Greffe de cellules souches provenant de donneurs de la fratrie comparé au traitement immunosuppresseur spécifique contre l'anémie aplasique grave acquise

L'anémie aplasique grave acquise est rare. En général, les cellules souches de la moelle osseuse remplacent naturellement les cellules sanguines mortes dans le sang périphérique. L'anémie aplasique grave est probablement provoquée par une réponse immunitaire d'attaque irrégulière contre les cellules souches produisant du sang dans l'organisme. Si les réserves ne sont pas assurées, les cellules sanguines fonctionnelles sont insuffisantes et des infections, des saignements et un épuisement surviendront. Les patients peuvent être pâles et ressentir une faiblesse, une fatigue et un essoufflement. La progression de la maladie est associée à de graves infections qui sont une cause majeure de décès.

La greffe de cellules souches provenant d'un donneur de la fratrie ayant des antigènes leucocytaires humains (ALH) compatibles sans traitement préalable (traitement de première intention) est une option de traitement pour les patients atteints d'une anémie aplasique grave récemment diagnostiquée. Un donneur de la fratrie ayant des ALH compatibles, un frère ou une sœur, sert de donneur de cellules souches portant des caractéristiques génétiques identiques aux gènes de l'ALH (compatibles). Les cellules récoltées sont transfusées par intraveineuse et produisent de nouvelles cellules sanguines. Des problèmes peuvent survenir lorsque les cellules ne se stabilisent pas suffisamment pour produire des cellules sanguines (rejet de greffe) ou si les cellules immunitaires du donneur reconnaissent les cellules du corps du receveur comme des cellules étrangères et les attaquent (maladie du greffon contre l'hôte). Les deux problèmes peuvent conduire à un décès précoce.

L'application des médicaments cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire à titre de traitement immunosuppresseur sans traitement préalable (c'est-à-dire traitement de première intention) est une alternative à la greffe et peut être utilisée pour les patients pour lesquels aucun donneur de la fratrie ayant des ALH compatibles n'est trouvé. Le traitement immunosuppresseur implique la suppression par les médicaments des réactions du système immunitaire. Le but est de réduire les réactions immunitaires anormales. Des problèmes peuvent survenir lorsque les patients ne réagissent pas bien ou ne montrent absolument aucune réponse.

Nous avons identifié trois études répondant à nos critères d'inclusion dans la revue. Toutes présentaient des limitations méthodologiques, ce qui signifie que nous n'avons pas pu tirer de conclusions solides. Concernant les principaux critères de jugement, elles ont montré des résultats ambigus lors des comparaisons des bras de traitement : une étude était en faveur de la greffe et deux études étaient en faveur du traitement à la cyclosporine et/ou antithymocyte ou à la globuline antilymphocytaire. La mortalité liée au traitement, c'est-à-dire les décès provoqués par des complications du traitement, a été considérable pour les patients dans le bras de la greffe. L'échec du traitement, c'est-à-dire l'absence de réponse au traitement, a été substantielle pour les patients dans le bras de cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire. Un rejet de la greffe a été rapporté pour 3 % à 16 % et une maladie du greffon contre l'hôte a été rapportée pour 26 % à 51 % des patients transplantés. En raison de la faible quantité et du biais des données, il n'est pas possible de déterminer quel est le meilleur traitement, entre la greffe pour les donneurs de la fratrie ayant des ALH compatibles ou la cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire pour les patients n'ayant pas une telle fratrie.

Plusieurs raisons expliquent qu'il soit très probable qu'aucune preuve de bonne qualité ne soit trouvée lorsque ces interventions seront comparées dans le futur. L'une d'elle est qu'il est improbable que des essais contrôlés randomisés soient réalisés en raison de contraintes éthiques et des fortes préférences des patients et des médecins. Des études avec une « randomisation mendélienne » pourraient fournir des preuves de bonne qualité en théorie, cependant, dans la pratique, elles sont difficiles à réaliser correctement et se sont révélées décevantes. La « randomisation mendélienne » suppose qu'on considère que la nature elle-même a déjà « randomisé » la partie paternelle et maternelle d'un gène du fait que le donneur et le receveur sont de la même fratrie. Une autre raison est que l'issue de la greffe s'est considérablement améliorée. Cela est vrai pour la greffe avec un donneur compatible, incluant à la fois les donneurs avec et sans lien de parenté. Cela signifie que la cyclosporine et/ou antithymocyte ou la globuline antilymphocytaire peuvent ne pas être un traitement de premier choix si un donneur de la fratrie compatible, voire un donneur compatible sans lien de parenté, est disponible.

Conclusions des auteurs: 

Les données sont insuffisantes et biaisées, et ne permettent pas de tirer de conclusions quant à l'efficacité comparative de la greffe allogénique de première intention de cellules souches hématopoïétiques provenant d'un donneur de la fratrie ayant des ALH compatibles et d'un traitement de première intention à la cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire (à titre de traitement immunosuppresseur de première intention). Nous ne sommes pas en mesure d'établir des recommandations fermes concernant le choix de l'intervention pour le traitement de l'anémie aplasique grave acquise.

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Contexte: 

L'anémie aplasique grave acquise est une maladie rare et potentiellement mortelle caractérisée par une moelle osseuse hypocellulaire et une pancytopénie. Les principaux signes et symptômes sont des infections graves, des saignements et un épuisement. La greffe allogénique de première intention de cellules souches hématopoïétiques (GCSH) provenant de donneurs de la fratrie ayant des antigènes leucocytaires humains (ALH) compatibles (DFC) est un traitement pour les patients atteints d'une anémie aplasique grave récemment diagnostiquée. Le traitement de première intention à la cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire (à titre de traitement immunosuppresseur de première intention) est une alternative à la GCSH-DFC et est indiqué pour les patients chez lesquels aucun DFC n'est trouvé.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et les événements indésirables de la greffe allogénique de première intention de cellules souches hématopoïétiques provenant de donneurs de la fratrie ayant des ALH compatibles comparé à un traitement immunosuppresseur de première intention comprenant cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire chez les patients atteints d'anémie aplasique grave acquise.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans les bases de données électroniques MEDLINE (Ovid), EMBASE (Ovid) et The Cochrane Library CENTRAL (Wiley) afin de trouver des articles publiés de 1946 au 22 avril 2013. Les recherches supplémentaires ont inclus des registres d'essais, des listes bibliographiques de revues récentes et des contacts avec les auteurs.

Critères de sélection: 

Les plans d'études prospectives suivants étaient éligibles à l'inclusion : essais contrôlés randomisés (ECR) et essais contrôlés non-randomisés si l'assignation des patients à des groupes de traitement était cohérente avec une « randomisation mendélienne. » Nous avons inclus les participants atteints d'une anémie aplasique grave récemment diagnostiquée qui recevaient une GCSH-DFC ou un traitement immunosuppresseur sans GCSH préalable ou un traitement immunosuppresseur, avec un minimum de cinq participants par groupe de traitement. Nous n'avons pas appliqué de limites quant à l'année ou à la langue de publication.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont extrait les données sur les caractéristiques des études et des patients et évalué le risque de biais de façon indépendante. Nous avons résolu les désaccords par la discussion ou en ayant recours à un troisième auteur de la revue. Le critère de jugement principal était la mortalité globale. Les critères de jugement secondaires étaient la mortalité liée au traitement, le rejet de la greffe, l'absence de réponse au traitement immunosuppresseur de première intention, la maladie du greffon contre l'hôte (MGCH), la récidive après la réussite d'un traitement initial, la maladie clonale et maligne secondaire, la qualité de vie liée à la santé et le score de performance.

Résultats principaux: 

Nous avons identifié trois essais qui répondaient aux critères d'inclusion. Aucun de ces essais n'était un ECR. 302 participants sont inclus dans cette revue. Les trois études incluses avaient été réalisées de façon prospective et possédaient des caractéristiques compatibles avec le principe de « randomisation mendélienne », tel que défini dans la présente revue. Toutes les études avaient un risque de biais élevé en raison de leur plan d'étude. Toutes les études ont été menées il y a plus de 10 ans et peuvent ne pas être applicables aux normes de soins d'aujourd'hui. Les critères de jugement primaires et secondaires n'ont montré aucune différence statistiquement significative entre les groupes de traitement. Nous présentons les résultats pour la greffe allogénique de première intention de cellules souches hématopoïétiques provenant d'un donneur de la fratrie ayant des ALH compatibles, que nous appelons le groupe GCSH-DFC, versus traitement de première intention à la cyclosporine et/ou antithymocyte ou globuline antilymphocytaire, que nous appelons le groupe de traitement immunosuppresseur dans la section suivante.

Le hazard ratio combiné pour la mortalité globale concernant le groupe GCSH-DFC versus le groupe du traitement immunosuppresseur a été de 0,95 (intervalle de confiance à 95 % 0,43 à 2,12, P = 0,90, preuves de qualité médiocre). Par conséquent, la mortalité globale n'a pas différé de manière statistiquement significative entre les groupes. La mortalité liée au traitement variait de 20 % à 42 % pour le groupe GCSH-DFC et n'a pas été rapportée pour le groupe du traitement immunosuppresseur (preuves de qualité très médiocre). Les auteurs ont rapporté des rejets de greffe de 3 % à 16 % pour le groupe de GCSH-DFC et une MGCH de 26 % à 51 % (ces deux critères de jugement n'étant pas applicables au groupe du traitement immunosuppresseur, preuves de qualité très médiocre). Les auteurs n'ont rapporté aucune donnée concernant la réponse et la récidive pour le groupe GCSH-DFC. Pour le groupe du traitement immunosuppresseur, les études ont rapporté une absence de réponse pour 15 % (pas de date indiquée) à 64 % (trois mois) et une récidive chez un répondeur sur huit après le traitement immunosuppresseur à 5,5 ans (preuves de qualité très médiocre). Les auteurs ont rapporté une maladie clonale secondaire ou des tumeurs malignes pour le groupe GCSH-DFC versus le groupe du traitement immunosuppresseur chez 1 patients sur 34 versus 0 patients sur 22 dans une étude et chez 0 patients sur 28 versus 4 patients sur 86 dans l'autre étude (preuves de qualité médiocre). Aucune des études incluses n'a examiné la qualité de vie liée à la santé. Le pourcentage des patients évalués ayant un score de performance sur l'échelle de Karnofsky dans la fourchette de 71 % à 100% a été de 92 % dans le groupe de GCSH-DFC et de 46 % dans le groupe du traitement immunosuppresseur.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.