Comparaison de l’arrêt ou de la réduction et du maintien à long terme de l’utilisation d’inhibiteurs de la pompe à protons chez l’adulte

Question de la revue

Cette revue poursuit des travaux antérieurs et évalue les effets de l’arrêt ou de la diminution de la dose d’inhibiteurs de la pompe à protons (IPP, des médicaments réduisant l’acidité gastrique) chez l’adulte, par rapport à la pratique courante de maintien de la prise quotidienne d’IPP au long cours (plus de quatre semaines). Les effets sont à la fois positifs et négatifs (par exemple prise de comprimés, contrôle des symptômes et coût).

Contexte

Les IPP sont utilisés pour de nombreuses pathologies différentes (par exemple les brûlures d’estomac, les reflux acides, les ulcères de l’estomac). Bien que les études menées pour la plupart de ces affections ne justifient que l’utilisation à court terme (2 à 12 semaines), ces traitements sont couramment poursuivis pendant des périodes prolongées ou même indéfiniment. Or l’utilisation au long cours d’IPP contribue à la surconsommation de médicaments et expose les personnes à risque à des interactions médicamenteuses indésirables et à des effets secondaires (par ex. diarrhées, maux de tête, fractures osseuses). Elle entraîne également un coût élevé pour le système de soins de santé. La « déprescription » consiste à réduire progressivement et arrêter la prise de médicaments. L’approche la plus courante est le traitement « à la demande », qui permet aux patients de ne prendre les médicaments que lorsqu’ils ressentent des symptômes (c’est à dire en cas de brûlures d’estomac). L’objectif global de la déprescription est de minimiser la quantité de médicaments que prend une personne, de réduire la prise injustifiée de médicaments et d’éviter les effets secondaires.

Caractéristiques de l'étude

Nous avons trouvé six essais portant sur 1758 participants. Parmi ceux-ci, cinq études examinaient la déprescription à la demande et une l’arrêt brutal des IPP. Les participants étaient âgés de 48 à 57 ans, à l’exception d’un essai (moyenne d’âge de 73 ans). La majorité des participants présentaient des brûlures d’estomac et des reflux acides avec des formes modérées d’œsophagite (inflammation de l’œsophage pouvant provoquer des lésions).

Principaux résultats

Nous avons constaté que les méthodes de déprescription entraînaient un moins bon contrôle des symptômes, tout en réduisant considérablement la prise de médicaments. La déprescription des IPP peut entraîner des effets secondaires tels qu’une inflammation de l’œsophage. Très peu de données étaient disponibles pour formuler une conclusion concernant les avantages et les inconvénients à long terme de la réduction ou de l’arrêt des IPP.

Qualité des données

Dans l’ensemble, la qualité des données pour cette revue était très mauvaise à moyenne. Les essais n’étaient pas cohérents dans la manière dont ils rapportaient le contrôle des symptômes. Il y avait également des limitations dans la manière dont les études ont été réalisées (par ex. les participants et les investigateurs pouvaient savoir quel médicament ils prenaient), ce qui diminuait la valeur de preuve des données. D’autres facteurs incluaient la petite taille des échantillons dans la plupart des essais et l’incohérence des résultats entre les études.

Conclusions des auteurs: 

Chez les personnes présentant un reflux gastro-œsophagien bénin, la déprescription peut entraîner une augmentation des symptômes digestifs (par ex. dyspepsie, régurgitation) et probablement une réduction du fardeau médicamenteux. Une baisse de la satisfaction des participants est relevée, bien que l’hétérogénéité soit élevée. Il n’y avait pas suffisamment de données pour formuler une conclusion concernant les bénéfices et effets délétères à long terme de l’arrêt des IPP, bien que deux essais (un essai de prise à la demande et un essai d’arrêt brutal) aient rapporté des résultats d’endoscopie dans leurs groupes d’intervention à la fin de l’étude.

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Contexte: 

Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) sont une classe de médicaments qui réduisent la sécrétion d’acide et sont utilisés pour traiter de nombreuses pathologies, telles que le reflux gastro-œsophagien, la dyspepsie, l’œsophagite par reflux, l’ulcère gastro-duodénal et les pathologies hypersécrétoires (par ex. le syndrome de Zollinger-Ellison), et dans le cadre du traitement d’éradication de la bactérie Helicobacter pylori. Les prescriptions d'IPP sont cependant inappropriées dans 25 % à 70 % des cas. La prise chronique d'IPP sans réévaluation contribue à la polymédication et accroît le nombre de personnes à risque d’interactions médicamenteuses et d’événements indésirables (par ex. infection à Clostridium difficile, pneumonie, hypomagnésémie ou fractures).

Objectifs: 

Déterminer les effets (bénéfiques et délétères) associés à la déprescription des IPP au long cours chez l’adulte par rapport à l’utilisation quotidienne chronique (28 jours ou plus).

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans les bases de données suivantes : le registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL, 2016, numéro 10), MEDLINE, Embase, clinicaltrials.gov et Système d'enregistrement international des essais cliniques (ICTRP) de l'OMS. La dernière recherche a été faite en novembre 2016. Nous avons effectué une recherche manuelle dans les références bibliographiques des études pertinentes. Nous avons examiné 2357 articles (2317 identifiées par la stratégie de recherche, 40 par d’autres ressources) et évalué l’éligibilité de 89 publications sur ce total.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus les essais contrôlés randomisés (ECR) et les essais quasi-randomisés comparant au moins une modalité de déprescription (par ex. la réduction ou l’arrêt d’un IPP) à un contrôle consistant en l’absence de changement dans la prise quotidienne continue d’IPP chez des utilisateurs chroniques adultes. Les critères d’évaluation étaient l’évolution des symptômes gastro-intestinaux, le fardeau médicamenteux/la consommation d’IPP, le coût/l’utilisation des ressources, les événements positifs et négatifs au cours du sevrage médicamenteux et la satisfaction des participants.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont examiné et extrait indépendamment les données et évalué le risque de biais. Un troisième auteur a confirmé de manière indépendante l’évaluation du risque de biais. Nous avons utilisé le logiciel Review Manager 5 pour l’analyse des données. Nous avons contacté les auteurs des études s’il manquait des informations.

Résultats principaux: 

La revue a inclus six essais (n = 1758). Les participants étaient âgés de 48 à 57 ans, à l’exception d’un essai où l’âge moyen était de 73 ans. Tous les participants avaient été recrutés dans le cadre des consultations externes et présentaient un reflux non érosif ou une forme bénigne d’œsophagite (stade AL A ou B). Cinq essais étudiaient la déprescription à la demande et un essai examinait l’arrêt brutal. Des données de mauvaise qualité suggèrent que la prise à la demande d’IPP pourrait augmenter le risque d’« absence de contrôle des symptômes » par rapport à l’utilisation continue d’IPP (risque relatif (RR) 1,71, intervalle de confiance (IC) à 95 % de 1,31 à 2,21), en faveur de l’utilisation continue des IPP (cinq essais, n = 1653). Il y avait une réduction cliniquement significative du « fardeau médicamenteux », mesuré par le nombre de comprimés d’IPP pris par semaine, avec un traitement à la demande (différence moyenne (DM) -3,79, IC à 95 % de -4,73 à -2,84), en faveur de la déprescription, sur la base de données de qualité moyenne (quatre essais, n = 1152). Il existe également des données de mauvaise qualité indiquant que la prise d’IPP à la demande pourrait être associée à une diminution de la satisfaction des participants par rapport à leur utilisation continue. Aucune des études incluses n’a rendu compte des coûts ni de l’utilisation des ressources ou des effets positifs du sevrage médicamenteux.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Suzanne Assénat et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.