Le trihexyphénidyle pour soigner la dystonie associée à la paralysie cérébrale.

Problématique de la revue

Le trihexyphénidyle constitue-t-il un traitement efficace pour les personnes atteintes de paralysie cérébrale avec un trouble moteur appelé dystonie ?

Contexte

La paralysie cérébrale est un handicap fréquent qui regroupe tout un ensemble de troubles des fonctions motrices. Un des troubles moteurs fréquents chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale est la dystonie qui entrave le contrôle de leurs mouvements. Ils ont des contractions musculaires involontaires, souvent pénibles, douloureuses, et impossibles à contrôler. Ces contractions réduisent la capacité des patients à bouger, à prendre soin d'eux-mêmes, à parler et à réaliser des activités quotidiennes.

Les médecins utilisent souvent des médicaments, dont le trihexyphénidyle pour traiter cette affection complexe. Cependant, on ne connaît pas encore tous les effets, positifs comme indésirables, du traitement par le trihexyphénidyle sur les personnes atteintes de paralysie cérébrale et de dystonie.

Caractéristiques de l’étude

En mai 2017, nous avons recherché tous les essais cliniques portant sur l'efficacité du trihexyphénidyle chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale dystonique. Nous avons inclus un essai australien impliquant 16 enfants (10 garçons et 6 filles) atteints de paralysie cérébrale et de dystonie. Ils avaient en moyenne neuf ans.

Les enfants ont été divisés en deux groupes différents. Les deux groupes ont pris du trihexyphénidyle pendant 12 semaines, puis un placebo pendant 12 semaines (un comprimé ressemblant au trihexyphénidyle mais sans principe actif), avec une pause de 4 semaines entre les deux, au cours de laquelle ils n'en ont pris aucun. La seule différence entre les deux groupes était que le premier groupe a commencé par le trihexyphénidyle puis a reçu le placebo, et le deuxième groupe a commencé par le placebo puis a reçu le trihexyphénidyle.

Principaux résultats

Nous n’avons trouvé aucune preuve de l’efficacité du trihexyphénidyle pour limiter les symptômes dystoniques ou pour l’amélioration des fonctions motrices du bras chez les enfants atteints de paralysie cérébrale et de dystonie. Le trihexyphénidyle peut être associé à un risque accru d'effets secondaires (agitation, constipation, sécheresse buccale et troubles du sommeil). Certaines preuves suggèrent que le trihexyphénidyle pourrait apporter une amélioration pour ce qui est d’atteindre les objectifs individuels fixés par l'enfant et sa famille concernant une meilleure participation aux activités de la vie quotidienne. L'étude n'a pas mesuré la douleur ni la qualité de vie.

Qualité des données probantes

Nous avons jugé la qualité des données probantes comme faible car la seule étude comprenait un petit nombre d'enfants et aucune autre étude ne vient appuyer les résultats de cette dernière. Par conséquent, nous ne sommes pas certains de l'efficacité du trihexyphénidyle pour limiter les symptômes dystonique, améliorer les fonctions motrices du bras et la participation aux activités quotidiennes des personnes atteintes de paralysie cérébrale et de dystonie.

Conclusions des auteurs: 

À l'heure actuelle, on ne dispose pas de suffisamment de données probantes sur l'efficacité du trihexyphénidyle chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale pour ce qui est des critères suivants : évolution de la dystonie, effets indésirables, amélioration de la fonction des membres supérieurs et meilleure participation aux activités de la vie quotidienne. L'étude n'a pas mesuré la douleur ni la qualité de vie. Il est nécessaire de mener des essais contrôlés randomisés multicentriques de plus grande envergure qui examinent également l'effet sur la douleur et la qualité de vie afin de déterminer l'efficacité du trihexyphénidyle chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale.

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Contexte: 

La paralysie cérébrale touche jusqu'à 2,1 des nouveaux-nés sur 1000 et englobe tout un ensemble de troubles moteurs. La dystonie est un trouble du mouvement courant chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale : spasmes et contractions musculaires involontaires, soutenus ou intermittents, qui provoquent des torsions, des mouvements répétitifs et des postures anormales. Les contractions involontaires sont souvent très douloureuses et pénibles et entraînent des contraintes importantes sur l'activité et la participation.

Les médicaments oraux constituent souvent lle traitement médical de première ligne de la dystonie. Le trihexyphénidyle est l'un de ces médicaments que les cliniciens utilisent souvent pour traiter la dystonie chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale.

Objectifs: 

Évaluer les effets du trihexyphénidyle chez les personnes atteintes de paralysie cérébrale dystonique, selon les domaines de déficience, d'activité et de participation de la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Nous avons également évalué le type et l'incidence des effets indésirables chez les personnes qui prennent le médicament.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase, huit autres bases de données et deux registres d'essais cliniques en mai 2017, et nous avons vérifié les listes de références et les citations pour trouver des études supplémentaires.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus tout essai contrôlé randomisé comparant les résultats entre le traitement par trihexyphénidyle oral par rapport au traitement par placebo pour soigner la dystonie lors d’une paralysie cérébrale. Nous avons inclus toute étude chez des enfants et des adultes de tout âge atteints seulement de paralysie cérébrale dystonique, ou avec des troubles du mouvement associés de spasticité, ataxie, chorée, athétose et/ou hypotonie. Nous avons inclus les études même si les auteurs n’ont pas spécifié la méthode utilisée pour diagnostiquer la dystonie chez leur population étudiée. Les critères de jugement principaux étaient l'évolution de la dystonie et les effets indésirables. Les critères de jugement secondaires étaient : l'activité, y compris la mobilité et la fonction des membres supérieurs ; la participation aux activités de la vie quotidienne ; la douleur ; et la qualité de vie.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standard attendues par Cochrane.

Résultats principaux: 

Nous avons identifié une étude, réalisée en Australie, qui répondait aux critères d'inclusion. Il s'agissait d'un essai croisé randomisé, en double-aveugle, contrôlé par placebo, mené auprès de 16 enfants (10 garçons et 6 filles) présentant une paralysie cérébrale dystonique prédominante et un âge moyen de 9 ans (écart-type de 4,3 ans, intervalle de 2 à 17 ans). Nous avons considéré que l'essai présentait un faible risque de biais de sélection, de performance, de détection, d'attrition, de rapport et d'autres sources de biais. Nous avons jugé que la qualité des données probantes selon GRADE était faible.

Nous n'avons constaté aucune différence dans les scores moyens de suivi du changement de la dystonie mesurés par l'échelle de Barry Albright de Dystonie ( BAD), qui évalue huit régions corporelles sur une échelle de 5 points (0 = aucun à 4 = sévère), ce qui donne un score total de 0 à 32. Le score BAD était supérieur de 2,67 points (intervalle de confiance (IC à 95 %) de -2,55 à 7,90 ; preuves de faible qualité), ce qui signifie une dystonie plus sévère, dans le groupe traité. Le trihexyphénidyle peut être associé à un risque accru d'effets indésirables (risque relatif de 2,54, IC à 95 % : 1,38 à 4,67 ; preuves de faible qualité).

Il n'y avait aucune différence dans les notes moyennes de suivi du fonctionnement des membres supérieurs mesurées par le Quality of Upper Extremity Skills Test (Évaluations analytique et fonctionnelle du membre supérieurs), qui comporte quatre domaines qui évaluent collectivement 36 points (chacun noté sur 1 ou 2) et donnent une note totale de 0 à 100. Dans le groupe traité, le score était inférieur de 4,62 points (IC à 95 % -10,98 à 20,22 ; preuves de faible qualité), ce qui correspond à un fonctionnement moins bon que dans le groupe témoin. Nous avons trouvé des données de faible qualité sur l'amélioration de la participation aux activités de la vie quotidienne (représentée par des notes plus élevées) du groupe traité, telle que mesurée par trois outils : 18.86 points de plus (IC à 95 %, de 5,68 à 32,03) pour l'échelle d'atteinte des buts (jusqu'à cinq buts fonctionnels sur une échelle de 5 points (-2 = beaucoup moins que prévu à +2 = beaucoup plus que prévu)) ; 2,91 points de plus (IC à 95 %, de 1,01 à 4,82) pour la sous échelle de satisfaction de la Mesure canadienne du rendement occupationnel (MCRO ; satisfaction du rendement dans cinq domaines problématiques sur une échelle de 10 (1 = pas du tout satisfait à 10 = extrêmement satisfait)) ; et 2,24 points de plus (IC à 95 %, 0,64 à 3,84) pour la sous-échelle de rendement de la MCRO (rendement dans jusqu’à cinq domaines problématiques sur une échelle de 10 (1 = pas capable d’effectuer à 10 = capable d’effectuer très bien)).

L'étude n'a pas fait état de la douleur ou de la qualité de vie.

Notes de traduction: 

Post-édition : Noëmie VAN LANDEGHEM - Révision : Camille GAMEIRO (M2 ILTS, Université Paris Diderot)

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.