Objectif de la revue
L'objectif de cette revue Cochrane était de comparer le traitement de la dégénérescence maculaire néovasculaire liée à l'âge (DMLA humide) par des agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF). La présente revue porte sur deux questions : (1) l'utilisation d'agents anti-VEGF est-elle préférable à leur non-utilisation? (2) quel agent anti-VEGF fonctionne le mieux?
Messages clés
Les agents anti-VEGF valaient mieux que l'absence d'agents anti-VEGF ou d'autres types de traitement pour les patients atteints de DMLA humide. Lorsque les études ont comparé les agents anti-VEGF, les chercheurs ont constaté que le ranibizumab et le bévacizumab étaient similaires sur le plan des critères de jugement liés à la vision et du nombre d'effets indésirables chez les participants suivis pendant au moins un an. La principale différence était le coût, car le bévacizumab était moins cher.
Sujets étudiés dans la revue
La DMLA humide est une cause fréquente de perte de vision grave chez les personnes âgées de 55 ans et plus. La macula, située dans la rétine centrale à l'arrière de l'œil, est importante pour la vision. La DMLA humide survient lorsqu'une croissance anormale des vaisseaux sanguins à l'arrière de l'œil endommage la macula. La DMLA humide entraîne une vision floue ou assombrie, ou encore une distorsion du champ visuel central, réduisant ainsi la capacité du patient à lire, à conduire et à apercevoir des visages.
L'injection dans l'œil de médicaments comme le pegaptanib, le ranibizumab et le bévacizumab peut aider à bloquer la croissance anormale des vaisseaux sanguins à l'arrière de l'œil. Ces médicaments sont connus collectivement comme agents anti-VEGF. Nous avons effectué cette revue afin de comparer les effets bénéfiques et les risques d'un traitement avec agents anti-VEGF par rapport à aucun traitement anti-VEGF et pour comparer des agents anti-VEGF différents.
Principaux résultats de la revue
Nous avons trouvé 16 études portant sur un total de 6 347 personnes atteintes de DMLA humide. Six études ont comparé les agents anti-VEGF à aucun traitement anti-VEGF et dix études ont comparé le bévacizumab par rapport à ranibizumab. Des sociétés pharmaceutiques ont mené ou parrainé quatre de ces études. Les chercheurs ont mené les 16 études dans divers centres sur cinq continents (Amérique du Nord et du Sud, Europe, Asie et Australie) ; ils ont traité des personnes et assuré un suivi pendant au moins un an.
Après un an, un plus grand nombre de personnes traitées avec l'un des trois agents anti-VEGF (pegaptanib, ranibizumab ou bévacizumab) avaient une vision améliorée, moins de participants on éprouvé une perte de vision et moins étaient légalement aveugles dans l'œil à l'étude comparativement aux personnes qui n'avaient pas reçu d'agents anti-VEGF. Les personnes traitées avec des agents anti-VEGF ont également éprouvé des améliorations structurelles dans l'œil. Les médecins utilisent ces indices structurels pour surveiller la maladie et déterminer le besoin d'un traitement supplémentaire. Les personnes qui n'ont pas reçu d'agents anti-VEGF n'ont pas éprouvé le même type d’amélioration.
Le traitement par le ranibizumab ou le bévacizumab a entraîné des améliorations visuelles plus importantes que le traitement par le pegaptanib dans les essais comparant un traitement avec agents anti-VEGF au traitement sans agents anti-VEGF. La comparaison du bévacizumab par rapport au ranibizumab n'a révélé aucune différence majeure en ce qui concerne les critères de jugement liés à la vision. La principale différence entre les deux agents était le coût ; le bévacizumab coûtait moins cher.
De l’inflammation et une augmentation de la pression à l’intérieur de l'œil étaient les effets indésirables les plus courants causés par les agents anti-VEGF. Les chercheurs ont signalé le développement d’une endophtalmite (infection de la partie interne de l'œil, qui peut mener à la cécité) dans moins de 1 % des yeux traités par des agents anti-VEGF et ils n'ont observé aucun cas d’endophtalmite dans les yeux qui n'avaient pas été traités par agents anti-VEGF. La L'apparition d'effets secondaires graves, comme l'hypertension artérielle et les hémorragies internes, était faible et similaire entre les groupes traités par agents anti-VEGF et ceux traités sans agents anti-VEGF. Le nombre total d'effets secondaires était très bas, de sorte qu'il est impossible de dire quel médicament a pu entraîner les effets les plus nocifs.
À quel point cette revue est-elle à jour ?
Les chercheurs Cochrane ont recherché des études qui avaient été publiées jusqu'en 31 janvier 2018.
Les résultats de cette revue démontrent l'efficacité des agents anti-VEGF (pegaptanib, ranibizumab et bévacizumab) pour le maintien de l'acuité visuelle ; les études démontrent que le ranibizumab et le bévacizumab améliorent l'acuité visuelle des yeux ayant été traités par ces agents et sont tout aussi efficaces. L'information disponible sur les effets indésirables de chaque médicament n'indique pas d’incidence plus élevée de complications qui pourraient nuire à la vision avec traitement par injection intravitréenne d'agents anti-VEGF par rapport aux interventions témoins ; toutefois, les tailles des échantillons étudiés n'étaient pas suffisantes pour pouvoir estimer les différences dans les critères de jugement d’innocuité rares. Les revues Cochrane futures devraient incorporer la recherche évaluant les régimes posologiques variables d’agents anti-VEGF, les effets de leur utilisation à long terme, l'utilisation de thérapies combinées (p. ex. traitement anti-VEGF plus thérapie photo-dynamique) ainsi que d’autres méthodes d'administration de ces agents.
La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) est la cause la plus fréquente de perte de vision grave et irrémédiable chez les personnes âgées de 55 ans et plus dans les pays développés. La néovascularisation choroïdienne (NVC) secondaire à la DMLA explique la plupart des cas de perte de vision grave liée à la DMLA. L'injection intravitréenne d'agents anti-facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (anti-VEGF) est un traitement qui vise à bloquer la croissance de vaisseaux sanguins anormaux dans l'œil afin de prévenir la perte de vision et, dans certains cas, pour améliorer la vision.
- Étudier les effets oculaires et systémiques de l'injection intravitréenne de trois agents anti-VEGF (pegaptanib, ranibizumab et bévacizumab) et la qualité de vie qui y est associée, par rapport à l'absence de traitement anti-VEGF chez les patients atteints de la DMLA néovasculaire
- Comparer les effets relatifs de l'un de ces agents anti-VEGF par rapport à un autre lorsqu'ils sont administrés à des doses et à des régimes comparables
Afin de déterminer les études admissibles à cette revue, nous avons effectué une recherche dans le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), qui comprend le registre Cochrane des essais contrôlés sur la vue (consulté le 31 janvier 2018) ; MEDLINE Ovid (1946 au 31 janvier 2018) ; Embase Ovid (1947 au 31 janvier 2018) ; Latin American and Caribbean Health Sciences Literature Database (LILACS) (1982 au 31 janvier 2018) ; le registre International Standard Randomized Controlled Trials Number (ISRCTN) (www.isrctn.com/editAdvancedSearch - consulté le 31 janvier 2018) ; ClinicalTrials.gov (www.clinicaltrials.gov - consulté le 28 novembre 2018) ; le Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (www.who.int/ictrp/search/en - consulté le 31 janvier 2018). Nous n'avons imposé aucune restriction quant à la date ou la langue dans les recherches électroniques pour les essais.
Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés (ECR) ayant évalué le pegaptanib, le ranibizumab ou le bévacizumab les uns par rapport aux autres ou par rapport à un traitement témoin (p. ex. simulacre, thérapie photo-dynamique), dans lesquels on a suivi les participants pendant au moins un an.
Deux auteurs de la revue ont examiné indépendamment les études, extrait les données et évalué le risque de biais. Nous avons communiqué avec les auteurs des essais pour obtenir des données supplémentaires. Nous avons comparé les critères de jugement à l'aide du risque relatif (RR) ou de différences moyennes (DM). Nous avons utilisé les procédures méthodologiques standards définies par Cochrane.
Nous avons inclus 16 ECR qui comprenaient un total de 6 347 participants atteints de la DMLA néovasculaire (le nombre de participants par essai variait de 23 à 1 208) et nous avons identifié un essai possiblement pertinent en cours. Six essais ont comparé le traitement anti-VEGF (pegaptanib, ranibizumab ou bévacizumab) au traitement témoin, et dix essais ont comparé le bévacizumab par rapport à ranibizumab. Les sociétés pharmaceutiques ont mené ou parrainé quatre essais, mais n'ont financé aucune des études qui ont évalué le bévacizumab. Les chercheurs ont mené ces essais dans de divers centres répartis sur cinq continents (Amérique du Nord et du Sud, Europe, Asie et Australie). Dans l'ensemble, la certitude des données probantes était modérée à élevée, et la plupart des essais présentaient un faible risque global de biais. Tous les essais sauf un avaient été enregistrés prospectivement.
Comparativement à ceux qui ont reçu un traitement témoin, un plus grand nombre de participants ayant reçu une injection intravitréenne de l'un des trois agents anti-VEGF ont gagné 15 lettres ou plus en acuité visuelle (risque relatif [RR] 4,19, intervalle de confiance [IC] à 95 % : 2,32 à 7,55 ; données probantes de certitude moyenne), perdu moins de 15 lettres en acuité visuelle (RR 1,40, IC à 95 % : 1,27 à 1,55 ; données probantes de haute certitude) et constaté une amélioration dans la moyenne de leur acuité visuelle (différence moyenne de 6,7 lettres, IC à 95 % : 4,4 à 9,0 dans un essai clinique sur le pegaptanib ; différence moyenne de 17,8 lettres, IC à 95 % : 16,0 à 19,7 dans trois essais sur le ranibizumab ; données probantes de certitude moyenne) après un suivi de 12 mois. Les participants ayant reçu un traitement avec agents anti-VEGF ont démontré une amélioration des critères de jugement morphologiques (p. ex. taille de la NVC, épaisseur de la rétine centrale) comparativement aux participants non traités avec agents anti-VEGF (données probantes de certitude modérée). Aucun essai n'a comparé directement le pegaptanib par rapport à un autre agent anti-VEGF et n'a suivi les participants pendant un an ; toutefois, comparativement aux traitements témoins, le ranibizumab et le bévacizumab ont chacun entraîné des améliorations plus importantes des critères de jugement sur l'acuité visuelle que le pegaptanib.
Les critères de jugement sur l'acuité visuelle après l'administration du bévacizumab et du ranibizumab étaient semblables lorsque les mêmes ECR comparaient les mêmes schémas pour un gain égal ou supérieur à 15 lettres d'acuité visuelle (RR 0,95, IC à 95 % : 0,81 à 1,12 ; données probantes de haute certitude) et une perte inférieure à 15 lettres d'acuité visuelle (RR 1,00, IC à 95 % : 0,98 à 1,02 ; données probantes de haute certitude); les résultats ont montré une amélioration de l'acuité visuelle moyenne similaire (différence moyenne [DM] -0,5 lettre, IC à 95 % : - 1,5 à 0,5; données probantes de haute certitude) après un an de suivi, malgré le coût beaucoup moins élevé du bévacizumab comparé à celui du ranibizumab. La réduction de l'épaisseur de la rétine centrale était moindre chez les participants traités par le bévacizumab que chez les participants traités par le ranibizumab après un an (DM -11,6 μm, IC à 95 % : -21,6 à -1,7 ; données probantes de haute certitude) ; toutefois, cette différence se situe dans la plage des erreurs de mesure et nous ne l'avons pas interprétée comme étant significative sur le plan clinique.
De l'inflammation oculaire et une augmentation de la pression intraoculaire (PIO) après l'injection intravitréenne étaient les effets indésirables oculaires graves les plus fréquemment signalés. Les chercheurs ont signalé des cas d’endophtalmie chez moins de 1 % des participants ayant reçu un traitement par agent anti-VEGF et dans aucun cas dans les groupes témoins. Le nombre de graves effets systémiques indésirables dans les groupes traités par agents anti-VEGF et dans les groupes témoins était comparable; toutefois, il est possible que les nombres d'effets indésirables et de participants fussent insuffisants pour pouvoir démontrer une différence significative entre les deux groupes (données probantes d'une certitude faible à modérée). Les chercheurs ont rarement mesuré et rapporté des données sur la fonction visuelle, la qualité de vie ou les critères de jugement économiques.
Post-édition effectuée par Dara O’Connor et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr