Quels sont les bénéfices et les risques de l'atovaquone-proguanil pour le traitement du paludisme non compliqué causé par le parasite Plasmodium falciparum ?

Quel est l’objectif de cette revue ?

Le type de paludisme le plus courant et le plus sévère est causé par Plasmodium falciparum. Dans sa forme légère (non compliquée), les symptômes sont la fièvre, les maux de tête, les douleurs musculaires et les vomissements. La maladie peut devenir sévère et mortelle si elle n'est pas traitée suffisamment tôt ou avec les bons médicaments.

Cette revue visait à déterminer si l'atovaquone-proguanil est efficace et sûr pour traiter les cas non compliqués de paludisme à P falciparum . Nous avons voulu y parvenir en comparant les résultats des études ayant comparant l'atovaquone-proguanil à d'autres traitements contre le paludisme.

Principaux messages

L'atovaquone-proguanil est aussi efficace que l'artésunate-méfloquine dans le traitement du paludisme non compliqué à Plasmodium falciparum. Il pourrait être moins efficace que l'artéméther-luméfantrine, l'artésunate-amodiaquine et l'artésunate-atovaquone-proguanil, bien que des données probantes plus robustes soient nécessaires pour le confirmer. Les effets secondaires semblent similaires avec l'atovaquone-proguanil.

Qu'étudie cette revue ?

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de traiter le paludisme non compliqué par des associations médicamenteuses à base d'artémisinine (appelées ACT, artemisinin-based combination) administrées par voie orale (par la bouche).

Les ACT ne sont pas toujours disponibles dans le monde entier et, dans certains endroits, le Plasmodium falciparum devient résistant aux traitements recommandés (les médicaments cessent d'agir). Nous avons examiné les données probantes des bénéfices et des risques des associations de médicaments qui ne sont pas à base d'artémisinine, mais contenant de l'atovaquone-proguanil. Il s'agit d'un traitement oral couramment utilisé par les personnes originaires de régions non impaludées pour éviter de contracter le paludisme lorsqu'elles se rendent dans ces régions impaludées. Nous voulions savoir s’il fonctionnait aussi bien pour le traitement du paludisme non compliqué à Plasmodium falciparum que les ACT et autres traitements du paludisme.

Nous avons recherché des essais contrôlés randomisés (études cliniques dans lesquelles les personnes sont placées au hasard dans l'un des deux groupes de traitement ou plus) comparant l'atovaquone-proguanil à d'autres traitements contre le paludisme. Ces études fournissent les données probantes les plus solides sur les effets d'un traitement. Nous avons comparé les résultats, résumé les données probantes et évalué le niveau de confiance dans les données probantes.

Quels sont les principaux résultats de cette revue ?

Nous avons trouvé 17 études impliquant 4763 adultes et enfants en Afrique, en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est. Les personnes ont été suivies pendant 28 jours à un an.

Quinze études ont comparé l'atovaquone-proguanil à 12 traitements antipaludiques différents (ACT dans cinq études ; autres thérapies associant plusieurs médicaments dans deux études ; médicaments individuels dans neuf études).

Cinq études ont comparé l'atovaquone-proguanil associé à un autre médicament (artésunate ou chloroquine) à l'atovaquone-proguanil seul (trois études) ; l'atovaquone-proguanil associé à un médicament différent (une étude) ; une association de thérapies n'incluant pas l'atovaquone-proguanil (une étude) ; ou des médicaments individuels (deux études).

Dans 15 études, les chercheurs et les personnes traitées savaient quels médicaments les participants recevaient. Les entreprises pharmaceutiques ont financé 10 études.

L’atovaquone-proguanil par rapport aux ACT recommandés par l'OMS

L'atovaquone-proguanil pourrait être moins efficace pour éliminer les parasites Plasmodium falciparum du sang ou les empêcher de revenir (succès du traitement) que l'artéméther-luméfantrine (taux de succès comparé à 28 et 42 jours après le traitement ; une étude). Cependant, ces données probantes sont basées sur une petite étude.

L'atovaquone-proguanil pourrait fonctionner aussi bien, ou moins bien, que l'artésunate-amodiaquine selon que les nouvelles infections apparaissant après le début du traitement soient prises en compte ou non (taux de réussite comparés à trois et 28 jours après traitement ; une étude). Toutefois, ces données probantes ont été basées sur une petite étude portant sur des enfants de moins de cinq ans.

Lorsque les nouvelles infections survenues après le début du traitement étaient exclues, il existe des données probantes solides suggérant qu’il y a peu ou pas de différence de succès du traitement entre l’atovaquone-proguanil et l’artésunate-méfloquine après 42 jours (deux études). Lorsque les nouvelles infections étaient prises en compte, l'atovaquone-proguanil pourrait être meilleur que l'artésunate-méfloquine, mais ces données probantes étaient basées sur les résultats imprécis d'une étude.

L’Atovaquone-proguanil par rapport à l’atovaquone-proguanil associé à l’artesunate

Comparé à l'atovaquone-proguanil associé à l’artésunate, l'atovaquone-proguanil pourrait être moins efficace dans le traitement du paludisme non compliqué après trois et 28 jours, mais ces données probantes sont basées sur les résultats de deux petites études. Il est probablement moins efficace pour traiter le paludisme non compliqué après 42 jours (deux études).

Effets secondaires

Des études ont rapporté plusieurs effets secondaires, tels que des nausées et des vomissements, ou des maux de tête. Dans l'ensemble, ils étaient similaires d'un groupe à l'autre.

Cette revue est-elle à jour ?

Les données probantes sont à jour jusqu'au 30 janvier 2020.

Conclusions des auteurs: 

L'atovaquone-proguanil s'est révélé efficace contre le paludisme non compliqué à P falciparum, bien que dans certains cas, les taux d'échec du traitement aient été compris entre 5 et 10 %. L'ajout d'artésunate à l'atovaquone-proguanil pourrait réduire le taux d'échec du traitement. L'artésunate-atovaquone-proguanil et le développement de la résistance des parasites pourraient représenter un domaine de recherche supplémentaire.

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Contexte: 

En 2015, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que l'atovaquone-proguanil peut être utilisé chez les voyageurs et qu'il constitue une option dans les zones d'endémie du paludisme en association avec l'artésunate, comme traitement alternatif lorsque les combinaisons thérapeutiques à base d'artémisinine (artemisinin-based combination, ACT) de première intention ne sont pas disponibles ou efficaces. Cette étude est une mise à jour d'une étude Cochrane entreprise en 2005.

Objectifs: 

Évaluer l'efficacité et la tolérance de l'atovaquone-proguanil (seul et en association à des médicaments à base d'artémisinine) par rapport à d'autres médicaments antipaludiques pour traiter le paludisme non compliqué à Plasmodium falciparum chez les adultes et les enfants.

Stratégie de recherche documentaire: 

La dernière recherche d’essais date du 30 janvier 2020. Nous avons consulté le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les maladies infectieuses, CENTRAL, MEDLINE, EMBASE, et LILACS. Afin d’inclure les essais récemment publiés et non publiés, nous avons également effectué des recherches sur ClinicalTrials.gov, lemetaregistre des essais contrôlés (mREC) et le Système d'enregistrement international des essais cliniques de l'OMS (ICTRP).

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) rapportant des données d'efficacité et de tolérance de l'atovaquone-proguanil ou l'atovaquone-proguanil associé à un médicament partenaire par rapport à au moins un autre médicament antipaludique pour le traitement d’une infection non compliquée à Plasmodium falciparum.

Recueil et analyse des données: 

Pour cette mise à jour, deux auteurs de la revue ont réextrait des données et évalué le niveau de confiance des données probantes. Nous avons effectué une méta-analyse des données pour calculer les risques relatifs (RR) avec un intervalle de confiance (IC) à 95% pour les échecs de traitement entre les comparaisons, et pour les critères de jugement de tolérance entre et parmi les comparaisons. Les mesures des critères de jugement comprennent les échecs de traitement non ajustés et les échecs de traitement ajustés par réaction en chaîne de la polymérase (PCR). L'ajustement par PCR permet de différencier une nouvelle infection d'une recrudescence d’infection.

Résultats principaux: 

Dix-sept ECR ont répondu à nos critères d'inclusion, fournissant 4763 adultes et enfants d'Afrique, d'Amérique du Sud et d'Asie du Sud-Est. Huit essais ont fourni des données ajustées par PCR pour distinguer les nouvelles infections des recrudescences d’infection pendant la période de suivi. Dans ce résumé, nous ne présentons que les comparaisons avec les trois antipaludiques recommandés par l'OMS ayant été inclus dans ces essais.

Il y a eu deux comparaisons avec l'artéméther-luméfantrine, un essai de 2008 en Éthiopie avec 60 participants a eu deux échecs avec l'atovaquone-proguanil comparé à aucun avec l'artéméther-luméfantrine (échecs de traitement ajustés par PCR au 28e jour). Un deuxième essai, de 2012, en Colombie, avec 208 participants, a connu un échec dans chaque bras (échecs de traitement ajustés par PCR au 42e jour).

Une seule comparaison avec l'artésunate-amodiaquine a été faite lors d'un essai mené au Cameroun en 2014. Il y a eu six échecs avec l'atovaquone-proguanil au 28e jour et deux avec l'artésunate-amodiaquine (échecs du traitement ajustés par PCR au 28e jour) : 9.4 % avec l'atovaquone-proguanil contre 2,9 % avec l'artésunate-amodiaquine ; RR 3,19, IC à 95 % 0,67 à 15,22 ; 1 ECR, 132 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible), bien qu'il y ait eu un nombre similaire d'échecs de traitement non ajustés par PCR (9 (14.1 %) avec l'atovaquone-proguanil et 8 (11,8 %) avec l'artésunate-amodiaquine ; RR 1,20, IC à 95 % 0,49 à 2,91 ; 1 ECR, 132 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Deux comparaisons avec l'artésunate-méfloquine ont été effectuées, l'une en 2012 en Colombie et l'autre en 2002 en Thaïlande, où l'on observe des taux élevés de paludisme multirésistant. Le nombre d'échecs thérapeutiques ajustés par PCR était similaire entre les groupes au 42e jour (2,7 % avec l'atovaquone-proguanil contre 2,4 % avec l'artésunate-méfloquine ; RR 1,15, IC à 95 % 0,57 à 2,34 ; 2 ECR, 1168 participants ; données probantes d’un niveau de confiance élevé). Il existait également des échecs de traitement similaires, non ajustés par PCR, entre les groupes (5,3 % avec l'atovaquone-proguanil contre 6,6 % avec l'artésunate-méfloquine ; RR 0,8, IC à 95 % 0,5 à 1,3 ; 1 ECR, 1063 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible).

Lorsque l'atovaquone-proguanil était associé à l'artésunate, il existait moins d'échecs thérapeutiques avec et sans ajustement par PCR au 28e jour (échecs thérapeutiques ajustés par PCR au 28e jour) : 2.16 % avec l'atovaquone-proguanil par rapport à aucun échec avec l'artésunate-atovaquone-proguanil ; RR 5,14, IC à 95 % 0,61 à 43,52 ; 2 ECR, 375 participants, données probantes d’un niveau de confiance faible) et au 42e jour (échecs de traitement ajustés par PCR au 42e jour : 3.82 % avec l'atovaquone-proguanil contre 2,05 % avec l'artésunate-atovaquone-proguanil (RR 1,84, IC à 95 % 0,95 à 3,56 ; 2 ECR, 1258 participants, données probantes d’un niveau de confiance modéré). Dans l'essai de 2002 en Thaïlande, il y avait moins d'échecs de traitement dans le groupe artésunate-atovaquone-proguanil que dans le groupe atovaquone-proguanil au 42e jour avec ajustement par PCR.

Bien qu'il y ait eu quelques petites différences dans la fréquence des événements indésirables dans les groupes atovaquone-proguanil par rapport aux médicaments comparateurs, il n’y avait pas d’association récurrente suggérant que l'atovaquone-proguanil est fortement associé à un événement indésirable spécifique.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Carole Lescure et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.