Positionnement des nourrissons et des enfants hospitalisés souffrant de détresse respiratoire aiguë

Problématique de la revue

Nous avons cherché à savoir s'il y avait une différence dans les critères de jugement des nourrissons et des jeunes enfants atteints du syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) sous ventilation artificielle qui ont été placés en position couchée sur l'abdomen (décubitus ventral ), par rapport à la position couchée sur le dos (décubitus dorsal) ou sur le côté.

Contexte

Le SDRA est l'une des causes les plus fréquentes d'hospitalisation et de décès chez les nourrissons et les jeunes enfants dans le monde. Lorsque les enfants souffrant de détresse respiratoire sévère sont hospitalisés, le traitement pourrait inclure un apport supplémentaire d'oxygène, avec ou sans ventilation assistée. Ces tentatives d'augmenter l'oxygénation pourraient endommager les poumons. Les nourrissons et les enfants souffrant de détresse respiratoire placés dans des positions particulières pourraient être plus confortables, respirer plus facilement et avoir de meilleurs résultats cliniques. Cependant, les différentes positions pourraient également augmenter le risque d’effets indésirables, tels que l'obstruction du tube endotrachéal (le tube qui relie la personne à un ventilateur) et l'extubation accidentelle (retrait du tube). Pour savoir si tel était le cas, nous avons recherché dans la littérature des essais contrôlés randomisés (ECR) et des quasi-ECR comparant deux positions corporelles ou plus pour la prise en charge des nourrissons et des enfants hospitalisés pour un SDRA.

Date de la recherche

Nos données probantes sont actuelles jusqu'au 26 juillet 2021.

Caractéristiques des études

Nous avons inclus six essais, avec un total de 198 participants âgés de quatre semaines à 16 ans. La majorité était sous ventilation mécanique. Le moment des interventions allait de 15 minutes après l'installation de l'enfant dans un lit d'hôpital, à un maximum de sept jours sur la durée de l'intervention. Seul un petit nombre (n = 15) d'enfants n'étaient pas sous assistance respiratoire.

Source de financement des études

Les essais inclus dans cette revue ont été soutenus par des agences publiques.

Principaux résultats

Le fait de se coucher sur l'abdomen semblait améliorer l'utilisation de l'oxygène (l'indice d'oxygénation est le besoin d'oxygène supplémentaire par rapport au niveau d'oxygène de l'enfant) par rapport au fait de se coucher sur le dos. Cette conclusion s'appuie sur les données issus de trois essais menés auprès de 141 enfants. Un seul essai portant sur 102 enfants a signalé des effets indésirables, qui ne différaient pas entre les deux positions. Un essai mené auprès de 50 enfants a comparé la position couchée sur le dos à d'autres positions et n'a pas pu mettre en évidence de différences cohérentes dans l'oxygénation du sang. Il n'y a pas suffisamment d'informations pour tirer des conclusions sur les bénéfices et les risques d'une position quelconque chez les nourrissons et les enfants souffrant de détresse respiratoire aiguë.

Il est important de rappeler que ces enfants étaient hospitalisés et sous respiration assistée. En raison de l'association entre le fait d'être couché sur le ventre et le syndrome de mort subite du nourrisson, les enfants ne doivent pas être placés sur le ventre, sauf s'ils sont hospitalisés et que leur respiration est constamment surveillée.

Niveau de confiance des données probantes

Les conclusions de cette revue sont limitées par le petit nombre d'essais identifiés, dont cinq comptaient moins de 40 participants, la courte durée des interventions et le manque de description de la manière dont les auteurs des études ont abordé le risque de biais dans leurs essais. Dans l'ensemble, nous ne sommes pas certains de la manière dont les différentes positions affectent nos principaux critères de jugement, tels que les niveaux d'oxygénation. Cela signifie que des recherches futures sont nécessaires pour améliorer le niveau de confiance de nos résultats.

Conclusions des auteurs: 

Bien que les études incluses suggèrent que le positionnement en décubitus ventral pourrait offrir certains bénéfices, il n'y avait pas suffisamment de données probantes pour faire des recommandations définitives. Il semble y avoir des données probantes d’un niveau de confiance faible suggérant que le positionnement améliore l'oxygénation chez les enfants sous ventilation mécanique atteints de syndrome de détresse respiratoire aiguë. En raison du risque accru de mort subite du nourrisson en décubitus ventral et de lésions pulmonaires en cas de ventilation artificielle, il est recommandé de ne placer les nourrissons et les enfants hospitalisés dans cette position que sous surveillance cardiorespiratoire continue.

Lire le résumé complet...
Contexte: 

Le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) est une cause significative d'hospitalisation et de décès chez les jeunes enfants. Le positionnement et la ventilation mécanique ont été régulièrement utilisés pour réduire la détresse respiratoire et améliorer l'oxygénation des patients hospitalisés. En raison de l'association entre la position couchée sur le ventre et le syndrome de mort subite du nourrisson (SMSN) dans les six premiers mois, il est recommandé de placer les jeunes enfants sur le dos (décubitus dorsal). Cependant, le décubitus ventral pourrait être un moyen non invasif d'augmenter l'oxygénation chez les personnes souffrant de détresse respiratoire aiguë, et offre un avantage de survie plus significatif chez ceux qui sont ventilés mécaniquement. Il existe des différences substantielles dans la mécanique respiratoire entre les adultes et les nourrissons. Alors que les voies respiratoires connaissent un développement significatif au cours des deux premières années de la vie, les différences entre adultes et enfants en matière de physiologie des voies respiratoires s'estompent vers l'âge de six à huit ans. Cependant, il existe un risque réduit de SMSN pendant la ventilation artificielle chez les nourrissons hospitalisés. Ainsi, une revue mise à jour portant sur le positionnement des nourrissons et des jeunes enfants atteints de SDRA est justifiée. Il s'agit d'une mise à jour d'une revue publiée en 2005, 2009 et 2012.

Objectifs: 

Comparer les effets de différentes positions du corps chez les nourrissons et les enfants hospitalisés atteints du syndrome de détresse respiratoire aiguë âgés de quatre semaines à 16 ans.

Stratégie de recherche documentaire: 

Nous avons effectué des recherches dans CENTRAL, qui contient le registre spécialisé du groupe Cochrane sur les infections respiratoires aiguës, MEDLINE, Embase et CINAHL de janvier 2004 à juillet 2021.

Critères de sélection: 

Essais contrôlés randomisés (ECR) ou quasi-ECRs comparant deux ou plusieurs positions pour la prise en charge des nourrissons et des enfants hospitalisés pour un SDRA.

Recueil et analyse des données: 

Deux auteurs de la revue ont extrait les données de chaque étude de façon indépendante. Nous avons résolu les différends par consensus, ou nous avons fait appel à un troisième contributeur pour arbitrer. Nous avons analysé les critères de jugement bivariés en utilisant un rapport des cotes (RC) et un intervalle de confiance (IC) à 95 %. Nous avons analysé les critères de jugement continus en utilisant une différence moyenne (DM) et un IC à 95 %. Nous avons utilisé un modèle à effets fixes, sauf si l'hétérogénéité était significative (statistique I2 > 50 %), auquel cas nous avons utilisé un modèle à effets aléatoires.

Résultats principaux: 

Nous avons inclus six essais : quatre essais croisés et deux essais randomisés parallèles, avec 198 participants âgés de 4 semaines à 16 ans, dont tous sauf 15 étaient sous ventilation mécanique. Quatre essais ont comparé le décubitus ventral au décubitus dorsal. Un essai a comparé le décubitus ventral à la position dépendante du poumon en bon état (où la personne est allongée du côté du poumon sain, par exemple, si le poumon droit était sain, elle devait s'allonger sur le côté droit) et à la position indépendante (ou indépendante du poumon non sain, où la personne est allongée du côté opposé au poumon sain, par exemple, si le poumon droit était sain, elle devait s'allonger sur le côté gauche). Un essai a comparé les positions indépendantes et dépendantes des poumons.

Lorsque le décubitus ventral (avec ventilation) et le décubitus dorsal ont été comparées, il n'y avait aucune information sur les épisodes d'apnée ou la mortalité due à des événements respiratoires. Il n'y a pas de résultat concluant en ce qui concerne la saturation en oxygène (SaO2; DM 0,40 mmHg, IC à 95 % -1,22 à 2,66 ; 1 essai, 30 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) ; les gaz du sang, pCO2 (DM 3,0 mmHg, IC à 95 % -1,93 à 7.93 ; 1 essai, 99 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ou PO2 (DM 2 mmHg, IC à 95 % -5,29 à 9,29 ; 1 essai, 99 participants ; données probantes d’un niveau de confiance faible) ; ou fonction pulmonaire (rapport PaO2/FiO2 ; DM 28,16 mmHg, IC à 95 % -9,92 à 66,24 ; 2 essais, 121 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Cependant, on a constaté une amélioration de l'indice d'oxygénation (FiO2% X MPAW/ PaO2) avec le positionnement en décubitus ventral dans les deux essais parallèles (DM -2,42, IC à 95 % -3,60 à -1,25 ; 2 essais, 121 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible), et l'étude croisée (DM -8,13, IC à 95 % -15,01 à -1,25 ; 1 étude, 20 participants).

Les indices dérivés de la mécanique respiratoire, tels que le volume courant, la fréquence respiratoire et la pression expiratoire positive (PEP), ont été rapportés. Une étude parallèle a révélé une diminution apparente du volume courant entre les groupes en décubitus ventral et dorsal (DM -0,60, IC à 95 % -1,05 à -0,15 ; 1 étude, 84 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Lorsque les positions en décubitus ventral et dorsal ont été comparées dans une étude croisée, aucun résultat concluant n'a été obtenu en ce qui concerne la compliance respiratoire (DM 0,07, IC à 95 % -0,10 à 0,24 ; 1 étude, 10 participants), les modifications de la PEP (DM -0,70 cm H2O, IC à 95 % -2,72 à 1,32 ; 1 étude, 10 participants) ou la résistance (DM -0,00, IC à 95 % -0,05 à 0,04 ; 1 étude, 10 participants).

Une étude a rapporté des effets indésirables. Il n'y a pas de résultats concluants quant au préjudice potentiel entre les groupes en ce qui concerne l'extubation (RC 0,57, IC à 95 % 0,13 à 2,54 ; 1 essai, 102 participants ; niveau de confiance très faible) ; les obstructions de la sonde endotrachéale (RC 5,20, IC à 95 % 0,24 à 111.09 ; 1 essai, 102 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) ; plaies de pression (RC 1,00, IC à 95 % 0,41 à 2,44 ; 1 essai, 102 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) ; et hypercapnie (taux élevés de dioxyde de carbone artériel ; RC 3,06, IC à 95 % 0,12 à 76,88 ; 1 essai, 102 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Une étude (50 participants) a comparé dorsal à la position dépendante et indépendante des poumons. Il n'y a pas de données probantes concluantes suggérant que la PaO2 soit différente entre le positionnement en décubitus dorsal et la position dépendante du poumon en bon état (DM 3,44 mm Hg, IC à 95 % -23,12 à 30,00 ; 1 essai, 25 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible). Il n'y a pas non plus de données probantes concluantes pour la position en décubitus dorsal et la position indépendante du poumon en bon état (DM -2,78 mmHg, IC à 95 % -28,84, 23,28 ; 25 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible) ; ou entre la position dépendante ou indépendant du poumon en bon état (DM 6,22, IC à 95 % -21,25 à 33,69 ; 1 essai, 25 participants ; données probantes d’un niveau de confiance très faible).

Comme la plupart des essais n'ont pas décrit comment les biais possibles ont été traités, le risque de biais dans ces résultats n'est pas clair.

Notes de traduction: 

Post-édition effectuée par Hussein Ayoub et Cochrane France. Une erreur de traduction ou dans le texte d'origine ? Merci d'adresser vos commentaires à : traduction@cochrane.fr

Tools
Information

Les traductions sur ce site ont été rendues possibles grâce à la contribution financière du Ministère français des affaires sociales et de la santé et des instituts publics de recherche canadiens.