Les effets des politiques éducatives ou réglementaires ciblant les professionnels de santé habilités à prescrire des médicaments

Le but de cette revue Cochrane était de déterminer les effets des politiques ciblant les personnes qui prescrivent les médicaments. Les auteurs de cette revue ont recueilli et analysé toutes les études pertinentes afin de répondre à cette question et en ont trouvé deux.

La présente revue fait partie d'une série de revues planifiées ou terminées qui étudient les effets de différents types de politiques pharmaceutiques sur l'utilisation rationnelle des médicaments.

Principaux messages

Nous ne savons pas quels sont les effets des politiques éducatives ou réglementaires sur la prescription des médicaments puisque le niveau de confiance des données probantes est très faible.

Que sont les politiques éducatives et réglementaires ?

Les dépenses de santé consacrées aux médicaments représentent des sommes considérables, et qui ne cessent d’augmenter. De plus, les prestataires de soins de santé ne prescrivent pas toujours les bons médicaments. Les décideurs en santé recherchent donc un moyen de limiter le coût des médicaments tout en s'assurant que les patients reçoivent les médicaments dont ils ont besoin. C’est ce que les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les compagnies d’assurances essaient parfois de faire en ciblant les personnes qui prescrivent les médicaments.

L’un des moyens d’y parvenir serait d’introduire des politiques éducatives. Celles-ci peuvent inclure des lois, des règles et des réglementations qui obligent les prescripteurs de médicaments à suivre une formation, ou à recevoir certains types d'informations ou de retours sur leur manière de prescrire.

Une autre approche consisterait à mettre en place des politiques réglementaires. Ces dernières peuvent inclure des lois, des règles et des réglementations concernant la personne qui prescrit les médicaments, ainsi que le type et la quantité de médicaments qu’elle peut prescrire. La plupart du temps, ces personnes sont contrôlées pour s'assurer qu'elles respectent ces politiques.

Quels sont les principaux résultats de la revue ?

Les auteurs de la revue ont trouvé deux études pertinentes. Toutes deux ont été réalisées aux États-Unis et ont évalué les politiques mises en place à la fin des années 1990.

La première se concentre sur une politique visant à encourager les médecins à prescrire des antihistaminiques moins chers, mais qui seraient tout aussi efficaces que les autres. Dans une partie de cette étude, des lettres ont été envoyées aux médecins et à leurs patients pour leur présenter la nouvelle politique et leur donner des informations sur l'antihistaminique en question. Dans une autre partie, les lettres n'ont été envoyées qu'aux médecins.

Quant à la seconde étude, elle porte sur une politique visant à amener les médecins à prescrire moins de benzodiazépines à certains types de patients. Cette politique obligeait les médecins de l'État de New York à remplir trois copies du même formulaire à chaque fois qu'ils prescrivaient des benzodiazépines. Les pharmacies envoyaient ensuite une copie à un organisme de contrôle de l’état de New York, qui vérifiait ce que les médecins prescrivaient. L'étude a ensuite comparé ces médecins à d’autres praticiens de l'État du New Jersey qui n'étaient pas contrôlés de la même manière.

Les données probantes issues de ces deux études ont cependant un niveau de confiance très faible, et nous ne savons donc pas quels effets ces politiques ont réellement eu sur l’utilisation des médicaments par les patients. Par ailleurs, nous ne savons pas non plus si ces politiques ont eu un effet sur leur santé, leur utilisation des services de santé ou encore sur les coûts, puisque ces paramètres n’ont pas été mesurés dans ces études.

Cette revue est-elle à jour ?

Les auteurs de la revue ont cherché des études publiées avant mars 2018.

Conclusions des auteurs: 

Nous ne sommes pas certains des effets de politiques éducatives ou réglementaires ciblant les prescripteurs à cause du peu de données probantes et de leur niveau de confiance très faible. Par conséquent, il faut que l’impact de ces politiques soit rigoureusement évalué dans des études d’une conception adéquate. Des évaluations doivent être menées dans différents contextes, y compris dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires, et inclure différents types de prescripteurs et de médicaments.

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Contexte: 

Les produits pharmaceutiques contribuent énormément à la bonne santé de la population. Les médicaments sont cependant souvent utilisés de manière inadéquate. Une amélioration de l'utilisation des médicaments pourrait améliorer les résultats en matière de santé et économiser les ressources. Mais d'un autre côté, les politiques réglementaires et éducatives pourraient avoir des effets imprévus sur la santé et les coûts.

Objectifs: 

Évaluer les effets des politiques pharmaceutiques éducatives ou réglementaires ciblant les prescripteurs sur la consommation de médicaments, l’utilisation des services de santé, les indicateurs de santé et les coûts (dépenses).

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, MEDLINE, Embase et deux registres d'essais en mars 2018 ainsi que dans plusieurs d’autres bases de données entre 2014 et 2018. Nous avons examiné les références bibliographiques des études incluses ainsi que celles d'autres revues pertinentes, contacté les auteurs de ces revues et études pour trouver des études supplémentaires, et effectué une recherche de citations pour toutes les études incluses en utilisant la plateforme ISI Web of Science (recherche effectuée le 5 janvier 2016).

Critères de sélection: 

Essais randomisés, essais non randomisés, études de séries temporelles interrompues, études à mesures répétées et études contrôlées avant-après sur des politiques qui réglementent les personnes autorisées à prescrire des médicaments et d’autres politiques ciblant les prescripteurs. Nous avons inclus dans cette catégorie le contrôle et l'application des restrictions, la prescription de génériques, les programmes de mise en œuvre de directives de traitement, les politiques systématiques de pharmacovigilance, et la formation continue réglementée ou obligatoire ou l'amélioration de la qualité spécifiquement ciblée sur la prescription. Dans cette revue, nous employons « politiques » au sens des lois, des règles et des ordonnances financières ou administratives créées par les gouvernements, les organisations non gouvernementales ou les assureurs privés. Nous avons cependant exclu les interventions appliquées au niveau d'un seul établissement. Pour être sélectionnées, les études devaient inclure une mesure objective d'au moins un des critères de jugement suivants : consommation de médicaments, utilisation des services de santé, indicateurs de santé ou coûts.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs ont vérifié, de manière indépendante, les résumés et les références bibliographiques des rapports pertinents, ont évalué l’intégralité des études susceptibles d’être incluses dans la revue, ont extrait les données et ont évalué le risque de biais et le niveau de confiance des données probantes (GRADE). Pour toutes les étapes du processus ci-dessus, nous avons réglé les désaccords par la discussion.

Résultats principaux: 

Nous avons identifié deux études répondant à nos critères de sélection : une étude contrôlée de séries temporelles interrompues qui évalue une politique réglementaire impliquant le contrôle de la prescription de benzodiazépines ; et une étude contrôlée avant‒après d’une politique éducative impliquant l'envoi, aux médecins et aux membres de la Health Maintenance Organization (HMO), de matériel pédagogique à propos de la prescription, ainsi qu'une intervention pour réglementer le remboursement des médicaments.

Nous ne sommes pas certains des effets sur la consommation de médicaments qu’aurait une politique de réglementation impliquant le contrôle des prescriptions avec des ordonnances en trois exemplaires, par rapport à l'absence de réglementations (données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Nous ne sommes pas non plus certains des effets sur la consommation de médicaments, telle qu’estimée à travers la prescription par les médecins, ni des coûts d'une politique éducative impliquant l'envoi de matériel pédagogique sur la prescription aux médecins et aux membres de la HMO, par rapport à l'absence d’intervention éducative ou à une intervention pour réglementer le remboursement des médicaments (données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Aucune des études incluses n'a mesuré l’utilisation des services de santé, les indicateurs de santé ou les éventuels coûts supplémentaires pour les patients.

Notes de traduction: 

Traduction : Melissa BOUSEKSOU & Toma DECLIPEUR (M1 INALCO)

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.