L'ablation par radiofréquence pour le traitement du cancer du foie (carcinome hépatocellulaire)

Contexte

Le cancer du foie (carcinome hépatocellulaire) est le cinquième cancer le plus fréquent dans le monde entier. Dans la majorité des patients, le carcinome hépatocellulaire est diagnostiqué à des stades avancés de la maladie et il est le plus souvent accompagné d'une cirrhose du foie. À ce jour, il n'existe aucun remède médical pour les patients atteints de carcinome hépatocellulaire, et le traitement vise à ralentir la croissance tumorale. Dans les pays à revenus élevés, environ 30% des patients présentent les plus favorables stades de carcinome hépatocellulaire. Pour ces patients, les techniques d'ablation percutanée (destruction des cellules cancéreuses par la chaleur, le froid, ou de substances chimiques comme l’éthanol), la résection chirurgicale (ablation de la partie du foie), et une greffe du foie (qui est limitée par la pénurie de don d’organes) sont actuellement considérés comme potentiellement curatifs. L’ablation par radiofréquence ARF (thermale) est la plus élaborée des interventions percutanées jusqu' ici. La chaleur causée par un courant électrique est administrée par des sondes qui sont insérées à travers la peau (voie percutanée).

Caractéristiques de l'étude

Les auteurs de la revue ont consulté la littérature médicale afin de clarifier le rôle de l'ARF pour le traitement du carcinome hépatocellulaire et comparé ses bénéfices et effets indésirables avec l'absence de traitement, un placebo (un faux traitement), ou d'autres traitements (tels que la résection hépatique, l'injection percutanée d'éthanol (IPE), l'injection percutanée d'acide acétique (IPA), l’ablation au laser ou par micro-ondes et une greffe du foie). Nous avons recherché des essais cliniques randomisés (où les personnes ont été assignées au hasard à l'un, deux ou plusieurs groupes de traitements) de personnes atteintes de carcinome hépatocellulaire qui pouvaient recevoir l'ARF. Les preuves actualisées jusqu'en septembre 2013.

Résultats principaux et qualité des preuves

Nous n'avons trouvé aucun essai comparant l'ARF à l'absence d'intervention, un placebo, la chimiothérapie, ou la transplantation hépatique.

Les auteurs de la revue ont trouvé des preuves de qualité moyenne issues de deux essais à faible risque de biais (où il y avait un faible risque méthodologique dans le plan d'étude, la méthode de prélèvement ou l'interprétation des résultats) randomisant 578 patients, ce qui suggérait que la résection hépatique a donné des meilleurs résultats concernant la survie globale (la durée pendant laquelle le patient reste en vie), la survie sans événement (temps pendant lequel la personne reste sans cancer ou sans symptômes liés au cancer), et de progression (temps de vie pendant lequel des patients atteints de cancer sont sans aggravation) par rapport à une ARF. Cependant, comme la résection est une procédure invasive, elle a huit fois plus de risque de complications majeures par rapport à une ARF. Les patients réséqués passaient deux fois plus long temps à l'hôpital que les patients avec ARF. Des preuves de qualité moyenne suggéraient que l'ARF prolonge la survie et réduit le nombre de récidives du cancer en comparaison avec l’IPE ou l'IPA. Cette conclusion était basée sur des données issues de six essais cliniques randomisés portant sur 1088 participants. Certains patients ont développé des effets secondaires comme de la fièvre, éruptions cutanées et douleurs. Ils surviennent à la même fréquence dans les deux groupes de traitement. Nous avons calculé le nombre de patients qui seraient nécessaires pour établir une réduction du risque relatif (il s’agit d’une comparaison de risque d'un événement se produisant pour un groupe de traitement par rapport à un autre groupe de traitement) pour la survie de 20%. Les auteurs de la revue ont constaté que pour les deux comparaisons, ARF versus IPE ou IPA, et ARF versus résection, le nombre de patients dans les essais inclus était trop faible pour tirer des conclusions définitives. Aucune conclusion définitive ne peut être tirée de la comparaison de l'ARF à d'autres techniques d'intervention ou à une combinaison d’approches. Les informations fournies par les essais uniques étaient limitées. Des essais cliniques randomisés supplémentaires avec de faibles risques de biais (faibles risques d'erreurs systématiques conduisant à une surestimation des effets bénéfiques et une sous-estimation des effets nocifs) et un faible risque d'effet de hasard (erreurs aléatoires conduisant à une surestimation ou sous-estimation des effets bénéfiques et délétères) sont nécessaires.

Conclusions des auteurs: 

Les effets de l'ARF versus l'absence d'intervention, le traitement par chimiothérapie ou transplantation hépatique sont inconnus. Nous n'avons trouvé des preuves de qualité moyenne indiquant que la résection hépatique est supérieure à une ARF concernant la survie. Cependant, l'ARF pourrait être associée à moins de complications et une hospitalisation plus courte que la résection hépatique. Nous avons trouvé des preuves de qualité modérée indiquant que l'ARF semble plus efficace que l'injection percutanée d'éthanol concernant la survie. Il y avait trop peu de données pour recommander ou réfuter l'ablation par d'autres techniques que l'ARF. Des essais cliniques randomisés supplémentaires avec un faible risque de biais et des faibles risques d'erreurs aléatoires évaluant l'effet de l'ARF sont nécessaires.

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Contexte: 

Le carcinome hépatocellulaire est le cinquième cancer le plus fréquent dans le monde entier. Des traitements interventionnels percutanés tels que ablation par radiofréquence ARF (thermale) ont été développés pour les carcinomes hépatocellulaires précoces. L'ARF est en cocurrence avec d'autres techniques interventionnelles telles que l'injection percutanée d'éthanol, la résection chirurgicale, et une greffe du foie. Les bénéfices et les inconvénients potentiels de l'ARF par rapport à un placebo, à l'absence d'intervention, à la chimiothérapie, à la résection hépatique, à la greffe de foie, ou à d'autres interventions ne sont pas clairs.

Objectifs: 

Évaluer les effets bénéfiques et nocifs de l'ARF versus un placebo, l'absence d'intervention ou à toute autre approche thérapeutique chez les patients atteints de carcinome hépatocellulaire.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre d’essais contrôlés du groupe Cochrane sur les affections hépato-biliaires, le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL), MEDLINE, EMBASE et ISI Web of Science jusqu’à septembre 2012. Nous avons effectué une recherche manuelle dans les résumés de réunions de l'ASCO, ESMO, l’AASLD, EASL, APASL et des références bibliographiques des articles. Nous avons également contacté des chercheurs dans le domaine (dernière recherche en septembre 2012).

Critères de sélection: 

Nous avons pris en compte pour l'inclusion des essais cliniques randomisés étudiant les effets de l'ARF à un placebo, à l'absence d'intervention ou à tout autre approche thérapeutique pour le carcinome hépatocellulaire de patients indépendamment de la mise en aveugle, de la langue et du type de publication.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont effectué indépendamment la sélection des essais, l'évaluation du risque de biais et l'extraction des données. Nous avons contacté les principaux investigateurs pour obtenir des informations manquantes. Nous avons analysé les taux de hasard (HR) pour les mesures pertinentes d'effet sur la survie globale, la survie à deux ans, la survie sans événement et les récidives locales avec un intervalle de confiance (IC) à 95%. En outre, nous avons analysé les données dichotomiques de survie à l'aide des risques relatifs (RR). Nous avons utilisé l'analyse séquentielle d'essais afin de contrôler le risque d'erreurs aléatoires («effet hasard»).

Résultats principaux: 

Nous n’avons identifié aucun essai comparant l'ARF à un placebo, à l'absence d'intervention, ou une greffe du foie. Nous avons identifié et inclus 11 essais cliniques randomisés avec 1819 participants qui incluent quatre comparaisons: L'ARF versus la résection hépatique (trois essais, 578 participants); l'ARF versus l'injection percutanée d'éthanol (six essais, 1088 participants), y compris un essai composé de trois branches qui ont également étudié l'ARF versus l’injection d'acide acétique; l'ARF versus ablation par micro-ondes (un essai, 72 participants) et l'ARF par rapport à l'ablation par laser (un essai, 81 participants). Dix des onze essais inclus documentaient le critère de jugement principal de cette revue qui était la survie globale. Le taux de complications majeures ou de décès lié à la procédure a été rapporté par 10 essais. Le risque de biais global était considéré comme faible dans cinq essais et élevé dans six essais. Pour une analyse en sous-groupe, nous avons uniquement inclus les essais présentant un faible risque de biais. Concernant la comparaison entre l'ARF et la résection hépatique, il y avait des preuves de qualité moyenne, issues de deux essais présentant un faible risque de biais, dans lesquels la résection hépatique semble plus efficace que l'ARF concernant la survie globale (HR 0,56; IC à 95%, de 0,40 à 0,78) et la survie à deux ans (HR 0,38; IC à 95%, de 0,17 à 0,84). Toutefois, si nous incluons un troisième essai à risque élevé de biais, la différence de survie globale devenait insignifiante (HR 0,71; IC à 95%, de 0,44 à 1,15). En ce qui concerne les critères de jugement de survie sans événement et la progression locale, la résection hépatique donnait également des meilleurs résultats que l'ARF. Cependant, le nombre de complications était plus élevée chez les participants traités chirurgicalement (rapport des cotes (RC) 8,24; IC à 95%, de 2,12 à 31,95). L'ARF semblait plus efficace que l'injection d’acide acétique percutané d'éthanol ou concernant la survie globale (HR 1,64; IC à 95%, de 1,31 à 2,07). Le RR pour la mortalité était également en faveur de l'ARF, mais sans atteindre de signification statistique (150/490 (30,6%) dans le groupe d'acide acétique ou percutanée d'éthanol versus 119/496 (24,0%) dans le groupe de l'ARF; RR 1,76; IC à 95%, de 0,97 à 3,22). La proportion d'événements indésirables ne différait pas significativement entre l'ARF et l' injection d’acide acétique percutané d'éthanol (HR 0,70; IC à 95%, de 0,33 à 1,48). Des analyses séquentielles d'essais ont révélé que le nombre de participants dans les essais inclus était insuffisant et que d'autres essais sont nécessaires pour évaluer les effets de l'ARF par rapport à d'autres interventions.

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.