Effet de la prise courante de médicaments antipaludéens pour prévenir le paludisme pendant la grossesse

La grossesse augmente le risque de paludisme, et avec lui une mauvaise santé pour la mère et l'enfant, en particulier au cours de la première ou deuxième grossesse. Pour cette raison, les femmes sont encouragées à tenter de prévenir l'infection paludéenne pendant la grossesse en dormant sous une moustiquaire et en prenant des médicaments efficaces contre le paludisme pendant la grossesse à titre de chimioprévention.

Cette revue Cochrane a examiné tous les schémas thérapeutiques par rapport à un placebo. Les auteurs de l'analyse ont cherché à résumer et quantifier les effets globaux de la chimioprévention. Dix-sept essais ont été inclus, tous menés entre 1957 et 2008, et tous sauf deux dans des pays d'Afrique.

Pour les femmes en cours de première ou deuxième grossesse, la chimioprévention du paludisme empêche l'anémie modérée à sévère ( preuves de haute qualité) ainsi que la détection du parasite causant le paludisme dans le sang (preuves de haute qualité). Elle peut également prévenir l'apparition du paludisme. Nous ne savons pas si elle empêche les décès maternels, car il faudrait de très grandes études pour détecter un effet sur ce paramètre.

Chez les nourrissons de ces femmes, la chimioprévention du paludisme améliore le poids de naissance moyen (preuves de qualité moyenne) et réduit le nombre de nourrissons hypotrophiques à la naissance (preuves de qualité moyenne). Nous ne sommes pas certains que la chimioprévention réduise la mortalité infantile au cours de la première semaine, du premier mois et de la première année, car il faudrait, ici aussi, des études très vastes pour démontrer un tel effet.

Conclusions des auteurs: 

La chimioprévention de routine du paludisme et de ses conséquences a été testée dans le cadre d'ECR et apporte des avantages cliniquement importants sur l'anémie et la parasitémie des mères et sur le poids à la naissance des nourrissons.

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Contexte: 

La grossesse augmente le risque de paludisme, et avec lui une mauvaise santé pour la mère et l'enfant, en particulier au cours de la première ou deuxième grossesse. Afin de réduire ces effets, l'Organisation mondiale de la Santé recommande que les femmes enceintes vivant dans des zones d'endémie palustre dorment sous des moustiquaires imprégnées d'insecticide, soient traités contre le paludisme et l'anémie, et reçoivent une chimioprévention avec un antipaludique efficace pendant les deuxième et troisième trimestres de la grossesse.

Objectifs: 

Évaluer les effets d'une chimioprévention antipaludéenne donné aux femmes enceintes vivant dans les zones de paludisme endémique sur la santé maternelle et infantile. Nous avons également résumé les effets du traitement préventif intermittent par la sulfadoxine et la pyriméthamine (SP) seul, ainsi que les régimes de prévention visant Plasmodium vivax.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons consulté le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les maladies infectieuses, CENTRAL, MEDLINE, EMBASE, LILACS et des listes de références jusqu'au 1er juin 2014.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) et quasi-ECR de tout régime de médicaments antipaludiques pour la prévention du paludisme chez les femmes enceintes vivant dans des zones d'endémie palustre par rapport à un placebo ou à l'absence d'intervention. Chez la mère, nous avons cherché des résultats comprenant la mortalité, une anémie sévère et un paludisme grave, l'anémie, les valeurs d'hémoglobine et les épisodes palustres, les indicateurs de l'infection palustre et les événements indésirables. Chez le nourrisson, nous avons cherché la perte du foetus, la mortalité périnatale, néonatale et infantile, la prématurité et le poids à la naissance, ainsi que les indicateurs de l'infection palustre. Nous avons inclus des schémas thérapeutiques connus comme efficaces contre le parasite du paludisme au moment de l'étude mais qui ne peuvent plus être utilisés en raison de la résistance de parasite aux médicaments correspondants.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont appliqué les critères d'inclusion, évalué les risques de biais et extrait les données de manière indépendante. Les résultats dichotomiques ont été comparés au moyen du risque relatif (RR) et les résultats continus sous la forme de la différence moyenne (DM), avec dans les deux cas des intervalles de confiance (IC) à 95 %. Nous avons évalué la qualité des preuves en utilisant l'approche GRADE.

Résultats principaux: 

Dix-sept essais portant sur 14 481 femmes enceintes répondaient à nos critères d'inclusion. Ces essais ont été réalisés entre 1957 et 2008, au Nigeria (trois essais), en Gambie (trois essais), au Kenya (trois essais), au Mozambique (deux essais), en Ouganda (deux essais), au Cameroun (un essai), au Burkina Faso ( un essai) et en Thaïlande (deux essais). Six antipaludiques différents ont été évaluées par rapport à un placebo ou à l'absence d'intervention : chloroquine (en prise hebdomadaire), pyriméthamine (prise hebdomadaire ou mensuelle), proguanil (prise quotidienne), pyriméthamine-dapsone (prise hebdomadaire ou bimensuelle) et méfloquine (prise hebdomadaire), ou traitement préventif intermittent à la sulfadoxine+pyriméthamine (SP, administré deux fois, trois fois ou chaque mois). Les essais ont recruté des femmes au cours de leur première ou deuxième grossesse (huit essais), des femmes multigravide seulement (un essai) ou toutes les femmes (huit essais). Seules six études présentaient une assignation secrète adaptée.

Pendant une première ou deuxième grossesse, la chimioprévention du paludisme réduit le risque d'anémie modérée à sévère de l'ordre de 40 % (RR 0,60, IC à 95 % de 0,47 à 0,75 ; trois essais, 2 503 participantes, preuves de qualité élevée) et le risque d'anémie de l'ordre de 17 % (RR 0,83, IC à 95 % de 0,74 à 0,93 ; cinq essais, 3 662 participantes, preuves de qualité élevée). La chimioprévention du paludisme réduit le risque de parasitémie prénatale d'environ 61 % (RR 0,39, IC à 95 % de 0,26 à 0,58 ; sept essais, 3 663 participantes, preuves de qualité élevée) et deux études ont rapporté une réduction des épisodes fébriles (preuves de faible qualité). Il n'y a eu que 16 décès maternels et ces essais n'avaient pas la puissance nécessaire pour détecter un effet sur la mortalité maternelle (preuves de très faible qualité).

Pour les nourrissons nés d'une première ou deuxième grossesse, la chimioprévention du paludisme augmente probablement le poids moyen à la naissance d'environ 93 g (DM 92,72 g, IC à 95 % de 62,05 à 123,39 ; neuf essais, 3 936 participantes, preuves de qualité modérée), réduit l'hypotrophie à la naissance d'environ 27 % (RR 0,73, IC à 95 % de 0,61 à 0,87 ; huit essais, 3 619 participantes, preuves de qualité modérée) et réduit la parasitémie placentaire d'environ 46 % (RR 0,54, IC à 95 % de 0,43 à 0,69 ; sept essais, 2 830 participantes, preuves de qualité élevée). Il y a eu moins d'essais évaluant les avortements spontanés, les mortinaissances ou la mortalité périnatale ou néonatale, et ces analyses n'avaient pas la puissance nécessaire pour détecter des différences cliniquement importantes.

Chez les femmes multigravides, la chimioprévention a des effets similaires sur la parasitémie anténatale (RR 0,38, IC à 95 % de 0,28 à 0,50 ; trois essais, 977 participantes, preuves de qualité élevée), mais les essais sont trop peu nombreux pour évaluer les effets sur d'autres paramètres de résultat.

Dans les essais où toutes les femmes enceintes, quelle que soit leur parité, ont bénéficié d'une chimioprévention, les effets moyens de celle-ci mesurés chez toutes les femmes indiquent qu'elle peut prévenir l'anémie sévère (définie par les auteurs, mais au moins <8 g/l ; RR 0,19, IC à 95 % de 0,05 à 0,75 ; deux essais, 1 327 participantes, preuves de faible qualité ), mais la constance du bénéfice n'a pas été démontrée pour d'autres résultats.

Dans une analyse limitée au traitement préventif intermittent par la sulfadoxine et la pyriméthamine (SP), les estimations de l'effet et la qualité des preuves étaient similaires.

Un résumé d'un seul essai mené en Thaïlande concernant la prophylaxie de P. vivax montre que la chloroquine a empêché l'infection par P. vivax (RR 0,01, IC à 95 % de 0,00 à 0,20 ; un essai, 942 participantes).

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par le Centre Cochrane Français

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.