Des poissons qui se nourrissent de larves de moustiques pour prévenir la transmission du paludisme

Quel est l’objectif de la revue ?

Les moustiques anophèles adultes femelles transmettent les parasites Plasmodium qui provoquent le paludisme. Le but de cette revue Cochrane était d'évaluer si l'introduction de poissons se nourrissant de larves et de pupes de moustiques (stades précoces du développement des moustiques) dans les sources d'eau près des habitations réduira la population adulte de moustiques anophèles et donc le nombre de personnes infectées par le parasite Plasmodium.

Messages clés

Nous ne savons pas si l'introduction de poissons se nourrissant de larves et de pupes de moustiques a un impact sur le nombre de personnes atteintes de malaria ou sur la population adulte de moustiques anophèles.

Quel est le sujet de la revue ?

Les auteurs de la revue ont examiné les recherches disponibles évaluant l'introduction de poissons qui se nourrissent de larves (« larvivores ») dans les habitats larvaires des moustiques anophèles dans les régions où le paludisme est fréquent. Quinze petites études portaient sur les effets des poissons larvivores sur les larves et les pupes d'anophèles dans différents habitats larvaires, y compris des plans d'eau localisés (puits, réservoirs d'eau domestique, viviers et bassins ; sept études), des bassins fluviaux en aval des barrages (deux études), des rizières (quatre études) et des canaux (deux études). Ces études ont été menées au Sri Lanka (deux études), en Inde (trois études), en Éthiopie (une étude), au Kenya (deux études), au Soudan (une étude), sur l'île de la Grande Comore (une étude), en Corée (deux études), en Indonésie (une étude) et au Tadjikistan (deux études). Il s'agit d'une mise à jour d'une revue Cochrane de 2013 qui comprend des études non publiées plus anciennes du Tadjikistan et un nouvel essai mené en Inde.

Quels sont les principaux résultats de la revue ?

Dans notre analyse principale, nous n'avons trouvé aucune étude portant sur les effets des poissons larvivores sur les populations adultes de moustiques anophèles ou sur le nombre de personnes infectées par le parasite Plasmodium. Dans notre analyse de l'effet de l'introduction de poissons sur le nombre de larves et de pupes d'anophèles dans les points d’eau résiduels, ces études ont fourni des résultats incohérents sur la densité des larves et pupes de moustiques (12 études, données non regroupées et données de très faible valeur probante). Certaines études qui ont mesuré le nombre de sources d'eau contenant des larves et des pupes d'anophèles ont signalé une réduction du nombre de sites contenant des larves et des pupes d'anophèles après l'introduction de poissons (cinq études, données non regroupées, données de faible valeur probante). Aucune des études incluses n'a examiné les effets de l'introduction de poissons larvivores sur les autres espèces indigènes présentes, mais ces études n'ont pas été conçues pour le faire. Toutes les études incluses présentaient un risque de biais élevé.

Avant d'investir beaucoup dans cette intervention, nous avons besoin de recherches de meilleure qualité pour déterminer l'effet de l'introduction de poissons larvivores sur le nombre de personnes infectées par le paludisme et sur les populations d'anophèles adultes. Les chercheurs doivent utiliser des plans d’étude contrôlée solides avec un nombre adéquat de sites. De plus, les chercheurs devraient explorer les dommages potentiels de l'introduction de ces poissons sur les poissons indigènes et les autres espèces non anophéliennes.

Cette revue est-elle à jour ?

Les auteurs de la revue ont recherché les études publiées jusqu'au 6 juillet 2017.

Conclusions des auteurs: 

Nous ne savons pas si l'introduction de poissons larvivores réduit la transmission du paludisme ou la densité des populations adultes de moustiques anophèles.

Dans les études de recherche qui ont examiné les effets sur les larves et les pupes anophéliennes de l'introduction de poissons dans des habitats larvaires vecteurs potentiels du paludisme, des niveaux élevés d'empoissonnement pourraient réduire la densité ou la présence de larves et de pupes de moustiques anophéliens à court terme. Nous ne savons pas si cela se traduit par un impact sur la transmission du paludisme. Selon notre interprétation des données actuelles, les pays ne devraient pas investir dans l'introduction de poissons en tant que mesure autonome ou supplémentaire de contrôle des larves dans les zones de transmission du paludisme en dehors du contexte de la recherche utilisant des études de terrain soigneusement contrôlées ou des plans quasi-expérimentaux. Ces recherches devraient examiner les effets sur les poissons indigènes et sur les autres espèces non ciblées.

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Contexte: 

Les moustiques anophèles adultes femelles peuvent transmettre les parasites Plasmodium qui provoquent le paludisme. Certaines espèces de poissons se nourrissent de larves et de pupes de moustiques. Dans les documents de politique de lutte contre la maladie, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) inclut le contrôle biologique des vecteurs du paludisme en introduisant dans les étangs, les rivières et les points d'eau résiduels près des habitations des poissons larvivores pour réduire la transmission du parasite Plasmodium. Par le passé, le Fonds mondial a financé des programmes d’introduction de poissons larvivores dans certains pays et, avec l'intensification des efforts d'éradication du paludisme, les responsables politiques pourraient revenir à cette option. Par conséquent, nous avons évalué la base de preuves pour les programmes d’introduction de poissons larvivores pour lutter contre le paludisme.

Objectifs: 

Évaluer si l'introduction de poissons larvivores dans les habitats larvaires anophéliens a un impact sur la transmission du parasite Plasmodium. Nous avons également cherché à résumer les études qui ont évalué si l'introduction de poissons larvivores influence la densité et la présence des larves et des pupes d'anophèles dans les sources d'eau.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons fait des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les maladies infectieuses ; le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), publié dans la Cochrane Library ; MEDLINE (PubMed) ; Embase (Ovid) ; CAB Abstracts ; LILACS et le metaRegister of Controlled Trials (mRCT) jusqu'au 6 juillet 2017. Nous avons vérifié les listes de références de toutes les études identifiées par la recherche. Nous avons examiné les références énumérées dans les articles de revue et les bibliographies compilées antérieurement pour trouver des études admissibles. Nous avons également communiqué avec des chercheurs dans le domaine et les auteurs d'études qui répondaient aux critères d'inclusion pour obtenir des renseignements supplémentaires concernant les études potentielles à inclure et les études en cours. Ceci est une mise à jour d'une revue Cochrane publiée en 2013.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) et non-ECR, y compris les études contrôlées avant et après, les séries chronologiques contrôlées et les études contrôlées de séries chronologiques interrompues, menés dans des régions où le paludisme est endémique et dans le cadre desquels des poissons ont été introduits comme larvicide et qui rapportaient le paludisme dans la communauté ou la densité de la population adulte anophélienne. En l'absence de preuves directes d'un effet sur la transmission, nous avons effectué une analyse secondaire d'études évaluant l'effet de l'introduction de poissons larvivores sur la densité ou la présence de larves et de pupes de moustiques anophèles immatures dans les sources d'eau pour déterminer si cette intervention a un potentiel qui pourrait justifier une recherche plus poussée dans le contrôle des vecteurs du paludisme.

Recueil et analyse des données: 

Les deux auteurs de la revue ont examiné indépendamment chaque article par titre et par résumé, et ont examiné les études potentiellement pertinentes en vue de leur inclusion à l'aide d'un formulaire d'admissibilité. Au moins deux auteurs de la revue ont extrait indépendamment les données et évalué le risque de biais des études incluses. Si les données pertinentes n'étaient pas claires ou n'étaient pas rapportées, nous avons communiqué avec les auteurs des études pour obtenir des précisions. Nous avons présenté les données dans des tableaux et nous avons résumé les études qui ont évalué les effets de l'introduction des poissons sur la densité ou la présence de larves ou de pupes d'anophèles, ou les deux. Nous avons utilisé l'approche GRADE pour résumer la valeur probante des données. Nous avons également examiné si les études incluses indiquaient des effets néfastes possibles de l'introduction de poissons larvivores sur les espèces indigènes non ciblées.

Résultats principaux: 

Nous n'avons identifié aucune étude qui rapporte les effets de l'introduction de poissons larvivores sur les principaux résultats de cette revue : infection palustre dans les communautés voisines, taux d'inoculation entomologique ou densité des anophèles adultes.

Pour l'analyse secondaire, nous avons examiné les effets de l'introduction de poissons larvivores sur la densité et la présence de larves et de pupes d'anophèles dans les sources d'eau communautaires, et nous avons trouvé 15 petites études avec une période de suivi comprise entre 22 jours et cinq ans. Ces études ont été menées au Sri Lanka (deux études), en Inde (trois études), en Éthiopie (une étude), au Kenya (deux études), au Soudan (une étude), sur l'île de la Grande Comore (une étude), en Corée (deux études), en Indonésie (une étude) et au Tadjikistan (deux études). Ces études ont été menées dans divers milieux, notamment dans des plans d'eau localisés (puits, réservoirs d'eau domestique, viviers et bassins (sept études) ; des bassins fluviaux en aval des barrages (deux études)) ; des rizières (cinq études) ; et des canaux (deux études). Toutes les études incluses présentaient un risque de biais élevé. Les recherches existantes étaient insuffisantes pour déterminer si les poissons larvivores réduisent la densité des larves et des pupes d'anophèles (12 études, données non regroupées, données de très faible valeur probante). Certaines études portant sur des niveaux d'empoissonnement élevés semblaient arrêter l'augmentation des populations de larves et de pupes d'anophèles ou réduire le nombre de larves et de pupes de moustiques anophèles, comparativement aux témoins. Toutefois, cette constatation n'était pas constante et, dans les études qui ont montré une diminution des populations d'anophèles immatures, l'effet n'était pas toujours constant. Par contre, certaines études ont rapporté que les poissons larvivores réduisaient le nombre de sources d'eau contenant des larves et des pupes d'anophèles (cinq études, données non regroupées, données de faible valeur probante).

Aucune des études incluses n'a signalé les effets des poissons larvivores sur les populations locales de poissons indigènes ou sur d'autres espèces.

Notes de traduction: 

Post-édition : Marion Douay - Révision : Bénédicte Eustache (M2 ILTS, Université de Paris)

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.