Quels sont les bénéfices des AINS pour traiter l'accumulation de liquide dans la rétine centrale (macula) après une opération de la cataracte ?

Principaux messages

• Nous avons mis à jour les données probantes sur les effets des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS, comme l'ibuprofène) chez les personnes présentant une accumulation aiguë ou chronique de liquide dans la rétine centrale (macula) après une chirurgie de la cataracte.

• Il n'y avait que des données probantes d’un niveau de confiance très faible suggérant que les AINS pouvaient améliorer la vision ou réduire l'accumulation de liquide dans la macula.

- Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour fournir des données probantes de qualité.

Qu'est-ce que l'œdème maculaire cystoïde (OMC) ?

La chirurgie de la cataracte est la chirurgie ambulatoire la plus courante aux États-Unis. Parfois, après une opération de la cataracte, une inflammation à l'intérieur de l'œil entraîne une fuite de liquide des vaisseaux sanguins de la rétine, ce qui provoque l'accumulation de liquide dans des espaces semblables à des kystes et un gonflement de la partie centrale de la rétine (macula). C'est ce qu'on appelle l'œdème maculaire cystoïde (OMC), qui pourrait entraîner une réduction ou une déformation de la vision. L'OMC est l'une des complications les plus fréquentes suite à une opération de la cataracte.

Comment traiter l'OMC ?

L'OMC après une opération de la cataracte est souvent traité avec des AINS ou d'autres médicaments pour réduire l'inflammation à l'intérieur de l'œil. Les AINS sont généralement appliqués directement dans l'œil (topiques) sous forme de gouttes ophtalmiques ; ils pourraient être administrés seuls ou avec un autre médicament, tel qu'un stéroïde topique ou un autre AINS.

Que voulions-nous découvrir ?
Nous avons voulu savoir si les AINS, administrés seuls ou en combinaison avec d'autres médicaments, peuvent aider les personnes atteints d'OMC suite à une opération de la cataracte à voir plus clair.

Comment avons-nous procédé ?
Nous avons recherché des études dans lesquelles des adultes atteints d'OMC après une opération de la cataracte ont été assignés de manière aléatoire à un traitement par AINS, seul ou avec d'autres médicaments. Les études ont comparé les AINS à un placebo (un médicament factice sans principe actif) ou à un autre traitement actif (stéroïde ou autre AINS). Nous avons comparé et résumé les résultats des études et évalué le niveau de confiance des données probantes, sur la base de facteurs tels que les méthodes et la taille des études.

Qu’avons-nous trouvé ?

Nous avons inclus 9 études portant sur un total de 390 personnes d'un âge moyen de 72 ans ; 72 % étaient des femmes. Trois études ont porté exclusivement sur des personnes présentant un OMC aigu (accumulation de liquide dans la macula de moins de 4 mois) après une chirurgie de la cataracte, 4 études ont porté sur des personnes présentant un OMC chronique (présence de liquide dans la macula qui a persisté pendant 4 mois ou plus) après une chirurgie de la cataracte, et les 2 études restantes ont porté sur des personnes présentant des durées variables d'accumulation de liquide post-chirurgicale dans la macula.

- Les personnes atteintes d'un OMC aigu : Les AINS pourraient améliorer la vision ou réduire le gonflement de la rétine par rapport au placebo ou à un stéroïde topique (3 études).

- Les personnes atteintes d'un OMC chronique : Deux études qui ont traité des personnes atteintes d'OMC chronique avec des AINS pendant deux mois ou moins n'ont montré aucun effet sur l'amélioration de la vision. En revanche, les deux autres études suggèrent que les AINS pourraient améliorer la vision après 90 à 120 jours de traitement. Nous n'avons pas trouvé de données probantes concernant les effets des AINS sur d'autres critères de jugement, comme l'amélioration persistante de la vision après l'arrêt du traitement ou la réduction de l'accumulation de liquide dans la macula.

- La durée de l’OMC n'est pas connue : Un AINS topique pourrait avoir peu ou pas d'effets sur la vision par rapport à un autre AINS.

La plupart des études incluses soit n'ont pas rapporté de données sur les effets indésirables, soit n'ont pas rapporté les différences d'effets indésirables entre les groupes recevant des traitements différents.

Quelles sont les limites des données probantes ?

Notre confiance dans les données probantes est limitée car les études n'incluaient pas beaucoup de participants et qu'elles utilisaient différents médicaments, en différentes quantités et pour différentes durées. Les études n'ont pas examiné tous les critères de jugement d'intérêt. Les conclusions ont également été limitées par le fait que les essais ont été publiés entre 1977 et 2006, et que de nombreux progrès dans les techniques de chirurgie de la cataracte ont eu lieu pendant et depuis cette période.

Ces données probantes sont-elles à jour ?
Les données probantes sont à jour jusqu’en mars 2022.

Conclusions des auteurs: 

Les données probantes des effets des anti-inflammatoires non stéroïdiens chez les patients atteints d'œdème maculaire cystoïde sont d’un niveau de confiance très faible et des recherches supplémentaires sont justifiées. Nos conclusions sont limitées par la petite taille des échantillons et l'hétérogénéité des interventions, des évaluations et des rapports sur les critères de jugement cliniquement importants.

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Contexte: 

La chirurgie de la cataracte est la chirurgie incisionnelle ambulatoire la plus courante aux États-Unis. L'œdème maculaire cystoïde (OMC), accumulation de liquide dans la rétine centrale due à une fuite des capillaires dilatés, est la cause la plus fréquente de déficience visuelle suite à une chirurgie de la cataracte. Un OMC aigu, défini comme un OMC de moins de quatre mois, se résout souvent spontanément. L'OMC qui persiste au bout de quatre mois, voire au-delà, est appelé OMC chronique. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont été utilisés pour traiter l'OMC. Cette mise à jour ajoute de nouvelles données probantes et analyses à la revue publiée précédemment.

Objectifs: 

Examiner l'efficacité des AINS pour le traitement de l'OMC suite à une chirurgie de la cataracte.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans les bases de données CENTRAL (2022, numéro 3), Ovid MEDLINE, Embase, PubMed, LILACS, mRCT(arrêtée en 2014, dernière recherche en août 2011), ClinicalTrials.gov et ICTRP de l’OMS. Nous n’avons pas appliqué de restriction de date ou de langue dans la recherche électronique des essais. Nous avons effectué la dernière recherche dans les bases de données électroniques le 20 mars 2022.

Critères de sélection: 

Nous avons inclus des essais contrôlés randomisés évaluant les effets des AINS sur l'OMC suite à une chirurgie de la cataracte.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont examiné indépendamment tous les titres et résumés, examiné les publications en texte intégral en fonction des critères d’éligibilité, extrait indépendamment les données des essais nouvellement inclus et évalué le risque de biais pour chaque essai inclus. Nous avons contacté les auteurs des essais pour obtenir des clarifications ou pour demander des informations manquantes. Nous avons fourni une synthèse narrative de tous les essais inclus et de leurs résultats. Pour les critères de jugement continus et dichotomiques, nous avons effectué séparément une analyse groupée et avons rapporté la différence de moyennes (DM) et le risque relatif (RR) ainsi que l'intervalle de confiance (IC) à 95 % associé chaque fois que cela était possible. Deux auteurs de la revue ont indépendamment évalué le niveau de confiance globale des données probantes pour chaque critère de jugement en utilisant l'approche GRADE.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus neuf essais avec un total de 390 participants (393 yeux). L'âge moyen des participants des études était de 72.2 ans (écart interquartile [EI] 68.8 à 73,6) et 72 % étaient des femmes (EI 69 % à 74 %). Trois essais ont inclus des participants souffrant d'un OMC aigu, et quatre ont inclus des participants souffrant d'un OMC chronique ; les deux essais restants ont inclus des participants souffrant à la fois d'un OMC aigu et d'un OMC chronique ou des participants dont la durée de l'OMC était inconnue. Nous avons évalué les essais comme ayant un risque de biais incertain (33 %) ou élevé (67 %).

Amélioration visuelle de deux lignes ou plus à la fin du traitement

Les données d'un essai mené chez des participants atteints d'un OMC aigu ne montrent aucun effet thérapeutique du kétorolac topique par rapport au placebo (RR 2.00, IC à 95 % 0.46 à 8.76 ; 22 participants). Les données d'un essai à trois bras mené auprès de participants atteints d'un OMC aigu montrent que, par rapport à la prednisolone topique, le kétorolac topique (RR 1.33, IC à 95 % 0.58 à 3.07 ; 17 participants) ou l'association kétorolac topique et prednisolone (RR 1.78, IC à 95 % 0,86 à 3.69 ; 17 participants) n'ont que peu ou pas d'effet sur l'amélioration de la vision. Les résultats de l'analyse en sous-groupes de deux études menées auprès de participants atteints d'OMC chronique suggèrent qu'après un traitement de 90 jours ou plus, les AINS pourraient augmenter la probabilité d'amélioration visuelle des participants de 1.87 (RR 2.87, IC à 95 % 1.58 à 5.22 ; I2 = 33 % ; 2 essais, 121 participants) par rapport au placebo. Cependant, il n'y avait pas de données probantes de l'effet du traitement dans le sous-groupe avec deux mois de traitement ou moins (RR 0.72, IC à 95 % 0.30 à 1.73 ; P = 0.19, I2 = 41 % ; 2 essais, 34 participants). Dans l'ensemble, ces données probantes ont un niveau de confiance très faible.

Une estimation issue d'une seule étude chez des patients atteints d'un OMC mixte indique que le diclofénac topique pourrait augmenter la probabilité d'une amélioration visuelle de 40 % par rapport au kétorolac topique (RR 1.40, IC à 95 % 1.02 à 1.94 ; 68 participants). Toutefois, le même essai n'a pas rapporté de différence entre les groupes en ce qui concerne l'acuité visuelle finale moyenne en lignes de Snellen (DM 0.40, IC à 95 % -0.93 à 1.73). Un essai à trois bras chez des patients atteints d'OMC mixte, rapportant des changements visuels en lettres ETDRS dans les comparaisons entre le kétorolac et le diclofénac (34 participants) ou le bromfénac (34 participants), ne suggère pas de données probantes d'effets. Dans l'ensemble, les AINS pourraient améliorer légèrement l'acuité visuelle chez les participants présentant un OMC mixte, mais les données probantes sont très incertaines.

Persistance de l'amélioration de la vision un mois après l'arrêt du traitement.

Un essai portant sur des participants atteints d'OMC chronique a testé l'indométacine par voie orale (RR 0.40, IC à 95 % 0.10 à 1.60 ; 20 participants) et l'autre a comparé le kétorolac topique à un placebo (RR 4.00, IC à 95 % 0.51 à 31.1 ; 26 participants). Bien qu'il n'y ait pas de données probantes de l'effet du traitement, les données probantes suggèrent une hétérogénéité substantielle entre les groupes (P = 0.07, I2 = 69.9 % ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Aucun des essais portant sur des patients atteints d'OMC aigu ou mixte n'a rapporté ce critère de jugement.

Proportion de participants présentant une amélioration des fuites à l'angiographie à la fluorescéine du fond de l'œil.

Un essai à trois bras mené auprès de participants atteints d'OMC aiguë montre que, par rapport à la prednisolone topique, il n'y a pas de bénéfice thérapeutique du kétorolac topique (RR 1.11, IC à 95 % 0.45 à 2.75 ; 17 participants) ou de la combinaison kétorolac topique et prednisolone topique (RR 1.56, IC à 95 % 0.72 à 3.38 ; 17 participants). Ces données probantes sont d’un niveau de confiance très faible.

L'estimation combinée de deux essais chez des participants atteints d'OMC chronique indique que les AINS ont peu ou pas d'effet sur l'amélioration des fuites par rapport au placebo (RR 1,93, IC à 95 % 0,62 à 6,02 ; 40 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Aucun des essais portant sur des patients atteints d'OMC mixte n'a rapporté ce critère de jugement.

Proportion de participants ayant une meilleure sensibilité au contraste

Des données probantes d’un niveau de confiance très faible issues d'un essai chez des participants présentant un OMC aigu ne montrent aucun bénéfice thérapeutique du kétorolac (RR 1.11, IC à 95 % 0.45 à 2.75 ; 17 participants) ou de l'association kétorolac et prednisolone (RR 1.78, IC à 95 % 0.86 à 3.69 ; 17 participants) par rapport à la prednisolone topique. Aucun des essais portant sur des patients atteints d'OMC chronique ou mixte n'a rapporté ce critère de jugement.

Proportion de participants présentant une amélioration de l'épaisseur maculaire centrale à la tomographie par cohérence optique ; mesures de la qualité de vie.

Aucun essai inclus n'a rapporté ces critères de jugement.

Effets indésirables

La plupart des essais n'ont pas observé de différences dans les événements indésirables oculaires, tels que la toxicité cornéenne ou l'élévation de la pression intraoculaire, entre les groupes de comparaison.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Farah Noureddine et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.