Anti-VEGF pour la prévention des complications après vitrectomie pour la rétinopathie diabétique proliférante

Pourquoi cette question est-elle importante ?

La rétinopathie diabétique proliférante (RDP) est le stade le plus avancé de la rétinopathie diabétique, une complication du diabète. Elle est causée par de nouveaux vaisseaux sanguins anormaux qui se développent sur la rétine, la couche sensible à la lumière située à l'arrière de l'œil. La vitrectomie par la pars plana est un traitement chirurgical reconnu pour les complications de la RDP. Au cours de cette opération, la substance gélatineuse qui se trouve à l'intérieur de l'œil, appelée le vitré, est retirée. La raison la plus fréquente de pratiquer une vitrectomie est l'hémorragie vitréenne qui ne se résorbe pas, c'est-à-dire une hémorragie dans la partie interne de l'œil appelée cavité vitréenne. Lorsque cela se produit, le vitré perd de sa transparence et la lumière ne peut plus le traverser, ce qui entraîne une perte de vision. Les agents anti-facteur de croissance endothéliale vasculaire (anti-VEGF) sont des médicaments qui, injectés à l'intérieur de l'œil, peuvent stopper la croissance de ces vaisseaux sanguins anormaux et contrôler les fuites de sang. L'injection d'agents anti-VEGF avant la vitrectomie pour les complications de la RDP pourrait faciliter l'opération, réduire les saignements intra- et postopératoires et améliorer les critères de jugement. Cependant, il n'existe pas de données probantes sur les différents types d'agents anti-VEGF, le meilleur moment pour les utiliser ou leur effet sur d'autres critères de jugement. Nous avons examiné les recherches publiées pour déterminer si les injections d'anti-VEGF au moment de l'intervention chirurgicale ont un effet sur les critères de jugement de la vitrectomie pour le traitement des complications de la RDP.

Que voulions-nous découvrir ?

Nous avons voulu savoir si l'utilisation supplémentaire d'agents anti-VEGF avant ou pendant la vitrectomie diabétique était meilleure que la vitrectomie diabétique seule en termes d'efficacité :

- critères de jugement visuels;
- l'incidence de la d'hémorragie postopératoire précoce dans la cavité vitréenne [postoperative vitreous cavity haemorrhage (POVCH)] précoce et tardive ;
- l'incidence de la chirurgie de révision pour POVCH dans les six premiers mois postopératoires ;
- l'incidence de la chirurgie de révision pour une traction récurrente/un froncement maculaire (altération structurelle de la macula, la partie de l'œil qui est responsable de la vision centrale nette, entraînant ainsi un déclin de la fonction visuelle) dans les six premiers mois postopératoires ;
- des mesures de la qualité de vie liée à la vision ;
- proportion de personnes ayant une mauvaise acuité visuelle (compter les doigts ou moins) ;
- le nombre de ruptures rétiniennes peropératoires (déchirures de la couche sensible à la lumière de l'œil) ;
- fréquence du tamponnement à l'huile de silicone (un agent de tamponnement utilisé pour pousser la rétine vers la paroi de l'œil et la maintenir stable). 

Comment avons-nous procédé ?

Nous avons recherché des études comparant tout anti-VEGF combiné à une vitrectomie par rapport à une vitrectomie sans anti-VEGF ou avec un traitement factice ou avec tout autre anti-VEGF chez des personnes subissant une vitrectomie pour les complications de la RDP. Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué le niveau de confiance des données probantes en fonction de facteurs tels que les méthodes et la taille des études.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous avons trouvé 28 études portant sur 1914 yeux ayant subi une vitrectomie pour des complications de la rétinopathie diabétique proliférante. La taille des échantillons varie de 20 à 214 participants. Les études provenaient de Chine (11), d'Iran (3), d'Italie (2) et du Mexique (2), et les autres études provenaient de Corée du Sud, du Royaume-Uni, d'Égypte, du Brésil, du Japon, du Canada, des États-Unis, d'Indonésie et du Pakistan. L'une des études était multicentrique et comprenait 13 sites cliniques dans neuf pays. Deux études ont déclaré avoir reçu un financement du fabricant du médicament anti-VEGF étudié. 

Principaux résultats 

L'utilisation supplémentaire d'anti-VEGFs dans la vitrectomie diabétique pourrait améliorer les critères de jugement visuels à six mois postopératoires. Leur utilisation réduit également le risque de POVCH tardive et probablement le risque de POVCH précoce. Les anti-VEGF réduisent les ruptures rétiniennes peropératoires et pourraient réduire la nécessité d'un tamponnement à l'huile de silicone.

L'utilisation d'anti-VEGF entraîne probablement un besoin moindre de vitrectomie de révision pour la POVCH, et pourrait réduire le besoin de chirurgie de révision pour une traction récurrente et/ou un décollement de la rétine.

Nous n'avons trouvé aucune étude permettant de répondre à notre question sur la qualité de vie et la proportion de personnes dont l'acuité visuelle est inférieure ou égale pour pouvoir compter les doigts.

Quelles sont les limites des données probantes ?

Nous sommes convaincus que les injections d'anti-VEGF réduisent l'incidence de la POVCH tardive et des ruptures rétiniennes peropératoires (données probantes d’un niveau de confiance élevé), assez certains qu'elles réduisent l'incidence de la POVCH précoce et la nécessité d'une reprise chirurgicale pour la POVCH (données probantes d’un niveau de confiance modéré), mais moins certains des effets sur les critères de jugement visuels, la reprise chirurgicale pour le décollement de la rétine et l'utilisation d'huile de silicone (données probantes d’un niveau de confiance faible).

Ces données probantes sont-elles à jour ?

Cette revue met à jour notre revue précédente. Les données probantes sont à jour jusqu'au 22 juin 2022.

Conclusions des auteurs: 

L'utilisation périopératoire d'agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF) réduit le risque d'hémorragie postopératoire précoce dans la cavité vitréenne [postoperative vitreous cavity haemorrhage (POVCH)] tardive, entraîne probablement une diminution du risque de POVCH précoce et pourrait améliorer les critères de jugement. Ils réduisent également l'incidence des ruptures rétiniennes peropératoires. Les données probantes sont très incertaines quant à leur effet sur la nécessité d'un tamponnement à l'huile de silicone. Les complications liées à leur utilisation semblent peu nombreuses. Un accord sur les variables incluses et la standardisation des critères de jugement sont nécessaires dans les essais étudiant la vitrectomie pour la rétinopathie diabétique proliférante.

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Contexte: 

La vitrectomie est un traitement reconnu des complications de la rétinopathie diabétique proliférante (RDP). Cependant, un certain nombre de complications peuvent survenir pendant et après la vitrectomie pour la RDP. Il s'agit notamment de saignements et de la création de trous rétiniens pendant l'opération, ainsi que de saignements, de décollement de la rétine et de tissu cicatriciel sur la rétine après l'opération. Ces complications peuvent limiter la vision, nécessiter une nouvelle intervention chirurgicale et retarder la guérison. L'utilisation d'agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF) injectés dans l'œil avant l'opération a été proposée pour réduire la survenue de ces complications. Les agents anti-VEGF peuvent réduire la quantité et la vascularisation des nouveaux vaisseaux anormaux associés à la RDP, facilitant ainsi leur dissection pendant l'opération, réduisant les saignements intra- et postopératoires et améliorant potentiellement les critères de jugement.

Objectifs: 

Évaluer les effets de l'utilisation périopératoire d'anti-VEGF sur les critères de jugement de la vitrectomie pour le traitement des complications de la rétinopathie diabétique proliférante (RDP).

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL ; qui contient le registre Cochrane des essais sur les yeux et la vision ; 2022, numéro 6) ; Ovid MEDLINE ; Ovid Embase ; le registre ISRCTN ; ClinicalTrials.gov et l'ICTRP de l'OMS. La date de la recherche était le 22 juin 2022.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) qui ont examiné l'utilisation des anti-VEGF et l'incidence des complications chez les personnes subissant une vitrectomie pour la RDP.  

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont évalué et extrait les données de manière indépendante. Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standard définies par Cochrane.

Les critères de jugement principaux de la revue étaient la différence moyenne de la meilleure acuité visuelle corrigée (MAVC) entre les groupes d'étude à six (± trois) mois après la vitrectomie primaire, l'incidence de l'hémorragie postopératoire précoce dans la cavité vitréenne [postoperative vitreous cavity haemorrhage (POVCH)], (dans les quatre semaines suivant l'opération), l'incidence de la POVCH tardive (survenant plus de quatre semaines après l'opération), l'incidence de la chirurgie de révision pour la POVCH dans les six mois, l'incidence de la chirurgie de révision pour une traction récurrente/une membrane épirétinienne de tout type et/ou un décollement de la rétine rhegmatogène dans les six mois et les mesures de la qualité de vie liée à la vision (QVLV). Les critères de jugement importants comprenaient la proportion de personnes ayant une acuité visuelle permettant de compter les doigts (1,8 logMAR ou pire), le nombre de ruptures rétiniennes opératoires signalées et la fréquence du tamponnement à l'huile de silicone nécessaire au moment de l'intervention chirurgicale.

Résultats principaux: 

La présente revue comprend 28 ECR qui ont examiné l'utilisation pré ou peropératoire d'anti-VEGF intravitréens pour améliorer les critères de jugement de la vitrectomie par la pars plana pour les complications de la RDP. Les études ont été menées dans différents pays (11 en Chine, 3 en Iran, 2 en Italie, 2 au Mexique et les autres en Corée du Sud, au Royaume-Uni, en Égypte, au Brésil, au Japon, au Canada, aux États-Unis, en Indonésie et au Pakistan). Les critères d'inclusion dans les études étaient les complications bien connues de la rétinopathie proliférante : hémorragie du vitré ne se résorbant pas, décollement de rétine tractionnel impliquant la macula ou décollement rhegmatogène tractionnel combiné. Les études incluses ont randomisé un total de 1914 yeux. 

Nous avons identifié des problèmes méthodologiques dans toutes les études incluses. Le risque de biais était le plus élevé pour la mise en aveugle des participants et des investigateurs, et un certain nombre d'études manquaient de clarté dans la description des méthodes de randomisation et de l'attribution des séquences.

Les participants recevant un anti-VEGF intravitréen en plus d'une vitrectomie par la pars plana ont obtenu une meilleure MAVC à six mois par rapport aux personnes subissant une vitrectomie seule (différence de moyennes (DM) -0,25 logMAR, intervalle de confiance (IC) à 95 % -0,39 à -0,11 ; 13 études, 699 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Les anti-VEGF pré- ou peropératoires ont réduit l'incidence de la POVCH précoce (12 % contre 31 %, risque relatif (RR) 0,44, IC à 95 % 0,34 à 0,58 ; 14 études, 1038 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance modéré).

L'utilisation périopératoire d'anti-VEGF a également été associée à une réduction de l'incidence de la POVCH tardive (10 % par rapport à 23 %, RR 0,47, IC à 95 % 0,30 à 0,74 ; 11 études, 579 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance élevé).

La nécessité d'une reprise chirurgicale pour POVCH a été moins fréquente dans le groupe anti-VEGF que dans le groupe témoin, mais les intervalles de confiance étaient larges et compatibles avec l'absence d'effet (4 % contre 13 %, RR 0,44, IC à 95 % 0,15 à 1,28 ; 4 études 207 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance modéré). Des effets similaires, mesurés de manière imprécise, ont été observés pour la reprise chirurgicale en cas de décollement de la rétine rhegmatogène (5 % par rapport à 11 %, RR 0,50, IC à 95 % 0,15 à 1,66 ; 4 études, 145 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance faible). 

Les anti-VEGF réduisent l'incidence des ruptures rétiniennes peropératoires (12 % contre 31 %, RR 0,37, IC à 95 % 0,24 à 0,59 ; 12 études, 915 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance élevé) et la nécessité d'utiliser de l'huile de silicone (19 % contre 41 %, RR 0,46, IC à 95 % 0,27 à 0,80 ; 10 études, 591 yeux ; données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Aucune donnée n'était disponible sur les critères de jugement de la qualité de vie ou sur la proportion de participants dont l'acuité visuelle ne permettait pas de compter les doigts ou était pire.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Inès Belalem et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.