Podcast: Les effets des travailleurs communautaires et en soins de santé primaire sur les personnes souffrant de troubles mentaux et de détresse dans les pays à revenu faible et intermédiaire

Dans de nombreux contextes où l’accès aux soins de santé est limité, les gouvernements cherchent des stratégies efficaces pour fournir les soins de santé de base. Afin de contribuer à ce processus, le groupe Cochrane sur l’efficacité des pratiques et l’organisation des soins (EPOC) produit une série de revues sur la délégation de tâches à des prestataires de la santé ayant une formation non spécialisée en soins de santé primaire. En août 2021, ce groupe a publié une mise à jour d’une revue Cochrane de 2013 sur les effets d’engager du personnel de la santé du secteur primaire pour aider les personnes en détresse, ou atteintes de troubles mentaux dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Nous demandons à l’un des principaux auteurs, Nadja van Ginneken de l’Université de Liverpool, de nous parler de leurs résultats clé.

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Bonjour, je suis Nadja Van Ginneken de l'université de Liverpool, l'un des principaux auteurs de la mise à jour d'une revue Cochrane qui examine l'efficacité des travailleurs communautaires et des travailleurs en soins de santé primaire pour aider les personnes souffrant de troubles mentaux et de détresse dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Plusieurs personnes atteintes de troubles mentaux dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ne reçoivent pas les soins dont elles ont besoin, principalement à cause des difficultés d'accès aux services spécialisés de santé mentale, et à cause de la stigmatisation. Une solution consiste à offrir des services par l'intermédiaire des "travailleurs en soins de santé primaire ". Il s'agit de personnes qui ne sont pas des spécialistes de la santé mentale mais qui reçoivent une certaine formation en santé mentale, notamment des travailleurs en soins de santé primaire professionnels tels que des médecins généralistes et des infirmiers, des travailleurs non professionnels tels que des agents de santé communautaires ou bénévoles, et des membres non médicaux de la communauté, tels que des enseignants. Ces travailleurs en soins de santé primaire peuvent jouer un rôle clé pour combler les lacunes dans la prestation des services de santé mentale. Notre revue rassemble et regroupe ces données probantes pour en tirer des résultats plus généralisables.
Cette revue comporte 95 essais randomisés menés dans 30 pays à revenu faible et intermédiaire. Les études se sont déroulées dans des contextes ruraux, urbains et de camps de réfugiés ; et impliquaient des professionnels non médicaux tels que des enseignants ; des professionnels de santé non spécialisés tels que des médecins généralistes, des agents de santé non-professionnels et des infirmiers fournissant des traitements pour plusieurs problèmes de santé mentale. Ceux-ci comprenaient la dépression, l'anxiété, le trouble de stress post-traumatique, la dépression postnatale et l'abus d'alcool ou de substances.
Dans l'ensemble, nous avons constaté que lorsque les travailleurs en soins de santé primaire reçoivent une formation appropriée en santé mentale, ils pourraient être en mesure d'aider les personnes vivant avec différents problèmes de santé mentale comparativement aux personnes ne recevant pas de soins ou recevant des soins dispensés par des travailleurs en soins de santé primaire ayant peu ou pas de formation en santé mentale. Cependant, le niveau de confiance des données probantes était très faible pour plusieurs résultats, et très peu d'études ont évalué les critères de jugement à plus de 6 mois après l'intervention. D'autres lacunes de données ont été observées, notamment qu'il n'y avait aucune évaluation des effets de cette délégation de tâches sur l'utilisation des soins de santé, ni rapporté leurs effets indésirables, ou produit des analyses solides du rapport coût-efficacité.
Quant à l'efficacité pour des populations différentes, nous avons constaté que les travailleurs en soins de santé primaire pourraient améliorer le nombre d'adultes qui se rétablissent de la dépression ou de l'anxiété, et pourraient améliorer leur qualité de vie. Cette aide pourrait également réduire le taux de recours vers les spécialistes en santé mentale.
Nous avons trouvé que les travailleurs de la santé non professionnels fournissant des soins chez des femmes atteintes de dépression périnatale probablement réduisent légèrement les symptômes de dépression, pourraient les aider à se rétablir, et pourraient légèrement améliorer leur fonctionnement au quotidien.
Chez les adultes ayant des troubles liés à la consommation d'alcool ou de drogues, nous avons constaté que les soins dispensés par des travailleurs en soins de santé primaire réduisent probablement légèrement le risque de consommation d'alcool nocive ou dangereuse. En revanche, les données probantes sont incertaines quant à l'effet de ces soins pour aider les gens à éliminer les quantités d'alcool nocives ou dangereuses, ainsi que de savoir si ces soins améliorent le fonctionnement au quotidien ou la qualité de vie.
Chez les adultes atteints de troubles mentaux graves tels que la schizophrénie, nous avons constaté que les soins fournis par des travailleurs de la santé non professionnels pourraient avoir peu ou pas d'effet sur le fardeau ressentit par les aidants par rapport aux soins dispensés par des spécialistes de la santé mentale. De plus, les traitements dispensés par des professionnels en soins de santé primaire seuls ou en collaboration avec des spécialistes, pourraient améliorer le fonctionnement quotidien de ce groupe de personnes, par rapport aux traitements effectués uniquement par des spécialistes.
Enfin, chez les personnes dans un contexte de crise humanitaire et souffrant de stress post-traumatique ou de dépression et d'anxiété, nous avons constaté que les travailleurs de la santé non professionnels, ainsi que les enseignants et les travailleurs sociaux avaient peu ou pas d'effet sur les symptômes dépressifs ou post-traumatiques ou sur le fonctionnement quotidien chez les enfants, mais les interventions n'ont pas été jugées nocives et n'ont pas eu d'effet indésirable. En revanche, chez les adultes, les travailleurs en soins de santé primaire améliorent probablement légèrement la qualité de vie, pourraient réduire légèrement les symptômes de dépression et pourraient également aider à réduire le nombre de personnes présentant des symptômes de stress post-traumatique.

Merci Nadja. Si vous voulez accéder à la revue complète et gratuite en ligne, tapez Cochrane Library point com et recherchez 'primary-level worker and mental health' pour voir le lien.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.