Prévenir la douleur après une chirurgicale cérébrale

Le problème

Il est de plus en plus évident que les personnes qui ont subi une chirurgie cérébrale ressentent une douleur importante. Cette douleur peut avoir de graves conséquences, notamment une tension artérielle élevée, de l'agitation, un temps de récupération prolongé et un risque accru de céphalées à long terme. Des recherches ont étudié différents médicaments dans le but de réduire le risque de douleur chez ces patients. Il y a maintenant plus de données sur les possibilités pour diminuer la douleur chez les adultes bénéficiant d’une chirurgie cérébrale, mais on ignore quelles sont les options les plus efficaces.

La question

Cette revue avait pour objectif de déterminer quels médicaments offrent les meilleures chances de réduire la douleur chez les adultes bénéficiant d’une chirurgie cérébrale, en recueillant et en combinant les résultats d'études portant sur les médicaments analgésiques pour ce groupe de patients. Afin de fournir une réponse précise à cette question, seules les études menées conformément à une norme de qualité élevée et approuvée ont été incluses. Des études publiées dans différentes langues et différents pays ont été incluses afin d'obtenir autant d'informations que possible.

En plus de déterminer quels médicaments étaient les plus efficaces pour prévenir ou réduire la douleur après une chirurgie cérébrale, cette revue a tenté de déterminer des renseignements supplémentaires tels que la quantité de traitement antidouleur supplémentaire nécessaire en plus du traitement à l'étude, si la douleur des participants était correctement contrôlée ou non, à quel point les participants étaient somnolents, quels effets secondaires ils éprouvaient et combien de temps ils devaient rester aux soins intensifs et à l'hôpital. Cette revue visait également à déterminer si certains traitements fonctionnaient mieux lorsqu'ils étaient administrés avant ou après l'intervention chirurgicale ou pour les personnes qui avaient recours à des approches différentes de la chirurgie cérébrale.

Les résultats

Au total, 43 études éligibles (42 achevées et une toujours en cours) ont été trouvées. Sur les 42 études réalisées (3548 participants), 10 ont porté sur l'injection d'un anesthésique local dans le cuir chevelu, 12 sur l'injection d'un anesthésique local autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu, 8 sur les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), 4 sur la dexmedétomidine, 4 ont étudié l'acétaminophène (ou paracétamol), 2 ont étudié les opioïdes, 3 ont étudié la gabapentine ou la prégabaline (médicaments anti-épileptiques qui peuvent également être utilisés pour soulager la douleur) ainsi que 1 étude chacun des anesthésiques locaux injectés dans les veines, un anesthésique local injecté dans la bouche et la flupirtine.

On a obtenu suffisamment d'information pour calculer les effets anti-douleur globaux des éléments suivants : injections d'anesthésique local autour de la plaie chirurgicale, injections d'anesthésique local autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu, AINS, acétaminophène, dexmedetomidine et prégabaline ou gabapentine. Lorsque seules des études de grande qualité ont été examinées : Les AINS ont réduit la douleur jusqu'à 24 heures après la chirurgie, la dexmédétomidine et les anesthésiques locaux injectés autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu ont réduit la douleur dans les 12 premières heures après la chirurgie, la prégabaline ou la gabapentine dans les 6 premières heures après la chirurgie et les injections d'anesthésiques locaux autour de la plaie ont réduit considérablement la douleur 48 heures après la chirurgie, sans diminuer la douleur à des temps plus précoces.

Lorsque le moment de l'injection des anesthésiques locaux a été étudié, les anesthésiques locaux injectés autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu procuraient un meilleur soulagement précoce de la douleur (6 premières heures) lorsqu'ils étaient injectés après la chirurgie et un meilleur soulagement tardif de la douleur (12 et 24 heures) lorsque l'injection était faite avant la chirurgie.

Les interventions suivantes ont également permis de réduire le recours à d'autres antalgiques : anesthésiques locaux injectés autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu et dexmédétomidine. On a constaté que la gabapentine ou la prégabaline réduisait le risque de nausées et de vomissements après la chirurgie.

L'acétaminophène n'a pas permis de prévenir la douleur après une chirurgie cérébrale ou de réduire le recours à d'autres antalgiques.

On n'a pas trouvé suffisamment d’informations pour déterminer si l'un ou l'autre de ces médicaments rendait les participants plus ou moins somnolents, avait une incidence sur la durée de leur séjour aux soins intensifs ou si différents médicaments étaient plus efficaces pour les adultes qui subissent différentes approches de la chirurgie cérébrale.

La qualité globale des données probantes qui ont contribué aux résultats de cette revue a été évaluée et jugée " élevée " pour les effets analgésiques des AINS, " modérée " à " faible ". pour les effets analgésiques de la dexmédétomidine, de l'acétaminophène, de la prégabaline et de la gabapentine et des anesthésiques locaux injectés autour de nerfs spécifiques du cuir chevelu et ' faible' à' très faible' pour les effets analgésiques des anesthésiques locaux administrés autour de la cicatrice, les besoins supplémentaires en antalgiques et le risque de nausée et vomissements après chirurgie .

Conclusions des auteurs: 

Il existe des preuves de haute qualité que les AINS réduisent la douleur jusqu'à 24 heures après l'opération. Les preuves d'une réduction de la douleur avec la dexmédétomidine, la prégabaline ou la gabapentine, les blocs de cuir chevelu et l'infiltration du cuir chevelu sont moins certaines et de qualité très faible à moyenne. Il existe des preuves de faible qualité que les blocs du scalp et la dexmédétomidine peuvent réduire les besoins supplémentaires en analgésiques. Il existe des données de faible qualité indiquant que la gabapentine ou la prégabaline peut diminuer les nausées et les vomissements, avec la mise en garde que le nombre total d'événements pour cette comparaison était faible.

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Contexte: 

La douleur post-chirurgie cérébrale peut compromettre la récupération. Plusieurs interventions pharmacologiques ont été utilisées pour prévenir la douleur après une craniotomie ; cependant, on manque actuellement de données probantes sur les interventions les plus efficaces.

Objectifs: 

Les objectifs sont d'évaluer l'efficacité des interventions pharmacologiques pour la prévention de la douleur aiguë post-opératoire chez les adultes subissant une chirurgie du cerveau ; de les comparer en termes de besoins analgésiques additionnels, d'incidence des céphalées chroniques, d'effets sédatifs, de durée du séjour à l'hôpital et d'événements indésirables ; de déterminer si ces caractéristiques sont différentes pour certains sous-groupes.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons fait des recherches dans MEDLINE, Embase, CINAHL, CENTRAL, Web of Science et deux registres d'essais ainsi que dans les registres de vérification des références et des citations le 28 novembre 2018.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais cliniques comparatifs randomisés, avec ou sans insu, évaluant les interventions pharmacologiques pour la prévention de la douleur aiguë postopératoire chez les adultes subissant une neurochirurgie, qui avaient au moins une mesure validée des résultats de la douleur.

Recueil et analyse des données: 

Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standards de Cochrane. Nous avons calculé les différences moyennes pour le critère de jugement principal de l'intensité de la douleur ; tous les scores de douleur sur une échelle de 0 à 100 ont été convertis sur une échelle de 0 à 10.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 42 études terminées (3548 participants) et identifié une étude en cours.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) réduisent la douleur jusqu'à 24 heures (0 à 6 heures, DM -1,16, IC à 95 % -1,57 à -0,76 ; 12 heures, DM -0,62, IC à 95 % -1,11 à -0,14 ; 24 heures, DM -0,66, IC à 95 % -1,18 à -0,13 ; 6 études, 742 participants ; toutes ces données sont de haute qualité). Les résultats pour d'autres critères de jugement étaient imprécis (besoins supplémentaires en analgésiques : DM 1,29 mg, IC à 95 % -5,0 à 2,46, 4 études, 265 participants ; nausées et vomissements RR 1,34, IC à 95 % 0,30 à 5,94, 2 études, 345 participants ; preuves de faible qualité).

La dexmédétomidine réduit la douleur jusqu'à 12 heures (0 à 6 heures, DM -0,89, IC à 95 % -1,27 à -0,51, preuves de qualité moyenne ; 12 heures, DM -0,81, IC à 95 % -1,21 à -0,42, preuves de faible qualité). Elle n'a pas montré d'efficacité après 24 heures (DM -0,08, IC à 95 % -0,32 à 0,16 ; 2 études, 128 participants ; preuves de faible qualité). La dexmédétomidine peut diminuer les besoins en analgésiques supplémentaires (DM -21,36 mg, IC à 95 % -34,63 à -8,1 mg, 2 études, 128 participants, preuves de faible qualité). Les résultats pour les autres critère de jugement étaient imprécis (nausées et vomissements RR -0,43, IC à 95 % 0,06 à 3,08, 3 études, 261 participants ; hypotension RR 0,5, IC à 95 % 0,05 à 5,28, 3 études, 184 participants ; preuves de faible qualité).

Les blocs du scalp peuvent réduire la douleur jusqu'à 48 heures (0 à 6 heures, DM -0,98, IC à 95 % -1,66 à -0,3, 10 études, 414 participants ; 12 heures, DM -0,95, IC à 95 % -1,53 à -0,37, 8 études, 294 participants ; 24 heures, DM -0.78, IC à 95 % -1,52 à -0,05, 9 études, 433 participants, toutes des preuves de qualité inférieure ; 48 heures, DM -1,34, 95 % IC -2,57 à -0,11, 4 études, 135 participants, preuves de très faible qualité). Si l'on exclut les études présentant un risque élevé de biais, la significativité persiste à 12 heures seulement. Les blocs du scalp peuvent diminuer les besoins supplémentaires en analgésie (DMS -1,11, IC à 95 % -1,97 à -0,25, 7 études, 314 participants). Les résultats pour les autres critères de jugement étaient imprécis (nausées et vomissements RR 0,66, IC à 95 % 0,33 à 1,32, 4 études, 165 participants, preuves de très faible qualité).

L'infiltration du cuir chevelu peut réduire la douleur postopératoire, mais l'efficacité n'était pas constante, avec un effet significatif après 12 et 48 heures seulement (12 heures, DM -0,71, IC à 95 % -1,34 à -0,08, 7 études, 309 participants, données de faible qualité ; 48 heures, DM -1,09, IC à 95 % -2,13 à -0,06, 3 études, 128 participants, preuves de qualité moyenne). Aucun bénéfice n'a été observé à d'autres temps de mesure (0 à 6 heures, DM -0,64, IC à 95 % -1,28 à -0,00, 9 études, 475 participants, preuves de qualité moyenne ; 24 heures, DM -0,39, IC à 95 % -1,06 à 0,27,6 études, 260 participants, preuves de faible qualité. L'infiltration du cuir chevelu peut réduire les besoins supplémentaires en analgésie (DM -9,56 mg, IC à 95 % -15,64 à -3,49, 6 études, 345 participants, preuves de très faible qualité). Lorsque les études à risque élevé de biais ont été exclues, l'infiltration du cuir chevelu a perdu le bénéfice sur la réduction de la douleur après 12 heures et les effets sur les besoins analgésiques supplémentaires, mais a conservé le bénéfice de réduction de la douleur après 48 heures (DM -0,56, IC à 95 % -1,20 à -0,32, 2 études, 100 participants, preuves de très faible qualité). Les résultats pour les autres critères de jugement étaient imprécis (nausées et vomissements, RR 0,74, IC à 95 % 0,48 à 1,41, 4 études, 318 participants, preuves de faible qualité).

La prégabaline ou la gabapentine peut réduire la douleur jusqu'à 6 heures (2 études, 202 participants), DM -1,15, IC à 95% -1,66 à -0,6, 2 études, 202 participants, preuves de faible qualité). Une étude a examiné l'efficacité des analgésiques à 12 heures et a montré un bénéfice significatif. Aucune efficacité analgésique n'a été démontrée au-delà des 12 heures (24 heures, DM -0,29, IC à 95 % -0,78 à -0,19 ; 48 heures, DM - 0,06, IC à 95 % -0,86 à 0,77, 2 études, 202 participants, preuves de faible qualité). Les besoins supplémentaires en analgésie n'étaient pas significativement diminués (DM -0,37 (IC à 95 % : IC -1,10 à 0,35, 3 études, 234 participants, preuves de faible qualité). Le risque de nausées et de vomissements a été significativement réduit (RR 0,51, IC à 95 % : 0,29 à 0,89, 3 études, 273 participants, preuves de faible qualité). Les résultats pour d'autres critère de jugement étaient imprécis (besoins supplémentaires en antalgiques) : DM -0,37, IC à 95 % -1,10 à 0,35, 3 études, 234 participants, données de faible qualité).

L'acétaminophène n'a présenté aucun avantage analgésique (0 à 6 heures, DM -0,35, IC à 95 % -1,00 à 0,30 ; 12 heures, DM -0,51, IC à 95 % -1,04 à 0,03, 3 études, 332 participants, preuves de qualité moyenne ; 24 heures, DM -0,34, IC à 95 % -1,20 à 0,52, 4 études, 439 participants, preuves de bonne qualité). Les résultats pour les autres critères de jugement sont demeurés imprécis (besoins additionnels en analgésie, DM 0,07, IC à 95 % -0,86 à 0,99, 4 études, 459 participants, preuves de haute qualité ; durée des hospitalisations, DM -3,71, IC à 95 % -14,12 à 6,7, 2 études, 335 participants, preuves de qualité moyenne).

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Stéphanie Roullet et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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