Entraînement des muscles du plancher pelvien pour l'incontinence urinaire chez la femme

Question de la revue

Nous voulions savoir si l'entraînement des muscles du plancher pelvien (EMPP) aide les femmes souffrant d'incontinence urinaire. Pour ce faire, nous avons comparé les effets de cet entraînement à l'absence de traitement ou à un quelconque traitement inactif (par exemple, des conseils en matière de contrôle grâce à des protections hygiéniques). Nous avons également résumé les résultats portant sur les coûts et le rapport coût-efficacité.

Nous avons recherché des essais cliniques jusqu'au 12 février 2018.

Pourquoi cette question est-elle importante ?

L'incontinence à l'effort est une fuite d'urine qui ne peut pas être facilement contrôlée (ou pas du tout) lorsqu'on pratique une activité physique. Les activités physiques peuvent comprendre une toux, des éternuements, des activités sportives ou des changements soudains de position. L'incontinence d'urgence se manifeste par un soudain et fort besoin d'uriner. Souvent, une personne ne peut pas se rendre à temps aux toilettes pour uriner, ce qui entraîne des fuites. Une combinaison d’incontinence à l’effort et d’incontinence d'urgence est appelée incontinence mixte.

L’EMPP est un programme d'exercices visant à améliorer la force, l'endurance, la puissance, la relaxation des muscles du plancher pelvien ou une combinaison de ces éléments. Il s'agit d'un traitement largement utilisé chez les femmes souffrant d'incontinence à l’effort, d'incontinence d'urgence et d'incontinence mixte.

Comment avons-nous procédé à la revue des preuves ?

Les 31 essais inclus comprenaient 1 817 femmes issues de 14 pays. Les études comprenaient des femmes souffrant d'incontinence urinaire à l'effort, d'urgence ou mixte. Les femmes ont été réparties de façon aléatoire afin de recevoir ou non l’EMPP et les effets ont été comparés. Nous avons examiné si l'affection était " guérie " ou " guérie ou améliorée " ; Nous avons également examiné les symptômes, l'effet sur la qualité de vie (QdV) ainsi que la fréquence et la quantité d'urine perdue.

Sources de financement des études

Huit études ont été financées par l'État. Trois études ont reçu des subventions de sources publiques et privées. Deux études ont reçu des subventions de sources privées, tandis que deux études n'ont reçu aucun financement. Seize études n'ont pas déclaré leurs sources de financement.

Ce que nous avons trouvé

La qualité des preuves que nous avons examinées était généralement modérée, ce qui signifie que nous pouvons avoir une certaine confiance dans les résultats.

Guérison de l'incontinence urinaire après un EMPP : les femmes souffrant d'incontinence urinaire à l'effort étaient, en moyenne, huit fois plus susceptibles de rapporter leur affection comme guérie. Les femmes souffrant d'incontinence urinaire, quel qu'en soit le type, étaient, en moyenne, cinq fois plus susceptibles de rapporter leur affection comme guérie.

Guérison ou amélioration de l'incontinence urinaire après un EMPP : les femmes souffrant d'incontinence urinaire à l'effort étaient, en moyenne, six fois plus susceptibles de rapporter leur affection comme guérie ou améliorée. Les femmes présentant tous les types d'incontinence urinaire étaient environ deux fois plus susceptibles de rapporter leur affection comme guérie ou améliorée.

Épisodes de fuite après un EMPP : les femmes souffrant d'incontinence urinaire à l'effort et les femmes présentant tous les types d'incontinence urinaire dans le groupe EMPP ont eu un épisode de fuite de moins en 24 heures. L’EMPP semble réduire les épisodes de fuite chez les femmes souffrant uniquement d'incontinence urinaire d'urgence.

Chez les femmes souffrant d'incontinence à l'effort et de tous les types d'incontinence urinaire, les symptômes d'incontinence et la qualité de vie ont été améliorés dans les groupes EMPP. Les femmes étaient plus satisfaites du traitement EMPP, tandis que celles des groupes témoins étaient plus susceptibles de demander un traitement supplémentaire.

Les effets secondaires négatifs dus à l'exécution d'un EMPP étaient rares et, dans les deux essais qui les ont signalés, les effets secondaires étaient mineurs.

Les auteurs de la seule évaluation économique identifiée pour le Bref Commentaire Economique ont indiqué que le rapport coût-efficacité de l’EMPP semble prometteur.

Conclusions des auteurs: 

D'après les données disponibles, nous pouvons être confiants que l’EMPP peut guérir ou améliorer les symptômes de l'IUE et de tous les autres types d'IU. Il se peut que ce programme réduise le nombre d'épisodes de fuite, la quantité de fuites lors des courts examens cliniques de pesée des protections ainsi que les symptômes rapportés dans les questionnaires sur les symptômes spécifiques à l'IU. Les auteurs de la seule évaluation économique identifiée pour le Bref Commentaire Economique ont indiqué que le rapport coût-efficacité de l’EMPP semble prometteur. Les résultats de l'étude suggèrent que l’EMPP pourrait être inclus dans les programmes de prise en charge conservatrice de première ligne pour les femmes souffrant d’IU. L'efficacité à long terme et la rentabilité de l’EMPP doivent encore être étudiées.

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Contexte: 

L'entraînement des muscles du plancher pelvien (EMPP) est le traitement de physiothérapie le plus couramment utilisé chez les femmes souffrant d'incontinence urinaire à l'effort (IUE). Il est parfois aussi recommandé pour l'incontinence urinaire mixte (IUM) et, moins fréquemment, pour l'incontinence urinaire d'urgence (IUU).

Ceci est une mise à jour d'une revue Cochrane publiée pour la première fois en 2001 et mise à jour pour la dernière fois en 2014.

Objectifs: 

Évaluer les effets de l’EMPP chez les femmes souffrant d'incontinence urinaire (IU) par rapport à l'absence de traitement, aux traitements placebo ou fictifs, ou à d’autres traitements témoins inactifs, et résumer les résultats des évaluations économiques pertinentes.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre spécialisé du groupe Cochrane sur l'incontinence (consulté le 12 février 2018), lequel contient des essais identifiés dans CENTRAL, MEDLINE, MEDLINE In-Process, MEDLINE Epub Ahead of Print, ClinicalTrials.gov, l’ICTRP de l’OMS, et à partir de recherches manuelles dans des journaux et actes de conférence, et dans les références bibliographiques des articles pertinents.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés ou quasi-randomisés effectués chez des femmes souffrant d'IUE, d'IUU ou d'IUM (en fonction des symptômes, des signes ou de l'urodynamique). Un des bras de l'essai incluait l’EMPP. Un autre bras était un groupe sans traitement, un groupe placebo, un groupe fictif ou un autre groupe témoin inactif.

Recueil et analyse des données: 

L’éligibilité et le risque de biais des essais cliniques ont été évalués indépendamment par au moins deux auteurs de la revue. Nous avons extrait et recoupé les données. Un troisième auteur de la revue a réglé les désaccords. Nous avons traité les données comme décrit dans le guide Cochrane sur les revues systématiques des interventions (Cochrane Handbook for Systematic Reviews of Interventions). Nous avons rassemblé les essais en sous-groupes selon le diagnostic de l'IU. Nous avons réalisé une méta-analyse formelle lorsque les données s’y prêtaient.

Résultats principaux: 

La revue comprenait 31 essais (dont 10 étaient nouveaux pour cette mise à jour) auxquels ont participé 1 817 femmes de 14 pays. Dans l'ensemble, les essais étaient de petite à moyenne envergure, avec des suivis généralement inférieurs à 12 mois, et plusieurs d’entre eux présentaient un risque de biais modéré. Il existait des variations considérables dans le contenu et la durée des interventions, les populations étudiées et les mesures des critères d’évaluation. Une unique étude a été réalisée sur les femmes souffrant d'IUM et une autre sur les femmes souffrant d'IUU seule, sans aucune donnée sur la guérison, la guérison ou l'amélioration, ou le nombre d'épisodes d'IU pour ces sous-groupes.

Guérison symptomatique de l'IU à la fin du traitement : comparativement à l'absence de traitement ou aux traitements témoins inactifs, les femmes souffrant d'IUE qui faisaient partie des groupes EMPP étaient huit fois plus susceptibles de rapporter une guérison (56 % contre 6 % ; rapport de risque (RR) 8,38, intervalle de confiance (IC) à 95 % 3,68 à 19,07 ; 4 essais, 165 femmes ; preuves de haute qualité). Quel que soit le type d’IU, les femmes des groupes EMPP étaient cinq fois plus susceptibles de rapporter une guérison (35 % contre 6 % ; RR 5,34, IC à 95 % 2,78 à 10,26 ; 3 essais, 290 femmes ; preuves de qualité modérée).

Guérison ou amélioration symptomatique de l'IU à la fin du traitement : comparativement à l'absence de traitement ou aux traitements témoins inactifs, les femmes souffrant d'IUE qui faisaient partie des groupes EMPP étaient six fois plus susceptibles de rapporter une guérison ou une amélioration (74 % contre 11 % ; RR 6,33, IC à 95 % 3,88 à 10,33 ; 3 essais, 242 femmes ; données de qualité modérée). Quel que soit le type d’IU, les femmes des groupes EMPP étaient deux fois plus susceptibles de rapporter une guérison ou une amélioration que les femmes des groupes témoins (67 % contre 29 % ; RR 2,39 ; IC à 95 %, 1,64 à 3,47 ; 2 essais, 166 femmes ; preuves de qualité modérée).

Symptômes et qualité de vie (QdV) propres à l’IU à la fin du traitement : comparativement à l'absence de traitement ou aux traitements témoins inactifs, les femmes souffrant d'IUE qui faisaient partie du groupe EMPP étaient plus susceptibles de rapporter une amélioration significative des symptômes de l’IU (7 essais, 376 femmes ; preuves de qualité modérée) et une amélioration significative de la QdV (6 essais, 348 femmes ; preuves de faible qualité). Quel que soit le type d’IU, les femmes du groupe EMPP étaient plus susceptibles de rapporter une amélioration significative des symptômes de l'IU (1 essai, 121 femmes ; données de qualité modérée) et une amélioration significative de la QdV liée à l'IU (4 essais, 258 femmes ; données de qualité modérée). Enfin, un essai de petite envergure (12 femmes) a fait état d'une meilleure qualité de vie chez les femmes souffrant d’IU mixte et recevant un traitement EMPP.

Épisodes de fuite en 24 heures à la fin du traitement : L’EMPP a réduit d'une fois les épisodes de fuite chez les femmes souffrant d'IUE (différence moyenne (DM) plus basse de 1,23, IC à 95 % plus bas de 1,78 à plus bas de 0,68 ; 7 essais, 432 femmes ; preuves de qualité modérée) et chez les femmes présentant tous les types d'IU (DM plus basse de 1,00, IC à 95 % plus bas de 1,37 à plus bas de 0,64 ; 4 essais, 349 femmes ; preuves de qualité modérée).

Fuite lors de courts examens cliniques de pesée des protections (pad test) à la fin du traitement : les femmes souffrant d'IUE dans les groupes EMPP ont perdu significativement moins d'urine lors de ces tests (allant jusqu'à une heure). La comparaison a révélé une hétérogénéité considérable, mais les résultats ont tout de même favorisé l’EMPP lorsqu’un modèle à effets aléatoires est utilisé (DM plus basse de 9,71 g, IC à 95 % plus bas de 18,92 à plus bas de 0,50 ; 4 essais, 185 femmes ; preuves de qualité modérée). Chez les femmes présentant tous les types d’IU, les groupes EMPP ont également rapporté moins de pertes urinaires lors des courts examens de pesée des protections que les groupes témoins (DM plus basse de 3,72 g, IC à 95 % plus bas de 5,46 à plus bas de 1,98 ; 2 essais, 146 femmes ; preuves de qualité modérée).

Les femmes du groupe EMPP étaient également plus satisfaites du traitement et leur vie sexuelle était meilleure. Les effets indésirables étaient rares, et même, mineurs dans les deux essais qui en ont rapportés. Les résultats de la revue étaient largement corroborés par les tableaux de résumé des résultats (summary of findings tables), mais la qualité de la plupart des preuves at été déclassée à modérée pour des raisons méthodologiques. Une exception était le critère « perception de la guérison par les patientes » chez les femmes souffrant d'IUE, qui a été considéré comme étant de haute qualité.

Notes de traduction: 

Traduction réalisée par Barbara Fowler et révisée par Cochrane France

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.