Comparaison de la fluoxétine à d'autres antidépresseurs dans la dépression chez l'adulte

La dépression est une maladie mentale grave qui se caractérise par une déprime persistante et la perte de tout intérêt et de tout plaisir. Elle s'accompagne généralement d'un éventail de symptômes, comme des problèmes d'appétit, des troubles du sommeil et de la concentration. Les principales options de traitement contre la dépression sont les traitements médicamenteux et psychologiques, mais les traitements à base d'antidépresseurs sont les plus courants dans le cas d'une dépression modérée à grave. La fluoxétine, l'un des premiers antidépresseurs nouvelle génération, est un médicament couramment prescrit pour le traitement de la dépression. Toutefois, les résultats d'études comparant la fluoxétine à d'autres antidépresseurs sont contestés. Dans cette revue systématique, l'efficacité et la tolérance de la fluoxétine étaient comparées à d'autres antidépresseurs pour le traitement aigu de la dépression.

En mai 2012, nous avons effectué de vastes recherches dans toutes les études utiles (essais contrôlés randomisés ou ECR) que nous avons pu trouver et qui comparaient la fluoxétine à n'importe quel autre antidépresseur dans le traitement de personnes dépressives. Cent soixante-et-onze ECR ont été inclus, totalisant 24 868 personnes dans les analyses. En combinant les résultats de tous les essais, la fluoxétine était tout aussi efficace, mais mieux tolérée, que les antidépresseurs de la génération précédente (tricycliques). Par rapport aux autres antidépresseurs nouvelle génération, d'importantes différences en termes d'efficacité et de tolérance ont été identifiées entre la fluoxétine et certains antidépresseurs. Par exemple : la fluoxétine était moins efficace que la sertraline et la mirtazapine, mais mieux tolérée que la réboxetine. Ces différences peuvent avoir des effets cliniques sur la pratique courante. Toutefois, lors de l'interprétation de ces différences, il est important de ne pas oublier que ces études étaient de courte durée (huit semaines maximum) et que la taille moyenne de chaque essai était réduite (environ 100 personnes par essai). De plus, la majorité des études incluses étaient sponsorisées par des laboratoires pharmaceutiques, ce qui pouvait alors conduire à une surestimation des effets du traitement. Par conséquent, il est difficile de tirer des conclusions claires et cliniquement significatives. D'autres informations fiables concernant les profils d'innocuité respectifs des antidépresseurs seront nécessaires.

Conclusions des auteurs: 

La présente étude a détecté des différences en termes d'efficacité et de tolérance entre la fluoxétine et certains AD, mais la signification clinique des ces différences est incertaine. De plus, l'évaluation de la qualité à l'aide de l'outil d'évaluation des risques de biais montrait que la grande majorité des études incluses ne donnaient aucune information concernant les procédures méthodologiques. Par conséquent, les résultats des différentes études ne nous permettent de tirer aucune conclusion définitive. L'amélioration du profil d'efficacité de la sertraline et de la venlafaxine (et éventuellement d'autres AD) par rapport à la fluoxétine peut être cliniquement important, comme il a été précédemment suggéré par d'autres revues systématiques. Outre les données d'efficacité, les décisions de traitement doivent également se baser sur des considérations de toxicité du médicament, d'acceptabilité du patient et de coût.

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Contexte: 

Les cas de dépression sont fréquents dans les soins primaires et sont liés à une morbidité personnelle, sociale et économique marquée, ce qui crée une demande importante au niveau des fournisseurs de services. La fluoxétine antidépressive a été étudiée dans de nombreux essais contrôlés randomisés (ECR) et comparée à d'autres antidépresseurs conventionnels et non conventionnels. Toutefois, ces études ont généré des résultats contradictoires. D'autres revues systématiques ont examiné des inhibiteurs sélectifs de recapture de la sérotonine (ISRS) comme groupe limitant l'applicabilité des résultats relatifs à la fluoxétine seule. Par conséquent, cette revue vise à fournir des informations spécifiques et cliniquement utiles en comparant les effets de la fluoxétine aux tricycliques (ATC) sur la dépression, aux ISRS, aux inhibiteurs de recapture de la sérotonine-noradrénaline (IRSN), aux inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO), à de nouveaux agents et à d'autres agents conventionnels et non conventionnels.

Objectifs: 

Évaluer les effets de la fluoxétine par rapport à tous les autres agents antidépresseurs sur la dépression chez l'adulte souffrant de troubles dépressifs majeurs unipolaires.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans le registre des essais contrôlés du groupe thématique the Cochrane Collaboration sur la dépression, l'anxiété et la névrose (CCDANCTR) jusqu'au 11 mai 2012. Ce registre contient des ECR pertinents provenant du registre Cochrane des essais contrôlés (CENTRAL) (toutes les années), de MEDLINE (de 1950 à aujourd'hui), d'EMBASE (de 1974 à aujourd'hui) et de PsycINFO (de 1967 à aujourd'hui). Aucune restriction de langue n'a été appliquée. Les listes bibliographiques des articles pertinents et des revues systématiques antérieures ont fait l'objet de recherches manuelles. Le laboratoire pharmaceutique commercialisant la fluoxétine et des experts dans le domaine ont été contactés afin d'obtenir des données supplémentaires.

Critères de sélection: 

Tous les ECR comparant la fluoxétine à tout autre antidépresseur (notamment des agents non conventionnels, comme l'hypéricum) chez des patients souffrant de troubles dépressifs majeurs unipolaires (quels que soient les critères de diagnostic utilisés) ont été inclus. Pour les essais ayant une conception croisée, seuls les résultats issus de la première période de randomisation ont été pris en compte.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont indépendamment extrait des données à l'aide d'un formulaire standard. Les répondants au traitement ont été calculés en intention de traiter : les sorties d'étude étaient toujours incluses dans cette analyse. Lorsque les données concernant les sorties d'étude étaient reportées et incluses dans l'évaluation d'efficacité, elles ont été analysées conformément aux études primaires ; lorsque les sorties d'étude étaient exclues de toute évaluation dans les études primaires, elles étaient considérées comme des échecs de traitement. Les scores des résultats continus ont été analysés en incluant les patients avec une évaluation finale ou avec une dernière observation reportée. Les données de tolérance ont été analysées en calculant la proportion de patients n'ayant pas terminé l'étude pour des causes diverses et en raison d'effets secondaires ou de son inefficacité. Pour les données dichotomiques, les odds ratios (OR) ont été calculés avec leurs intervalles de confiance (IC) à 95 % à l'aide d'un modèle à effets aléatoires. Les données continues ont été analysées en utilisant des différences moyennes standardisées (DMS) avec un IC à 95 %.

Résultats principaux: 

Au total, 171 études ont été incluses dans cette analyse (24 868 participants). Les études incluses ont été réalisées entre 1984 et 2012. Elles présentaient des caractéristiques homogènes en termes de conception, d'intervention et de critères de jugement. L'évaluation de la qualité méthodologique à l'aide de l'outil d'évaluation des risques de biais révélait que la grande majorité d'entre elles ne rapportaient aucun détail méthodologique, comme la méthode de génération de séquences aléatoires, l'assignation secrète et la mise en aveugle. De plus, la plupart des études incluses étaient parrainées par des laboratoires pharmaceutiques, le potentiel de surestimation des effets du traitement dû au biais de parrainage devait donc être pris en compte lors de l'interprétation des résultats. La fluoxétine était aussi efficace que les ATC lorsqu'elle était considérée comme groupe dans le cas de résultats dichotomiques (diminution d'au moins 50 % sur l'échelle de dépression d'Hamilton) (OR 0,97, IC à 95 % 0,77 à 1,22, 24 ECR, 2 124 participants) et de résultats continus (scores moyens à la fin de l'essai ou score de variation des mesures de la dépression) (DMS 0,03, IC à 95% - 0,07 à 0,14, 50 ECR, 3 393 participants). Dans le cas de résultats dichotomiques, la fluoxétine était moins efficace que la dothiépine ou la dosulépine (OR 2,13, IC à 95 % 1,08 à 4,20 ; nombre de sujets à traiter (NST) = 6, IC à 95 % 3 à 50, 2 ECR, 144 participants), la sertraline (OR 1,37, IC à 95 % 1,08 à 1,74 ; NST = 13, IC à 95 % 7 à 58, 6 ECR, 1 188 participants), la mirtazapine (OR 1,46, IC à 95 % 1,04 à 2,04 ; NST = 12, IC à 95 % 6 à 134, 4 ECR, 600 participants) et la venlafaxine (OR 1,29, IC à 95 % 1,10 à 1,51 ; NST = 11, IC à 95 % 8 à 16, 12 ECR, 3 387 participants). Dans le cas de résultats continus, la fluoxétine était plus efficace que l'ABT-200 (DMS - 1,85, IC à 95 % - 2,25 à - 1,45, 1 ECR, 141 participants) et le milnacipran (DMS - 0,36, IC à 95 % - 0,63 à - 0,08, 2 ECR, 213 participants). Cependant, elle était moins efficace que la venlafaxine (DMS 0,10, IC à 95 % 0 à 0,19, 13 ECR, 3 097 participants). La fluoxétine était mieux tolérée que les ATC considérés comme groupe (OR des sorties d'étude totales 0,79, IC à 95 % 0,65 à 0,96 ; NST = 20, IC à 95 % 13 à 48, 49 ECR, 4 194 participants) et mieux tolérée par rapport aux AD individuels, surtout l'amitriptyline (OR des sorties d'étude totales 0,62, IC à 95 % 0,46 à 0,85 ; NST = 13, IC à 95 % 8 à 39, 18 ECR, 1 089 participants) et, parmi les nouveaux AD, l'ABT-200 (OR des sorties d'étude totales 0,18, IC à 95 % 0,08 à 0,39 ; NST = 3, IC à 95 % 2 à 5, 1 ECR, 144 participants), le pramipexole (OR des sorties d'étude totales 0,12, IC à 95 % 0,03 à 0,42, NST = 3, IC à 95 % 2 à 5, 1 ECR, 105 participants) et la réboxétine (OR des sorties d'étude totales 0,60, IC à 95 % 0,44 à 0,82, NST = 9, IC à 95 % 6 à 24, 4 ECR, 764 participants).

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Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.