Interventions pour le traitement des infections génitales à Chlamydia trachomatis pendant la grossesse

Quelle est la question ?

Cette revue visait à évaluer si le traitement des infections à chlamydia au cours de la grossesse guérissait l’infection et évitait les complications pour la mère et l’enfant sans entraîner d’effets secondaires. Cette nouvelle revue remplace une revue précédente sur ce sujet.

Pourquoi est-ce important ?

La chlamydiose est une infection bactérienne sexuellement transmissible, causée par Chlamydia trachomatis et surtout fréquente chez les femmes jeunes, qui peuvent être infectées sans le savoir. Chez les femmes enceintes, les infections génitales à Chlamydia trachomatis peuvent entraîner des complications de la grossesse, par exemple un travail prématuré, un accouchement prématuré, une rupture prématurée des membranes, un faible poids de naissance du nourrisson ou une infection de l’utérus après l’accouchement. Les nourrisson qui contractent Chlamydia trachomatis pendant l’accouchement peuvent développer une infection des poumons et des yeux.

Face aux complications qui peuvent se produire en cas d’infection à Chlamydia trachomatis non traitée pendant la grossesse, il est extrêmement important de trouver un traitement efficace et entraînant le moins possible d’effets secondaires.

Quelles données avons -nous trouvées ?

Nous avons recherché des données probantes (juin 2017) et inclus 15 études dans notre revue. Les études présentaient un risque de biais mixte et étaient de qualité limitée, avec souvent un petit nombre de participantes. Trois études comparaient des antibiotiques (érythromycine, clindamycine et amoxicilline) à un placebo. Les autres études comparaient différents antibiotiques les uns aux autres.

Toutes les études rendaient compte de la guérison de la chlamydiose, définie comme l’élimination de la bactérie, avec un antibiotique. L’érythromycine (données de qualité moyenne issues de deux études, 495 femmes) et la clindamycine (données de mauvaise qualité issues d’une étude, 85 femmes) semblaient être plus efficaces que le placebo. La qualité des données en faveur de l’amoxicilline par rapport à un placebo (une étude, 15 femmes) était très mauvaise, de sorte que nous ne pouvons pas être certains de ces résultats.

Lors de la comparaison de différents antibiotiques les uns aux autres, aucun antibiotique en particulier ne s’est avéré sensiblement plus efficace qu’un autre pour guérir la chlamydiose dans les études que nous avons examinées : comparaison de l’amoxicilline avec l’azithromycine (données de très mauvaise qualité issues de deux études, 144 femmes), de l’amoxicilline avec l’érythromycine (données de bonne qualité issues de quatre études, 466 femmes), de l’azithromycine avec l’érythromycine (données de qualité moyenne issues de six études, 374 femmes), de la clindamycine avec l’érythromycine (données de mauvaise qualité issues de deux études, 173 femmes), de l’amoxicilline avec la clindamycine (données de qualité moyenne issues d’une étude, 101 femmes). Les infections répétées, les accouchements prématurés, la rupture prématurée des membranes, la mortalité périnatale et le faible poids de naissance ont été évalués, respectivement, dans un seul essai, sans qu’il en ressorte aucune différence claire entre les différents types d’antibiotiques examinés.

Les effets secondaires étaient plus fréquents avec l’érythromycine (deux études, 495 femmes) et la clindamycine (une étude, 85 femmes) qu’avec un placebo. L’amoxicilline entraînait moins d’effets secondaires que l’azithromycine (une étude, 36 femmes) ou l’érythromycine (quatre études, 513 femmes), et l’azithromycine entraînait moins d’effets secondaires que l’érythromycine (six études, 374 femmes). L’amoxicilline et la clindamycine ont causé un nombre similaire d’effets secondaires dans une étude (107 femmes).

Qu'est-ce que cela signifie ?

Le traitement de l'infection à chlamydia avec des antibiotiques semble être efficace pendant la grossesse. Il n'existe aucune différence claire entre l'amoxicilline, l'érythromycine, la clindamycine, l'azithromycine pour guérir l'infection ou en ce qui concerne l'accouchement prématuré, la rupture prématurée des membranes, et le faible poids de naissance. L'azithromycine et la clindamycine semble entraîner moins d'effets secondaires que l'érythromycine.

Les études incluses ont toutes été réalisées en Amérique du Nord. Le dépistage des chlamydioses reste un problème dans les contextes de ressources limitées, en raison de son coût. Nous en concluons que des études bien conçues, avec une taille d’échantillon appropriée et dans différents contextes, sont nécessaires afin d’évaluer les effets du traitement des infections à chlamydia pendant la grossesse. La résistance aux antibiotiques testés a pu changer depuis que les études incluses dans cette revue ont été réalisées. En particulier, les futures recherches pourraient rendre compte des critères d’intérêt de cette revue et s’intéresser aux antibiotiques susceptibles de guérir les chlamydioses avec le moins d’effets secondaires, par exemple l’amoxicilline et la clindamycine.

Conclusions des auteurs: 

Le traitement avec des agents antibactériens permet d'obtenir la guérison microbiologique des infections à C.trachomatis pendant la grossesse. Il n'y avait aucune différence apparente entre les agents évalués (amoxicilline, l'érythromycine, la clindamycine, l'azithromycine) en termes d'efficacité (guérison microbiologique et de répétition de l'infection) et les complications de la grossesse (naissance prématurée, rupture prématurée des membranes, faible poids de naissance). L'azithromycine et la clindamycine semblent entraîner moins d'effets secondaires que l'érythromycine.

Toutes les études de cette revue ont été réalisées en Amérique du Nord, ce qui peut limiter la possibilité de généraliser les résultats. En outre, les populations d’étude peuvent différer dans des contextes de ressources limitées et ces résultats ne sont donc applicables qu’aux régions disposant de bonnes ressources. Enfin, les essais inclus dans cette revue ont principalement été réalisés dans les années 1990 et au début des années 2000 et les résistances aux antibiotiques ont pu changer depuis.

De nouvelles études bien conçues, avec des tailles d’échantillon appropriées et réalisées dans différents contextes, sont nécessaires afin d’évaluer les interventions pour traiter les infections à C. trachomatis pendant la grossesse et déterminer quels agents donneraient la meilleure guérison microbiologique avec le moins d’effets secondaires. De telles études pourraient rendre compte des critères de jugement énumérés dans cette revue.

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Contexte: 

Les infections génitales à Chlamydia trachomatis (C. trachomatis) peuvent entraîner des complications pendant la grossesse : fausses couches, accouchements prématurés, faible poids de naissance, rupture prématurée des membranes, augmentation de la mortalité périnatale, endométrite post-partum, conjonctivite et pneumonie à C. trachomatis. Cette revue remplace une revue précédente sur ce sujet.

Objectifs: 

Déterminer le traitement le plus efficace et le mieux toléré contre les infections génitales à chlamydia en prévention de l’infection maternelle et des atteintes néonatales.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre d’essais cliniques du groupe Cochrane sur la grossesse et l’accouchement, Clinicaltrials.gov, la plate-forme internationale des essais cliniques de l’OMS (ICTRP) (26 juin 2017) et les références bibliographiques des études trouvées.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) et études publiées sous forme de résumé évaluant des interventions pour le traitement des infections génitales à C. trachomatis pendant la grossesse. Les ECR en cluster étaient également éligibles pour l’inclusion, mais nous n’en avons identifié aucun. Les essais quasi-randomisés et les essais croisés n’étaient pas éligibles à l’inclusion dans cette revue.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont évalué indépendamment les études à inclure et la qualité des essais et extrait les données à l’aide du formulaire convenu. L’exactitude des données a été vérifiée. Les données probantes ont été évaluées par la méthode GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus 15 essais (portant sur 1754 femmes), bien que nos méta-analyses aient été basées sur un nombre réduit d’études et de femmes. Toutes les études incluses avaient été réalisées en Amérique du Nord entre 1982 et 2001. Deux études étaient à faible risque de biais dans tous les domaines, toutes les autres études présentaient un risque de biais variable. Quatre autres études ont été exclues et une étude est en cours.

Huit comparaisons ont été incluses dans cette revue : trois comparaient un antibiotique (érythromycine, clindamycine, amoxicilline) à un placebo, cinq autres un antibiotique à un autre antibiotique (érythromycine, clindamycine, amoxicilline, azithromycine). Aucune étude n’a rendu compte de différents schémas posologiques d’un antibiotique.

Guérison microbiologique (critère de jugement principal)

Comparaison d’un antibiotique à un placebo : l’érythromycine (risque relatif moyen (RR) 2,64, intervalle de confiance (IC) à 95 % de 1,60 à 4,38 ; deux essais, 495 femmes; I2 = 68 % ; données de valeur probante moyenne) et la clindamycine (RR 4,08, IC à 95 % de 2,35 à 7,08 ; un essai, 85 femmes ; données de faible valeur probante) ont été associées à une amélioration de la guérison microbiologique par rapport à un groupe témoin sous placebo. Dans un très petit essai comparant l’amoxicilline et un placebo, les résultats n’étaient pas clairs mais les données ont été jugées de très mauvaise qualité (RR 2,00, IC à 95 % de 0,59 à 6,79 ; 15 femmes).

Comparaison d’un antibiotique avec un autre antibiotique : l’amoxicilline n’a fait que peu ou pas de différence en termes de guérison microbiologique en comparaison avec l’érythromycine (RR 0,97, IC à 95 % de 0,93 à 1,01 ; quatre essais, 466 femmes ; données de bonne qualité), probablement aucune différence par rapport à la clindamycine (RR 0,96, IC à 95 % de 0,89 à 1,04 ; un essai, 101 femmes ; données de qualité moyenne), et les données la concernant en comparaison avec l’azithromycine ont une très faible valeur probante, de sorte que l’effet n’est pas certain (RR 0,89, IC à 95 % de 0,71 à 1,12 ; deux essais, 144 femmes ; données de très mauvaise qualité). L’azithromycine comparée à l’érythromycine (RR moyen 1,11, IC à 95 % de 1,00 à 1,23 ; six essais, 374 femmes ; I2 = 53 % ; données de qualité moyenne) a probablement une efficacité similaire, bien que les résultats semblent plus favorables à l’azithromycine. La clindamycine comparée à l’érythromycine (RR 1,06, IC à 95 % de 0,97 à 1,15 ; deux essais, 173 femmes ; données de faible valeur probante) a permis la guérison microbiologique d’un nombre similaires de femmes dans les deux groupes.

Les données ont été rétrogradées à cause de limitations de la conception, de leur incohérence et de l’imprécision des estimations d’effet.

Effets secondaires du traitement (sur la mère) (critère de jugement secondaire)

Comparaison d’un antibiotique à un placebo : les effets secondaires, notamment des nausées, des vomissements et des douleurs abdominales, ont été rapportés dans deux études (495 femmes), mais il n’y avait aucune preuve claire que l’érythromycine ait été associée à davantage d’effets secondaires que le placebo et l’hétérogénéité (I2 = 78 %) était importante (RR moyen 2,93, IC à 95 % de 0,36 à 23,76). Il n’y avait aucune différence claire dans le nombre de femmes ayant eu des effets secondaires dans une étude de petite taille comparant la clindamycine à un placebo (5/41 contre 1/44) (RR 6,35, IC à 95 % de 0,38 à 107,45, 62 femmes). Les effets secondaires rapportés étaient principalement gastro-intestinaux et incluaient également des éruptions cutanées spontanément résolutives.

Comparaison d’un antibiotique à un autre : il n’y avait aucune différence claire dans l’incidence des effets secondaires (notamment nausées, vomissements, diarrhées et douleurs abdominales) lorsque l’amoxicilline était comparée à l’azithromycine, d’après les données issues d’une étude de petite taille (36 femmes) (RR 0,56, IC à 95 % de 0,24 à 1,31).

Cependant, l’amoxicilline était associée à moins d’effets secondaires que l’érythromycine selon les données issues de quatre essais (513 femmes) (RR 0,31, IC à 95 % 0,21 à 0,46 ; I2 = 27 %). Les effets secondaires incluaient des nausées, des vomissements, des diarrhées, des crampes abdominales, des éruptions cutanées et des réactions allergiques.

L'azithromycine (RR 0,24, IC à 95 % 0,17 à 0,34 ; six essais, 374 femmes) et la clindamycine (RR 0,44, IC à 95 % 0,22 à 0,87 ; deux essais, 183 femmes) n’ont été associées ni l’une ni l’autre à une incidence des effets secondaires (nausées, vomissements, diarrhées et crampes abdominales) plus faible qu’avec l’érythromycine.

Une étude de petite taille (101 femmes) comparant l’amoxicilline à la clindamycine n’a rapporté aucune différence claire dans le nombre de femmes ayant des effets secondaires (RR 0,57, IC à 95 % de 0,14 à 2,26 ; 107 femmes). Les effets secondaires rapportés comprenaient des éruptions cutanées et des troubles gastro-intestinaux.

Autres critères de jugement secondaires

Des essais uniques ont rapporté des données sur les infections répétées, les accouchements prématurés, la rupture prématurée des membranes, la mortalité périnatale et le faible poids de naissance et n’ont trouvé aucune différence claire entre les traitements.

De nombreux critères de jugement secondaires de cette revue n'ont pas été rapportés dans les études incluses.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Suzanne Assénat et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.