine pourrait être une intervention efficace pour améliorer les performances des travailleurs faisant les trois-huit, mais aucun essai ne permet d'évaluer ses effets sur les blessures. Sur la base des preuves actuellement disponibles, les auteurs de revue considèrent qu'il n'existe aucune raison pour que les travailleurs en bonne santé qui font les trois-huit et utilisent déjà de la caféine aux doses recommandées pour améliorer leur vigilance cessent de le faire. Les auteurs considèrent que d'autres essais seraient utiles pour évaluer les effets de la caféine par rapport à d'autres mesures de prévention potentielles.

Conclusions des auteurs: 

La caféine pourrait être une intervention efficace pour améliorer les performances des travailleurs faisant les trois-huit, mais aucun essai ne permet d'évaluer ses effets sur les blessures. Les résultats sont principalement issus d'études portant sur des participants jeunes dans des conditions simulées, et l'on ignore s'ils sont généralisables au cas de travailleurs plus âgés dans des conditions réelles de travail posté. Sur la base des preuves actuellement disponibles, rien ne permet de déconseiller aux individus en bonne santé qui utilisent déjà de la caféine aux doses recommandées pour améliorer leur vigilance de continuer à le faire. Les futures recherches devraient s'attacher à évaluer les effets relatifs de la caféine par rapport à d'autres mesures de prévention potentielles.

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Contexte: 

La somnolence entraîne une baisse des performances et de l'attention, et est associée à un risque accru de blessures. Les syndromes du décalage horaire et du travail posté sont des troubles du rythme circadien qui entraînent une somnolence pouvant accroître le risque de blessures. Ce type d'organisation du travail exige des travailleurs qu'ils soient opérationnels à des heures qui ne correspondent pas à leurs rythmes circadiens. Par conséquent, des interventions sont également nécessaires pour s'assurer que ces personnes puissent travailler en toute sécurité. La caféine pourrait potentiellement être utile pour stimuler la vigilance en état de veille chez les personnes atteintes d'un syndrome du décalage horaire ou du travail posté, mais ses effets sur les blessures et les erreurs ne sont pas clairement établis.

Objectifs: 

Évaluer les effets de la caféine dans la prévention des blessures dues à baisse de la vigilance chez les personnes atteintes d'un syndrome du décalage horaire ou du travail posté.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons consulté le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les blessures, CENTRAL (Bibliothèque Cochrane), MEDLINE, EMBASE, PsycINFO, CINAHL, TRANSPORT (jusqu'en juillet 2008) ; et PubMed (jusqu'en avril 2010). Nous avons également consulté Internet et examiné les références bibliographiques des articles pertinents.

Critères de sélection: 

Les essais contrôlés randomisés examinant les effets de la caféine sur les blessures, les erreurs ou les performances cognitives des personnes atteintes d'un syndrome du décalage horaire ou du travail posté.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs ont examiné les résultats des recherches et évalué le texte intégral des études en vue de l'inclusion de manière indépendante. Les données ont été extraites et le risque de biais a été évalué. Les estimations de l'effet thérapeutique (rapport des cotes et différence moyenne standardisée (DMS)) et les intervalles de confiance (IC) à 95 % ont été calculés et combinés à l'aide d'un modèle à effets fixes.

Résultats principaux: 

Treize essais ont été inclus. Aucun ne mesurait le critère de jugement des blessures. Deux essais mesuraient les erreurs, et les autres utilisaient des tests neuropsychologiques pour évaluer les performances cognitives. Les essais évaluant l'impact de l'intervention sur les erreurs rapportaient que la caféine entraînait une réduction significative du nombre d'erreurs par rapport au placebo. Les estimations combinées de l'effet sur les performances par domaine cognitif suggéraient que, par rapport au placebo, la caféine améliorait la formation de concepts et le raisonnement (DMS de -0,41 ; IC à 95 %, entre -1,04 et 0,23), la mémoire (DMS de -1,08 ; IC à 95 %, entre -2,07 et -0,09), l'orientation et l'attention (DMS de -0,55 ; IC à 95 %, entre -0,83 et -0,27) et la perception (DMS de -0,77 ; IC à 95% entre -1,73 et 0,20) ; mais qu'elle n'avait aucun effet bénéfique sur le fonctionnement verbal et les compétences linguistiques (DMS de 0,18 ; IC à 95% entre -0,50 et 0,87). Un essai comparant les effets de la caféine par rapport à une sieste observait qu'un nombre significativement inférieur d'erreurs se produisaient dans le groupe de la caféine. Les autres essais comparant la caféine à d'autres interventions actives (telles qu'une sieste, une forte luminosité ou du modafinil) ne rapportaient aucune différence significative. Il existe un risque de biais élevé lié à une assignation secrète inadéquate et à une documentation sélective des critères de jugement dans les essais.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.